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Actualités - CONFERENCES ET SEMINAIRES

Réserves en or - Des possibilités de gains substantiels, sans cession des avoirs Ne rien faire coûte de l'argent à l'Etat

«Le Liban n’a pas intérêt à vendre l’or qu’il possède en réserves, car le métal jaune reste le meilleur moyen de paiement in fine et un élément essentiel de la confiance. En revanche, il a intérêt à améliorer la gestion de cet or pour se protéger contre les variations des cours mondiaux et même de le prêter pour en tirer des revenus». Lors d’une conférence, la semaine dernière, le gouverneur Riad Salamé a clairement pris position en faveur d’une modification de la loi de 1986 interdisant à la Banque du Liban de disposer de ses réserves en or. Pour des raisons politiques, le débat ne semble toutefois pas à l’ordre du jour. «Lorsque nous avons proposé de modifier la loi ce sens, en juillet dernier, nous avons été confrontés à une opposition très forte», a déclaré M. Salamé. Bombardement israélien, livre peu recherchée sur le marché des changes, incertitude politique... évoquer en cette période les réserves en or de la Banque du Liban n’est pas très bienvenu. «Ce sujet est tabou, très sensible», explique un banquier qui, bien que favorable à la vente de cet or (une position assez minoritaire au Liban), estime qu’il vaut mieux éviter d’aborder la question. Sa simple évocation il y a quelques mois avait plongé le monde politico-médiatique dans un débat passionnel inextricable. Peut-être davantage qu’ailleurs, la puissance symbolique du métal jaune est immense au Liban, particulièrement sensible dès qu’il s’agit de sécurité monétaire. Depuis la loi 34/86 adoptée en 1986, en pleine guerre, il est interdit à la Banque centrale de disposer de ses réserves en or sans l’aval du Parlement. Lors du débat budgétaire de septembre dernier, le Premier ministre Sélim Hoss est monté au créneau, devant les députés, pour défendre dans un même élan la loi sur le secret bancaire en vigueur depuis 1956 et le caractère intouchable des 9,2 millions onces d’or de la Banque centrale. Deux piliers de la confiance en l’économie libanaise. Étouffée dans l’œuf dès qu’elle a pris cette tournure politicienne, la question n’a plus été portée sur la place publique depuis. Un consensus assez large règne en fait contre la vente des réserves en or. Mais au lieu d’ouvrir la voie à des discussions sur le meilleur moyen de gérer l’or appelé à demeurer dans les caisses de l’État, ce consensus se traduit par un refus de «toucher», de quelque façon que ce soit, à ces réserves. Pourtant, il existe des possibilités financières permettant de rentabiliser le stock sans le vendre. Ces techniques qui s’offrent à la Banque du Liban méritent d’être mieux connues. Car poursuivre sur la voie de la passivité, c’est perdre de l’argent, dit-on de source autorisée. La simple conservation des lingots, stockés au Liban même et dans les coffres d’un pays dont l’identité est tenue secrète, ne coûte pas grand-chose, grâce à des accords conclus avec les banques centrales concernées. Chute des cours En revanche, il existe un coût bien plus important, car imprévisible, de l’absence de protection contre le risque spéculatif, disent les spécialistes. N’importe quel investisseur sait en effet que détenir une valeur quelconque – action, matière première, devise... –, c’est certes espérer qu’elle s’appréciera dans le temps, ce qui permettra de réaliser une plus-value, mais aussi risquer de la voir se déprécier. L’ingénierie financière a donc développé des outils pour se prémunir contre ces risques. En ne recourant à aucune de ces protections, le Liban a subi de plein fouet la chute des cours de l’or. La valeur des réserves en or de la Banque du Liban est ainsi passée de 3,9 milliards de dollars en février 1998, date du passage à la valorisation au cours du marché, à 2,56 milliards de dollars aujourd’hui. Ne pas exploiter l’or, c’est enfin se priver d’une substantielle source de revenus à un moment où l’État crie misère, ployant sous le fardeau de la dette et du déficit budgétaire. Même les pays à l’abri du besoin subissent une pression sans cesse croissante pour renforcer la rentabilité de leurs réserves, poussant certains d’entre eux à liquider purement et simplement leurs stocks d’or comme l’Australie ou l’Argentine qui ont vendu respectivement 167 et 125 tonnes d’or en 1997. Plus récemment, la Banque d’Angleterre s’est engagée dans un plan de restructuration de ses réserves impliquant la vente de 125 tonnes d’or. D’autres ont choisi de conserver cet or, dont la valeur refuge demeure largement reconnue, tout en tirant profit de leur stock. Des instruments financiers ont été spécialement développés à cet effet depuis la seconde moitié des années 1980 à la demande des exploitants de mines qui cherchaient à définir par avance un prix pour leur production future. Ce besoin a entraîné la conception de nouveaux types de contrats : le prêt de l’or détenu par les banques centrales. Placements rentables Les opérations se font auprès de banques spécialisées, à savoir les principaux groupes suisses, la Deutsche Bank et la Bank of Nova Scotia. Les plus courantes consistent en des dépôts dont la maturité moyenne est de trois à six mois. Les banques peuvent aussi effectuer des swaps de devises, de taux... L’intérêt est payé sous forme d’or ou en dollars. Quant aux dépôts, ils peuvent ou non impliquer un transfert physique de l’or auprès de la Banque d’Angleterre. En cas contraire, il est effectué sur un compte non alloué à Londres. En 1998, le secteur officiel a mis sur le marché financier 4 300 tonnes d’or sous forme de dépôts ou de swaps – aucune des transactions n’impliquant une vente – selon le consultant indépendant Gold Field Mineral Services, soit près de 400 tonnes de plus que l’année précédente. Plus des trois quarts de l’augmentation provenaient des pays industrialisés qui avaient réalisé 46% de ces opérations, contre à peine 33 % en 1995. De tels placements sans risque peuvent rapporter gros, avait déclaré en janvier dernier le gouverneur de la Banque centrale, Riad Salamé, dans une interview à L’Orient-Le Jour, sans toutefois donner de chiffres. À titre d’exemple, la Banque nationale suisse a révélé avoir obtenu un rendement de 1,9 % en 1998 en plaçant 187 tonnes d’or. L’échéance moyenne était de 4,5 mois. Si on prend le taux à un an pratiqué actuellement, soit 1,25 %, le placement de la totalité des réserves du Liban rapporterait 32 millions de dollars par an. À trois ans, avec un taux de 2 %, le revenu annuel serait d’environ 51 millions de dollars. Le calcul est simpliste, mais il donne une idée des revenus que pourraient générer les avoirs de la Banque centrale. Des recettes potentielles qui ne laissent pas indifférent le député Khalil Hraoui, par exemple. Le président de la commission des Finances explique que l’idée de rentabiliser les réserves en or du pays le séduit, mais «il existe actuellement un blocage psychologique, politique, sur la question, auquel je souscris entièrement, a-t-il déclaré. Je ne crois pas qu’on puisse changer quoi que ce soit avant l’établissement de la paix».
«Le Liban n’a pas intérêt à vendre l’or qu’il possède en réserves, car le métal jaune reste le meilleur moyen de paiement in fine et un élément essentiel de la confiance. En revanche, il a intérêt à améliorer la gestion de cet or pour se protéger contre les variations des cours mondiaux et même de le prêter pour en tirer des revenus». Lors d’une conférence, la semaine...