Rechercher
Rechercher

Actualités

Le géant de l’Est rejoindra la famille européenne le 1er mai prochain L’UE face au défi polonais

Parmi les dix pays qui rejoindront l’UE le 1er mai prochain, la Pologne représente, de loin, le premier défi auquel la communauté européenne doit faire face. Peuplée de quelque 38 millions d’habitants et occupant une superficie de plus de 300 000 km2, son économie produit autant que les PIB des 9 autres nouveaux adhérents réunis. Ainsi, l’adhésion de ce géant politique, démographique et économique (bien qu’il soit relativement pauvre) constituera un test pour l’UE, qui compte accueillir en 2007 un autre géant, la Roumanie, et qui a déjà lancé des négociations avec la Turquie. À trois mois du grand élargissement vers l’Est, la Pologne reste un pays à grand potentiel, mais aux réalités économiques douloureuses : avec un taux de chômage de 17 % et 1,7 million de jeunes hautement qualifiés acceptant d’être payés 75 % moins que ceux de l’Ouest, le pays peut paraître un eldorado pour les investisseurs étrangers ; mais ceux-ci, après le boom des années 90, font cruellement défaut. Ils préfèrent les autres, petits et dynamiques, pays de l’Est pour investir leurs dollars et euros : en 2002, le taux d’investissement étranger était de 110 euros par habitant en Pologne, alors qu’il dépassait les 800 euros par habitant pour les autres pays candidats. Par ailleurs, la dette publique, bien qu’elle soit bridée à 50 % du PIB par la Constitution, croît inexorablement et menace le pays d’une crise économique majeure. Les finances publiques souffrent d’un nombre élevé de citoyens vivant à la charge de l’État (2,4 millions de chômeurs et autres bénéficiaires d’aides sociales), et la corruption achève de rendre le système encore plus malsain. L’économie polonaise souffre par ailleurs d’une structure héritée de l’ère communiste. Une part très grande de la population vit d’une agriculture d’autosuffisance qui est destinée à disparaître à cause des critères économiques imposés par Bruxelles, alors que le gouvernement peine à reconvertir ou à privatiser les 2 000 entreprises d’État défaillantes. Les grèves et les manifestations des cheminots, mineurs et autres ouvriers du secteur public se succèdent ces derniers temps, menaçant la fragile coalition au pouvoir menée par les socialistes et retardant les réformes promises par le gouvernement. Au-delà de ces chiffres pessimistes, le pays montre des signes de reprise non négligeables : l’indice boursier de la place de Varsovie a ainsi augmenté de 45 %, la consommation locale reste soutenue et il est quasiment impossible de trouver un bureau à louer dans la capitale. Les bureaucrates de Bruxelles gardent par ailleurs leur confiance dans les potentialités du pays malgré son titre de « plus mauvais élève » parmi les dix nouveaux États membres. Une classe politique réprouvée Sur le plan politique, Varsovie n’a pas attendu l’adhésion à l’UE pour montrer ses cartes. Dans la foulée de la crise irakienne qui a divisé les Européens, la Pologne a ouvertement affiché son soutien inconditionnel aux États-Unis en déployant ses troupes dans le centre de l’Irak. « La Pologne a manqué une bonne occasion de se taire » avait lancé un Jacques Chirac furieux de voir un pays candidat à l’adhésion « trahir » le mot d’ordre européen au début de la guerre. En effet, de l’intellectuel à l’homme de la rue, tous les Polonais s’accordent à dire qu’il est plus judicieux d’avoir plus d’un allié. Le choix des États-Unis serait dû au soutien moral offert par les Américains la veille de la chute du bloc de l’Est et à l’aversion des Polonais à la chose communiste, aversion partagée par la majeure partie de l’Europe de l’Est. Grands rancuniers, les Polonais reprochent par ailleurs à l’Europe de les avoir « lâchés » au début de la Seconde Guerre mondiale. Sur le plan de la politique intérieure, la population boude les élections et se montre sceptique face, d’une part, à une classe politique héritée de l’ère communiste et empêtrée dans les scandales financiers, et de l’autre, à une opposition, personnifiée par Lech Walesa ou d’autres nationalistes et conservateurs, qui a prouvé son incapacité à gérer les affaires publiques. À trois mois de l’adhésion, ne reste au Polonais, qui croit beaucoup plus, selon un récent sondage, aux institutions européennes et à l’Otan qu’à leurs propres institutions, que d’attendre le salut de l’extérieur. Pour l’Union européenne, malgré la situation économique et la « félonie » politique de la Pologne pendant la guerre d’Irak, le vin de l’élargissement est tiré, il faut le boire. r.b.
Parmi les dix pays qui rejoindront l’UE le 1er mai prochain, la Pologne représente, de loin, le premier défi auquel la communauté européenne doit faire face. Peuplée de quelque 38 millions d’habitants et occupant une superficie de plus de 300 000 km2, son économie produit autant que les PIB des 9 autres nouveaux adhérents réunis. Ainsi, l’adhésion de ce géant politique, démographique et économique (bien qu’il soit relativement pauvre) constituera un test pour l’UE, qui compte accueillir en 2007 un autre géant, la Roumanie, et qui a déjà lancé des négociations avec la Turquie.
À trois mois du grand élargissement vers l’Est, la Pologne reste un pays à grand potentiel, mais aux réalités économiques douloureuses : avec un taux de chômage de 17 % et 1,7 million de jeunes hautement qualifiés acceptant...