La perspective d’une destitution prochaine du président lituanien s’est rapprochée hier après une décision de la Cour constitutionnelle, qui a estimé que Rolandas Paksas avait violé la Constitution en naturalisant un homme d’affaires russe. Le décret de la Cour, qui s’est prononcée au lendemain d’une réunion de la commission parlementaire consacrée à sa destitution, contribue à affaiblir un peu plus encore le président.
Ancien pilote acrobate, élu président en janvier à la surprise générale, Rolandas Paksas est au cœur d’un scandale politique qui pourrait bien lui coûter son fauteuil. Le scandale a éclaté en octobre après que les services de sécurité intérieure ont transmis un rapport confidentiel aux parlementaires sur les liens supposés entretenus entre la présidence et la mafia. Dans leur rapport, les services de sécurité examinent six domaines d’influence du crime organisé sur le fonctionnement du cabinet présidentiel.
Selon leurs conclusions, une firme de relations publiques russe liée aux services secrets de Moscou, Almax, aurait exercé son influence sur la présidence. Pour la commission, des groupes criminels ont essayé d’imposer « des changements à la tête des institutions publiques » de Lituanie. Le rapport vilipende aussi les relations entretenues par Rolandas Paksas avec un homme d’affaires d’origine russe, Jurijus Borisovas. Principal financier de la campagne électorale du président, Borisovas est accusé de trafic d’armes illégal avec le Soudan.
Mais si l’affaire fait si grand bruit, c’est qu’elle dépasse le cadre classique d’un scandale de corruption. À cinq mois de son adhésion à l’Union européenne et à l’Otan, la Lituanie, l’un des trois pays baltes à avoir arraché leur indépendance à l’Union soviétique en 1991, serait-elle toujours aussi perméable à l’influence russe ? Le scandale de la naturalisation de Borisovas, un homme proche de Poutine qui s’est vu attribuer la nationalité lituanienne par décret présidentiel, révélerait ainsi la manière dont le Kremlin, qui n’a jamais vraiment digéré les indépendances baltes, tente de reprendre la main dans son ancien pré carré.
Selon le rapport de la commission, l’homme d’affaires russe, qui en finançant la campagne de Paksas, pratiquement inconnu avant la campagne électorale, a contribué à le faire élire, aurait tenté de faire chanter le président lituanien. Selon la transcription d’écoutes téléphoniques, Borisovas, qui décrivait Paksas « comme un président mort », aurait exigé un poste de conseiller présidentiel.
Lâché par la plupart des personnalités politiques de son pays, Paksas doit désormais affronter une procédure de destitution lancée par les parlementaires. Au début du mois, le président a dû annuler une visite prévue à Washington, où il devait être reçu par le président Bush.
Les plus commentés
Entre pouvoir et agir : oser
Banana pschitt
Résolution bancaire : la BDL face à un nouveau dilemme