Actualités - CHRONOLOGIE
Civilisations - Statues et objets de culte à Sidon, Carthage et Cadix II - Les stèles, un art caractérique du monde phénicien
Par BOUSTANY Harès, le 17 août 2000 à 00h00
Chez les Phéniciens, même si les arts «mineurs» l’emportent, la sculpture de plus grandes dimensions ne manque pas. De Sidon à Carthage, les statues viriles, pour la plupart de souverains et de prêtres, confirment l’influence égyptienne dans la phase ancienne, et l’influence grecque dans la phase récente. Sont à noter surtout les sarcophages, eux aussi d’abord d’inspiration égyptienne et puis grecque, qui reproduisent dans la partie supérieure les traits du défunt idéalisés et stylisés : c’est un genre d’arts qui a ses principaux centres à Sidon en Phénicie, à Carthage en Afrique, à Cadix en Ibérie. (Voir «L’orient-Le Jour» du jeudi 10 août). L’art de la sculpture, toutefois, trouve sa plus large réalisation dans les stèles, un «genre» véritable et propre, caractéristique du monde phénicien, particulièrement répandu en Occident. Les lieux sacrés à ciel ouvert, où l’on brûlait avec un rite approprié les enfants morts aussitôt avant la naissance ou aussitôt après (on croyait auparavant qu’on les tuait, mais maintenant on en doute), ont révélé des milliers de stèles, qui portent sur la face les images ou les symboles de la divinité : «bétyles» ou piliers sacrés, «idoles en bouteille», «signes de Tanit», et d’autres encore. Les stèles commémorent un rite Les stèles, dont la hauteur va de quelques centimètres jusqu’au-delà de la stature humaine (mais ces derniers cas sont rares), constituent évidemment la commémoration d’un rite. Du point de vue des représentations, et particulièrement des représentations humaines, on note encore une fois le passage d’une phase plus ancienne d’influence égyptienne à une plus récente d’influence grecque : on peut dater la première du VIIe au Ve siècle av. J.-C., la seconde du IVe jusqu’au IIe, et parfois après. Au travail de la pierre se joint celui de la terre cuite. Il y a des figurines au moule, et parmi ces dernières se détache un genre particulier, celui qui était produit pour les sanctuaires où l’on demandait la guérison des maladies, ou bien on rendait grâce pour l’avoir obtenue. Les figurines étaient modelées sans les bras et, ensuite, selon les directives des fidèles, on procédait sur le lieu au rajout des bras, plaçant les mains dans l’orientation des points où la maladie avait élu son siège. À Bitia, en Sardaigne, furent trouvées des centaines de statues de ce genre. Une autre production caractéristique, toujours en terre cuite, est celle des masques. Ils sont de deux genres différents : d’une part des visages féminins sereins et souriants, de l’autre des visages masculins difformes et ridés, affublés de grimaces grotesques. Les dimensions un peu plus petites que nature indiquent que de tels masques ne pouvaient pas être placés sur le visage, et comme ils avaient des trous de suspension, nous pensons qu’ils furent suspendus sur les parois des tombes, pour attirer la bienveillance des esprits bons et éloigner les esprits malveillants. L’origine des masques, comme des stèles, est également orientale, mais leur grande diffusion eut lieu en Occident. Arts « mineurs » C’est un concept assez discutable, que le concept d’arts «mineurs». Il englobe, de toute façon, des produits divers mais étroitement liés entre eux : des amulettes, des scarabées, des ivoires et des os, des bijoux et d’autres encore. Les amulettes sont le royaume de la magie égyptienne, répandue dans toute la Méditerranée. Parmi les types les plus courants, nous trouvons l’œil, l’uræus, le faucon, le singe, le chien, le crocodile. Il y a des divinités comme Isis, Horus, Bès, Thot, Anubis et ainsi de suite. Ces amulettes, faites de pierres précieuses ou de pâte de verre, proviennent en grande partie directement de l’Égypte, et furent imitées en petit nombre dans le monde phénicien et surtout à Carthage. Il en va de même pour les scarabées, de pâte émaillée, de jaspe ou de cornaline (moins fréquemment d’autres pierres). Sur la base de ces petits objets, qui servaient pour des identifications personnelles, il y avait des inscriptions et des dessins, ces derniers égyptiens dans une première phase, et grecs dans une seconde : ce qui démontre l’imitation et la «ré-élaboration» dans le cas présent également. Avec une spécification significative : pour les exemplaires en jaspe vert, nous avons trouvé la matière première en Sardaigne, et nous retenons donc que là se trouvait le centre primaire de la production, répandue ensuite dans les autres régions. Les ivoires ont, dans l’Orient phénicien, une importance et une originalité particulières. On en a découvert dans tous les pays limitrophes de la Phénicie, ce qui démontre que ces artisans étaient considérés et recherchés. Les ivoires étaient sculptés en relief et ajourés en forme de figures humaines, animales et fantastiques, avec des plantes et des motifs floraux. Primait encore une fois l’inspiration égyptienne, mais il y avait aussi des composantes mésopotamiennes et anatoliennes. Leur fonction consistait à décorer les autels, les encensoirs, les trônes, les escabeaux, les lits, les tables, et autre mobilier. En Occident, la diffusion des ivoires (et celle des os, matériau de remplacement plus moderne) est assez minime, exception faite pour l’Ibérie qui a restitué un vaste répertoire. Pour ce qui est des bijoux, par contre, l’Occident est de nouveau en évidence, même si les modèles sont généralement orientaux. Et en Occident le centre sarde de Tharros l’emporte sur tous les autres; là, les petits objets précieux en or, argent, et pierres précieuses furent fabriqués par milliers : se détachent parmi eux les boucles d’oreille à pendentifs au faucon égyptien, et les bracelets à plusieurs feuilles d’où pendent aussi le faucon, la palmette et la fleur de lotus. L’orfèvrerie découverte en Espagne, à Aliseda par exemple et à Carambolo, mérite une mention spéciale; là, les modèles phéniciens sont repris et élaborés par les artisans locaux, donnant vie à une production d’une originalité frappante. Mais pour citer, rapidement au moins, les autres arts mineurs, comment ne pas signaler les petits bronzes qui, venus de l’Orient, eurent une influence déterminante sur l’origine des célèbres ateliers de bronze sardes ? Et les remarquables terres-cuites figurées dites «moules à gâteau», probablement de caractère votif ? Et les œufs d’Autriche finement gravés et peints.
Chez les Phéniciens, même si les arts «mineurs» l’emportent, la sculpture de plus grandes dimensions ne manque pas. De Sidon à Carthage, les statues viriles, pour la plupart de souverains et de prêtres, confirment l’influence égyptienne dans la phase ancienne, et l’influence grecque dans la phase récente. Sont à noter surtout les sarcophages, eux aussi d’abord d’inspiration égyptienne et puis grecque, qui reproduisent dans la partie supérieure les traits du défunt idéalisés et stylisés : c’est un genre d’arts qui a ses principaux centres à Sidon en Phénicie, à Carthage en Afrique, à Cadix en Ibérie. (Voir «L’orient-Le Jour» du jeudi 10 août). L’art de la sculpture, toutefois, trouve sa plus large réalisation dans les stèles, un «genre» véritable et propre, caractéristique du monde...