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Actualités - CHRONOLOGIE

ÉCLAIRAGE Washington presse le Liban, la Syrie et l’État hébreu d’éviter tout débordement Pourquoi Israël et le Hezbollah pourraient bien s’accomoder du bulldozer détruit

Doit-on désormais mesurer les ripostes de l’armée israélienne aux attaques du Hezbollah à l’unique aune du raid que celle-ci a mené, dans les derniers mois de 2003, contre un camp d’islamistes à 15 kilomètres de Damas ? Si oui, la réplique à la mort d’un soldat israélien suite à la destruction, lundi, par un tir de roquette, d’un bulldozer de l’État hébreu qui s’est aventuré au-delà de la ligne bleue, a clairement montré les limites des ripostes israéliennes en question. Par contre, si l’attaque contre Aïn el-Saheb, en plein territoire syrien, n’est pas – et ne doit pas être – considérée comme le référent absolu maintenant que les GI stationnent aux portes de la Syrie, mais bien comme une exceptionnelle et conjoncturelle concordance pratique des intérêts israélo-américains, l’incident de ce début de semaine serait bien ce qu’il semble être, en toute logique. À savoir : une provocation ponctuelle et sans lendemain de la part d’Israël. Parce que, à moins qu’il n’ait été chargé d’une improbable et rocambolesque mission dont on ne saura, de toute façon, jamais rien, qu’est-ce que le bulldozer israélien est venu faire en territoire libanais, sinon, tester, provoquer, (se) mesurer – quelques jours à peine après la ridicule invitation que Moshé Katsav a adressée à Bachar el-Assad – à la dompteuse en chef de l’omniprésent Hezbollah : la Syrie ? Mais ce qu’Israël a sans doute mal calculé, c’est que le parti intégriste – non content d’usurper la place et la mission de l’armée, avec l’aval aveugle d’un État libanais sourd aux résolutions de l’Onu comme aux conseils de son amie la France – fait montre parfois, souvent, d’une fougue et d’une impétuosité que même Damas n’arrive pas à maîtriser. Ce qu’Israël a sans doute oublié, c’est que le secrétaire général du Hezbollah continue, comme depuis le début des négociations sur l’échange de prisonniers avec Israël, de piaffer d’impatience à cause de la lenteur ou des avanies de ce processus, et qu’au moment où celui-ci semble entrer dans une phase décisive, voire finale, un bon coup de sang pourrait le rappeler au bon souvenir des responsables israéliens, ou exercer, sur ceux-là, une bien forte pression. Enfin, ce qu’Israël semble avoir occulté – ou peut-être en a-t-il, fort à propos, profité ? –, c’est une éventuelle appréhension du Hezbollah, ce sont ces questions que sans doute les cadres du parti intégriste se posent sur l’avenir même de leur formation. À l’heure où l’Iran, par la voix du secrétaire de son Conseil suprême de sécurité nationale, Hassan Rohani, affirme sans ambages, de Paris, qu’« un jour ou l’autre » les relations avec les États-Unis seront rétablies ; à l’heure, aussi, où la Syrie, par la voix de son jeune président, multiplie les gestes de bonne volonté à l’égard de Washington et même de Tel-Aviv, le Hezbollah aurait pu penser, en toute légitimité, que l’écho de la destruction du bulldozer israélien s’entendrait bien distinctement à Damas et à Téhéran. Une façon de dire, assez bruyamment certes, que le parti intégriste est encore là, et qu’il compte bien le rester. Il n’en reste pas moins qu’Israël était persuadé que le Hezbollah n’allait pas, aussi ostensiblement, décider de modifier les règles – calme impératif et escalade interdite – que le jeu US a imposées de facto entre Israël, la Syrie et le Liban. D’autant que Washington a affirmé hier être en contact avec ces trois pays pour leur demander d’éviter une escalade le long de la ligne bleue : « Nous sommes en contact étroit avec des responsables gouvernementaux israéliens, libanais et syriens et pressons toutes les parties de faire preuve du plus de retenue possible pour éviter toute escalade supplémentaire », a déclaré un porte-parole du département d’État, Adam Ereli. Qui a répété l’appel de son Administration au Liban et à la Syrie pour qu’ils cessent tout soutien au Hezbollah, accusé de pratiquer une politique « d’escalade calculée », tout en demandant « à tous les bords » de respecter leur engagement « à ce qu’il n’y ait plus de violations de la ligne de démarcation de l’Onu » entre le Liban et Israël. Israël qui sait pertinemment bien – et Adam Ereli le lui a rappelé – qu’une riposte autrement que ponctuelle, visant autre chose que des positions militaires du Hezbollah le long de la frontière (sachant que pour les autorités israéliennes, cette réplique minimum est non négociable), devrait obligatoirement recevoir l’aval de Washington – et le OK US ne semble vraiment pas de mise en ce moment. Il n’empêche, l’État hébreu semble aujourd’hui convaincu qu’il a réussi à relancer le débat sur « l’inacceptable » soutien de Damas au Hezbollah, une organisation qualifiée de « terroriste » par les USA, et à remettre au goût de l’heure les pressions américaines tous azimuts sur la Syrie. Même au prix, immense à ses yeux, de l’un de ses soldats. Il n’empêche, le Hezbollah semble, lui aussi, avoir réussi à rappeler à tous qu’il est toujours présent, toujours membre incontournable de l’équation régionale. Seul perdant, comme toujours, le Liban. Maintenant que l’État hébreu et le parti intégriste pourraient fort bien s’accomoder de n’importe quel incident, la question de l’absence de l’armée au Sud se pose, pour la première fois depuis des années, avec bien plus d’acuité. Sauf que, concomitance des deux volets et tutelle obligent, Philippe Lecourtier semble condamné à s’égosiller. Et le Libanais à regretter que pour une fois que le Conseil supérieur libano-syrien peut servir à quelque chose – contenir le Hezbollah –, c’est peine perdue. Ziyad MAKHOUL
Doit-on désormais mesurer les ripostes de l’armée israélienne aux attaques du Hezbollah à l’unique aune du raid que celle-ci a mené, dans les derniers mois de 2003, contre un camp d’islamistes à 15 kilomètres de Damas ? Si oui, la réplique à la mort d’un soldat israélien suite à la destruction, lundi, par un tir de roquette, d’un bulldozer de l’État hébreu qui s’est aventuré au-delà de la ligne bleue, a clairement montré les limites des ripostes israéliennes en question. Par contre, si l’attaque contre Aïn el-Saheb, en plein territoire syrien, n’est pas – et ne doit pas être – considérée comme le référent absolu maintenant que les GI stationnent aux portes de la Syrie, mais bien comme une exceptionnelle et conjoncturelle concordance pratique des intérêts israélo-américains, l’incident de...