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VIENT DE PARAÎTRE - « Le berceau du monde », de Fady Stephan L’invitation au voyage, ou les correspondances secrètes(photos)

Un livre qui sort des sentiers battus et qui se fraie son propre chemin… Baroque, insolite, érudit, jetant des ramifications et des embranchements multiples, oscillant entre digressions inspirées et contes levantins inédits, ce premier roman de Fady Stephan semble l’affaire d’une vie. Une vie où compilation, histoire (grande et petite), poésie, littérature et désirs d’évasion font un heureux mariage d’amour. Portant le titre Le berceau du monde avec deux mots-clefs « orient-opéra » en sous -titre, cet ouvrage (aux éditions Verticales – 389 pages) s’inscrit dans le sillage des écritures richement documentées où la réalité dépasse, devance et explique la fiction. Né à Beyrouth en 1946, Fady Stéphan est professeur d’archéologie et de langues nord-est sémitiques à l’Université libanaise. Fouilles (au Liban, à Chypre, au Yémen) et traductions en français de nombreux textes latins, araméens, syriaques, hébreux, phéniciens et puniques lui sont familières. Spécialités qui non seulement se reflètent dans ces pages foisonnantes de détails historiques mais les inondent et parfois en débordent. Une authentique invitation au voyage au cœur de l’Orient que ce Berceau du monde dont parlait justement Gérard de Nerval. Fourmillant récit initiatique pour retrouver l’essence d’une vie, d’un pays. De l’enfance de Fady Stéphan, lui servant à la fois de voilette et d’écran pour se soustraire aux regards et projeter son « intériorité », aux incroyables turbulences d’une histoire du Liban touffue, dense, panachée de couleurs vives et variées dans sa mosaïque de communautés, brassant événements sanglants et personnages pittoresques, ce livre est un vibrant hommage à une terre aimée et à son insaisissable société. Labyrinthe d’histoires pour un kaleidoscope d’images et une galerie de personnages attachants. Comme Proust avait rêvé de faire un livre sur la musicalité et les richesses sonores des seuls noms, Stéphan entreprend une longue et minutieuse promenade à travers nos « villes douces » pour émerger à Deir el-Kamar où « les étés se déroulaient dans un cirque élevé de collines, couronné d’un bois de cyprès argentés… » Histoire du Liban comme on ne l’a jamais racontée, avec des chapitres palpitants de vie qui s’enchaînent comme ces poupées russes gigognes, prolongeant ainsi le sens du merveilleux d’une narration puisée au sein même d’une terre aux légendes millénaires. Épique, lyrique, bruissant d’une poésie aux phosphorescences magiques, ce livre hors norme passant du conte au journal intime, des poèmes à l’historiographie, évoque avec subtilité une terre édénique, paradis retrouvé des romantiques et point de rencontre et d’accueil de toutes les religions, communautés de pensées et sectes philosophiques. De l’unité à la réconciliation à notre innommable guerre-déchirure, sur fond de paysages somptueux et impassibles, se déroule cette fresque où défilent Hindiyé, le Djazzar, des émirs (Béchir, Fakhreddine), Lady Hester Stanhope, Lamartine, Nerval, la reine de Saba, Kamal Joumblatt et bien d’autres…Orient rêvé , Orient de rêve, dans ce tissu chamarré de couleurs éclatantes et comme ployant sous les nuages d’encens qui s’en dégagent, voilà des pages bourrées de connaissances où tout se succède et se téléscope (comme un film) à une vitesse déroutante et c’est à peine si ce volumineux ouvrage, avec un saut de plus de cent ans dans le vide d’un trait de plume, peut contenir autant de monde, d’aspiration, d’agitation et de paysages… Approche savante, spirituelle et littéraire du Liban, passionnément et profondément aimé. L’auteur semble être sous le charme de ce pays aux innombrables correspondances secrètes et il en communique cette richesse fondamentale à travers une écriture sobre, précise, imagée mais aussi ornée et poétique. Alliant le romanesque, l’autobiographique et un sens critique réservé, ce livre singulier, s’il ne livre pas entièrement la personnalité de son auteur, n’en jette pas moins toute la lumière, avec émotion et ravissement, sur « un petit pays caché derrière un éventail de collines et de ravins de mer, recelant tant de merveilleux ». Edgar DAVIDIAN Extrait « Dans la chaîne des montagnes taillées en arêtes du tronc du Liban, enneigées de l’hiver au printemps, dans l’arrondi de ses branches basses qui descendent vers la mer, collines “ cénomaniennes ” lissées par le temps et les pluies, des figures présentent un théâtre de fantômes gris. Des récits fabuleux restent couchés sur les lames calcaires. Au mouvement géologique premier – dérives de continents, montagnes surgies, vallées écloses – aux déchirements du terrain qui avaient fini dans un figement, avaient succédé les visages burinés de colosses dévorés de rêves. À leur tour, ces personnages s’étaient immobilisés contre les montagnes comme du sel gemme. Le diamant du Sannine surgit très haut au-dessus de l’eau ; et à ses pieds, les donjons, les tourelles, les maisons isolées ont ajouté des dents au profil désolé des crêtes… »
Un livre qui sort des sentiers battus et qui se fraie son propre chemin… Baroque, insolite, érudit, jetant des ramifications et des embranchements multiples, oscillant entre digressions inspirées et contes levantins inédits, ce premier roman de Fady Stephan semble l’affaire d’une vie. Une vie où compilation, histoire (grande et petite), poésie, littérature et désirs d’évasion font...