Alors qu’à Berlin, le chef du gouvernement intérimaire afghan, Hamid Karzaï, essuyait un nouveau refus en ce qui concerne un commandement allemand de l’Isaf et que Ankara étudiait la question, des soldats canadiens se lançaient en Afghanistan dans une opération de fouilles dans les cavernes des montagnes d’Arma, dans l’est du pays. Cette nouvelle mission entre dans le cadre de l’opération Anaconda, lancée le 2 mars contre une poche de résistance du réseau el-Qaëda et des talibans, et qui se poursuit avec un effectif de plus d’un millier d’hommes sur le terrain, a expliqué le major Bryan Hilferty, porte-parole américain de la coalition sur la base militaire de Bagram, au nord de Kaboul. Dans ce dispositif, environ 500 soldats, en majorité canadiens et sous commandement canadien, sont engagés dans une opération spécifique de fouilles baptisée «opération Harpon», a indiqué à Bagram le lieutenant canadien Luke Charron. Les soldats canadiens ont pris le relais des troupes américaines qui constituaient jusqu’à présent l’essentiel des forces étrangères engagées dans l’opération Anaconda. L’opération Harpon a pour but «de détruire les dernières poches des talibans et du réseau el-Qaëda dans la région», a ajouté l’officier canadien. «Il s’agit d’une mission très risquée, mais nos hommes sont bien entraînés et bien préparés pour affronter toutes les situations dans cette région», a affirmé le lieutenant Charron. En ce qui concerne les troupes locales afghanes, elles continuaient hier à occuper la vallée de Shahi Kot, et des troupes d’infanterie légère étaient déployées dans cette vallée et sur la crête montagneuse appelée «la baleine» qui la surplombe, a indiqué le major Hilferty. La vallée de Shahi Kot, située à une trentaine de kilomètres de Gardez, la capitale de la province du Paktia, avait été prise mardi par les forces alliées après avoir été au centre du dispositif du réseau terroriste el-Qaëda et des talibans dans les montagnes d’Arma. Sur le terrain diplomatique, le gouvernement allemand a opposé une fin de non-recevoir aux demandes de Hamid Karzaï de prendre la tête de la Force internationale d’assistance à la sécurité en Afghanistan (Isaf), et ce en dépit des appels du pied répétés du chef du gouvernement intérimaire en visite de deux jours à Berlin,. Avec son engagement actuel dans l’Isaf, l’armée allemande, déjà très présente dans les Balkans, «arrive au bout de ses possibilités», avait déclaré le ministre allemand des Affaires étrangères, Joschka Fischer, mercredi soir, après un dîner avec M. Karzaï. L’armée allemande a envoyé à Kaboul le plus gros contingent après la Grande-Bretagne, soit 800 soldats, un chiffre qui doit être porté à 1 200 en avril. Résigné, le chef du gouvernement intérimaire afghan a simplement constaté après un entretien hier avec le chancelier allemand Gerhard Schröder que «l’Allemagne exerçait déjà le commandement opérationnel à Kaboul et était ainsi le numéro deux de l’Isaf». Et elle devrait le rester si la Turquie prenait le relais des Britanniques en avril, a-t-il ajouté. Karzaï cherchait l’engagement allemand car Londres, qui assure actuellement le commandement de l’Isaf, souhaite passer la main. Avec le désistement de Berlin, des représentants des gouvernements américain, britannique et turc ont par ailleurs négocié hier les conditions dans lesquelles Ankara pourrait prendre le commandement de l’Isaf. Selon des sources diplomatiques, la Turquie a posé certaines conditions avant d’accepter de prendre la direction des opérations de l’Isaf à compter du mois de juin. Le Premier ministre turc, Bulent Ecevit, a indiqué que la Turquie avait besoin de savoir à la fois quels pays continueront de participer à la force internationale, si le mandat de l’Isaf est étendu au-delà de Kaboul et comment sera pris en charge le volet logistique de l’opération.