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Rencontre - Le dramaturge ivoirien participe aux "Ecrits nomades" à Byblos Koffi Kwahulé : s'il y a africanité, il faut la chercher ailleurs (photo)
Par SIKIAS Natacha, le 10 mai 2000 à 00h00
Koffi Kwahulé a fait ses études à l’Institut national des arts d’Abidjan, à l’École nationale supérieure des arts et techniques du théâtre de Paris – où il reçoit le premier prix de comédie moderne – et à l’Institut d’études théâtrales et cinématographiques de la Sorbonne Nouvelle (Paris III). Installé depuis 20 ans à Paris, ce comédien de formation est aujourd’hui connu surtout comme dramaturge. Il est l’auteur d’une douzaine de pièces, ainsi que de quelques nouvelles et essais, toujours sur le théâtre. L’écriture, Koffi Kwahulé y est venu d’abord par jeu, avant d’être pris par «la démangeaison d’écrire». Par ailleurs, la relation qu’on entretenait à l’écriture en Afrique lui paraissait un peu étrange, dans la mesure où les Africains écrivaient, en gros, pour les Africains. «Du coup, le théâtre africain n’avait pas voix au discours mondial sur le théâtre», dit-il. Kwahulé voulait une écriture qui ne se revendique pas forcément d’une appartenance visible. «Pour moi, s’il y a africanité, il fallait la chercher ailleurs», poursuit-il. «Mon projet était donc de démontrer qu’être Africain n’est pas une chose qui est . On devient, tous les jours, Africain». Or, très souvent, on reconnaît immédiatement les spectacles ou pièces africaines à cause de tout un ensemble d’éléments extérieurs. «J’ai trouvé que c’était dangereux, pour les Noirs en général, qu’on puisse les définir», insiste Koffi Kwahulé. «Il fallait donc créer une espèce de doute dans l’esprit des gens. Je voulais qu’en abordant une œuvre, ils se disent que c’est quelque chose qui concerne d’abord un individu, avant de concerner une communauté». Objectif atteint et pari gagné, haut la main. Le style de Koffi Kwahulé échappe à toute classification. Dans Cette vieille magie noire (1993) par exemple, il décrit brillamment l’univers de la boxe, aux États-Unis. Invité dans ce pays pour une mise en espace de cette pièce, traduite en américain, le dramaturge ivoirien est étonné de voir que tous étaient persuadés qu’il était Américain et qu’il vivait aux États-Unis, alors qu’il n’y avait jamais mis les pieds auparavant. «Ce qui m’intéresse, c’est l’effort qu’on fait sur soi-même pour dépasser son conditionnement géographique et culturel», souligne-t-il. «L’art pour moi, c’est ça. C’est échapper à une condition, à un espace, et atteindre la transcendance». Comblé par le théâtre En ce qui concerne la résidence d’écriture à Byblos et les «Écrits nomades» autour du thème des frontières, Koffi Kwahulé note qu’il avait déjà une petite idée de ce qu’il avait envie de dire. «Mais j’avais besoin de venir ici parce que, comme le Liban a une expérience particulière, j’étais persuadé que ce séjour allait m’apporter de la matière en plus. Et cela s’est confirmé». Tout ce qu’il peut dévoiler pour le moment, c’est qu’il ne va pas écrire quelque chose de réaliste. «Les histoires politiques m’ennuient énormément», dit-il. «Ce qui m’intéresse, c’est plutôt comment les gens ont vécu la guerre, quel que soit leur niveau intellectuel, en tant qu’être humain, tout simplement»… Dans la tête, Koffi Kwahulé est «un afro-européen». Il connaît mal l’Afrique, dont il n’a visité que quelques pays, et découvre aujourd’hui le Moyen-Orient, à travers le Liban. Un pays spécial pour lui, parce qu’en Côte d’Ivoire, il y a une grande communauté libanaise. «En venant ici, j’avais donc un peu l’impression de venir dans une région d’une ethnie de la Côte d’Ivoire», dit-il dans un sourire. «Et comme j’ai grandi avec des Libanais, c’est aussi l’occasion pour moi de découvrir d’où ils viennent et peut-être aussi de les comprendre mieux». Il affirme que le théâtre correspond le mieux à sa personnalité. «Je sens que le débat sur la langue, aujourd’hui, ne se joue plus dans le roman mais au théâtre et en poésie», dit-il. «Des formes littéraires peut-être moins médiatisées que les autres, mais aussi, plus exigeantes». Et de conclure : «Dans le théâtre, il y a toutes les formes littéraires. On peut faire de la poésie, de la nouvelle, du roman. Je ne vois vraiment pas pourquoi je ferais autre chose, puisque ça me comble».
Koffi Kwahulé a fait ses études à l’Institut national des arts d’Abidjan, à l’École nationale supérieure des arts et techniques du théâtre de Paris – où il reçoit le premier prix de comédie moderne – et à l’Institut d’études théâtrales et cinématographiques de la Sorbonne Nouvelle (Paris III). Installé depuis 20 ans à Paris, ce comédien de formation est...
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