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Actualités - OPINION

Ils ont osé !

L’amnésie. C’est quand la mémoire part en lambeaux. C’est quand on ne se souvient plus de rien. C’est quand une espèce de toile de jute vient tapisser le fond d’un crâne, c’est quand plein de mouches viennent danser dans chaque recoin d’un cerveau. Dans ces cas-là, deux possibilités : soit l’on souffre gravement, profondément – schizophrénie, démence sénile, paranoïa aiguë –, soit l’on a prévu, calculé, programmé sciemment cet oubli. L’État, exécutif, législatif et judiciaire confondus, a décidé son amnésie, l’a érigée en principe politique. L’État a certainement oublié la bouderie de neuf mois de Rachid Karamé lorsque le président Hélou a envoyé l’armée remplir son devoir au Sud, là où les Palestiniens s’étaient autoproclamés résistance quasi milicienne contre Israël. À partir du sol libanais… L’État a certainement oublié l’accord du Caire, lorsqu’en 1969 on a permis aux fedayine armés jusqu’aux dents de «s’implanter» dans le Arkoub, l’État a oublié que le Liban-Sud et sa Békaa-Ouest ont été débaptisés. En fatehland… Premier abandon, première abdication de la souveraineté de l’État au Liban-Sud. Abandon parachevé en 78 avec l’invasion israélienne, la création de la zone de sécurité, l’arrivée de la Finul, de l’ALS. Abandon couronné en 82, la zone de sécurité étendue jusqu’à Jezzine, une cerise sur un gâteau : l’État en tant qu’institution est ainsi devenu, au Liban-Sud, le parfait synonyme du mot néant. De vide abyssal. Après l’amnésie, le culot. Mot d’ordre de l’État : osons ! Et ils ont osé. Osé demander des comptes à une population qu’ils ont niée pendant 31 ans et dont la seule alternative était de crever sur place ou de survivre. Une population qui a refusé de se laisser mourir. Ou de torturer. Un État avec une mémoire bien courte, une morale bien élastique et une échelle de valeurs un poil pervertie… Amine Gemayel, à ce sujet, a été magistral. D’autres aussi. L’amnistie. Taboue, tellement taboue. Alors que tout le monde sait que les tortionnaires de Khiyam ne reviendront jamais au Liban. Dans tous les cas, qu’ils aillent au diable. Une Résistance que tout le monde respecte mais qui a eu la mauvaise idée de prendre en otage toute décision, qui s’est arrogée toutes les exclusivités. L’immaturité politique et le manque de discernement de l’État sont effrayants.
L’amnésie. C’est quand la mémoire part en lambeaux. C’est quand on ne se souvient plus de rien. C’est quand une espèce de toile de jute vient tapisser le fond d’un crâne, c’est quand plein de mouches viennent danser dans chaque recoin d’un cerveau. Dans ces cas-là, deux possibilités : soit l’on souffre gravement, profondément – schizophrénie, démence sénile, paranoïa...