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Actualités - CHRONOLOGIE

CINÉMA - Palmarès éclectique à la 27e nuit des César Triomphe modeste pour « Amélie Poulain »(photos)

Le cœur des 3025 membres de l’Académie des César a battu au même rythme que celui du public et a sacré meilleur film Le fabuleux destin d’Amélie Poulain de Jean-Pierre Jeunet lors de la 27e nuit des César à laquelle assistait pour la première fois le Premier ministre Lionel Jospin. Favori des César avec treize nominations, ce concentré de bonheur dans un ruban rouge a décroché quatre des 19 trophées français, un triomphe somme toute modeste dans un palmarès éclectique, qui a surpris par l’originalité du choix des meilleurs acteurs, Emmanuelle Devos et Michel Bouquet. Jean-Pierre Jeunet, déjà césarisé pour ses deux premiers courts métrages ainsi que pour Delicatessen, ajoute à sa collection le trophée du meilleur réalisateur pour Le fabuleux destin d’Amélie Poulain, en lice le 24 mars pour les Oscars avec cinq nominations. En revanche, Emmanuelle Devos, plus connue des cinéphiles que du grand public, rafle à Audrey Tautou, la petite Montmartroise, ainsi qu’à La pianiste Isabelle Huppert, recordwoman des nominations, le César de la meilleure actrice pour son rôle de sourdingue dans Sur mes lèvres. Le film de Jacques Audiard a obtenu deux autres trophées dont celui du meilleur scénario. À 75 ans, Michel Bouquet, qui n’avait jamais été nominé, reçoit son premier César bien mérité pour Comment j’ai tué mon père d’Anne Fontaine, un trophée que le comédien sur la scène à Lyon n’a pas pu recevoir. Le cinéma français, qui après la fabuleuse année 2001, vit toujours en état de grâce et d’euphorie grâce à Astérix et Obélix, peut se targuer d’avoir aussi produit le meilleur film étranger, Mulholland Drive de David Lynch. C’est le deuxième César pour le cinéaste américain qui présidera le jury du prochain festival de Cannes. « La République nous aime » Egalement production française, No man’s land du Bosniaque Danis Tanovic, en lice pour les Oscars, a obtenu le César de la meilleure première œuvre de fiction. Parmi les vétérans de cette grande réunion de famille, Annie Girardot et André Dussolier ont ajouté une troisième compression à leur collection de trophées. La présence de Lionel Jospin a mis une note politique dans ce défilé glamour de stars habillées haute couture. Daniel Toscan du Plantier, président de l’Académie des César, a souligné que c’était la première fois en vingt-sept ans qu’un chef de gouvernement assistait à la soirée. «Au-delà des sensibilités, a-t-il dit, une relation féconde et solide s’est nouée entre l’État et notre métier. C’est parce que la République nous aime, nous respecte et nous protège que nous pouvons rendre hommage ensemble à une fabuleuse année enfantée par les talents de nos créateurs». Frédéric Mitterrand, président de la commission d’avances sur recettes, a mis un léger bémol en évoquant l«’inquiétude» suscitée par «le mercantilisme qui menace notre cinéma». «N’oublions pas, a-t-il ajouté en évoquant Silvio Berlusconi, chef du gouvernement italien, que l’homme qui a acheté l’Italie a contribué largement à détruire ce cinéma italien que nous avons tant aimé». La grande messe du cinéma réunissait, comme l’a remarqué Nathalie Baye, présidente de la soirée, quatre générations de comédiens, d’Audrey Tautou en Chanel vaporeux à Danielle Darrieux, saluée par une standing ovation. Edouard Baer, le scribe volubile des aventures d’Astérix et Obélix, Mission Cléopâtre, a animé avec humour une scène où ont défilé Jamel Debbouze, Jean Rochefort, Stomy Bugsy, Claude Rich, Jeremy Irons, Anouk Aimée, Fanny Ardant, Sabine Azema, Juliette Binoche, Jean Reno, etc. * * * Michel Bouquet, César du meilleur acteur Michel Bouquet, couronné meilleur acteur, est l’un des artistes dramatiques français les plus réputés de sa génération. Né le 6 novembre 1925, il est apprenti pâtissier à 14 ans pour nourrir sa famille durant la guerre, puis employé de banque en 1942/43 avant de monter sur les planches. Il est l’élève de Maurice Escande puis de Béatrix Dussane de la Comédie Française avant d’entrer au Conservatoire. Il joue rapidement Albert Camus (Caligula avec Gérard Philipe), Anouilh, Molière et poursuivra ainsi une immense carrière sur scène pendant plus de soixante ans sans interruption. «Acteur d’instinct» comme il se qualifie lui-même, ses lèvres minces au sourire ambigu, son regard, sa forte présence sur scène et l’intonation de sa voix en feront un comédien inoubliable qui saura toujours s’identifier totalement à son personnage sans toutefois perdre sa propre personnalité. Peu expansif, «parce que les pensées des autres me dominent, j’ai beaucoup de mal à m’exprimer», se justifiait l’acteur en 1990 dans Le Bon plaisir qui lui était consacré sur France Culture. Ses interprétations de nombreuses pièces d’Anouilh (Le Rendez-vous de Senlis, Romeo et Jeannette, L’Alouette, Pauvre Bitos, L’Invitation au château et bien d’autres), ou encore En attendant Godot de Beckett, Le Neveu de Rameau de Diderot, Le Malade imaginaire, L’Avare, Le Maître du Go, Le Roi se meurt, Les Côtelettes de Bertrand Blier ou encore le rôle du chef d’orchestre Wilhelm Furtwangler dans la pièce à torts et à raison en 1999. Il interprétera également les grands rôles dans les pièces de Harold Pinter, de René de Obaldia et de Strindberg. Actuellement il joue Minetti de Thomas Bernhard au Théâtre des Célestins à Lyon. Au cinéma, il est dans près d’une centaine de films ce personnage inquiétant qui lui colle à la peau. On le verra dès 1947 dans Monsieur Vincent, puis ce seront régulièrement des films de Claude Chabrol, (La Route de Corinthe, La Rupture, Juste avant la nuit, Poulet au vinaigre), de François Truffaut (La Sirène du Mississipi), de nombreux polars tels que Un condé d’Yves Boisset, Deux hommes dans la ville de José Giovanni, mais aussi Les Misérables de Robert Hossein et des films d’André Cayatte. On retient encore sa diction dans les nombreux commentaires de courts métrages et documentaires où il pouvait donner libre cours à sa passion pour la peinture et la musique. * * * Emmanuelle Devos, meilleure actrice 2002 Emmanuelle Devos, sacrée meilleure actrice pour le film Sur mes lèvres, avait été nominée en 1997 pour le César du meilleur espoir féminin dans le film Comment je me suis disputé... (ma vie sexuelle) d’Arnaud Desplechin. Née en 1964, elle fait ses classes au cours Florent puis apparaît une première fois au cinéma en tenant un petit rôle dans On a volé Charlie Spencer (1986), le premier (et dernier) film de Francis Huster. Ce sera finalement Arnaud Desplechin qui la révèlera dans La vie des morts (1990), avant de lui confier un rôle plus conséquent dans La Sentinelle (1992). Elle a joué des rôles très variés, passant d’un registre à l’autre, souvent sous la direction de réalisatrices comme Noémie Lvovsky dans Dis-moi oui, dis-moi non (1990) et Oublie-moi (1994), Camille de Casabianca dans Vive nous ! (1999) et Nicole Garcia L’Adversaire (2001). Dans Sur mes lèvres, de Jacques Audiard, elle interprète Carla, une secrétaire malentendante qui tombe amoureuse d’un braqueur (Vincent Cassel). Son jeu fait dire à Audiard : «Emmanuelle est une actrice extraordinairement expressionniste, elle a un éventail incroyable et une imagination constante». Au théâtre, elle a joué sous la direction de Jean-Pierre Garnier dans Méphisto de Klaus Mann, Francis Huster dans Le Cid de Corneille et Sylvia Monfort dans Iphigénie de Racine. * * * Jean-Pierre Jeunet, meilleur réalisateur Jean-Pierre Jeunet représentera la France avec Amélie, le 24 mars dans la course aux Oscars 2002. Auteur de quatre longs métrages, Delicatessen (1991) et La Cité des enfants perdus (1995) en collaboration avec Marc Caro, Alien, la résurrection (1997) et Le fabuleux destin d’Amélie Poulain (2001), cet autodidacte voit avec quatre César pour Amélie sa créativité et sa poésie justement récompensées. Né le 3 septembre 1953 au Coteau (Loire), Jean-Pierre Jeunet, enfant de la pub, réalisateur de vidéo-clips, a reçu le César du meilleur court-métrage d’animation en 1981 avec Le Manège. De sa rencontre avec Marc Caro, dessinateur et créateur d’effets spéciaux, naît Le bunker de la dernière rafale (1981), un court-métrage qui restera six ans à l’affiche à Paris. En tandem, Jeunet et Caro écrivent des scénarios jusqu’à la réalisation du talentueux et humoristique Delicatessen, couronné par la Médaille d’Or de la compétition Jeune cinéma 1991 au Festival de Tokyo ainsi que par les César de la meilleure première œuvre et du meilleur scénario en 1992. Présenté à Cannes en sélection officielle en mai 1995, La Cité des enfants perdus, deuxième long métrage de Jeunet et Caro (César du Meilleur décor en 1996) contant le combat victorieux de gamins contre de vilains cyclopes, ne rencontre pas le succès attendu. Tourné par Jeunet, en solo, aux États-Unis, Alien, la résurrection, film de commande de la 20th Century Fox, sorti en première mondiale en France en novembre 1997, représente un challenge pour le cinéaste qui souhaite alors «faire des choses plus personnelles». Conte poétique, frais et printanier inspiré des BD de Tardi et tourné dans un Montmartre idéalisé, «Le fabuleux destin d’Amélie Poulain», non sélectionné à Cannes 2001, n’a pas cessé depuis cette date de battre des records d’entrées et de faire pleuvoir les récompenses sur Jeunet. * * * Le palmarès complet Voici le palmarès complet des 27es César du cinéma décernés samedi soir au Théâtre du Châtelet à Paris au cours d’une cérémonie présidée par Nathalie Baye, en présence du Premier ministre Lionel Jospin : - Meilleur film : Le fabuleux destin d’Amélie Poulain de Jean-Pierre Jeunet - Meilleur réalisateur : Jean-Pierre Jeunet pour Le fabuleux destin d’Amélie Poulain - Meilleure actrice : Emmanuelle Devos pour Sur mes lèvres de Jacques Audiard - Meilleur acteur : Michel Bouquet pour Comment j’ai tué mon père d’Anne Fontaine - Meilleur film étranger : Mulholland Drive de David Lynch - Meilleur acteur dans un second rôle : André Dussolier pour La chambre des officiers de François Dupeyron - Meilleure actrice dans un second rôle : Annie Girardot pour La pianiste de Michael Haneke - Meilleur scénario original ou adaptation : Jacques Audiard et Tonino Benacquista pour Sur mes lèvres - Meilleur espoir masculin : Robinson Stévenin pour Mauvais genres - Meilleur espoir féminin : Rachida Brakni pour Chaos de Coline Serreau - Meilleure première œuvre de fiction : No man’s land de Danis Tanovic - Meilleure musique : Yann Tiersen pour Le fabuleux destin d’Amélie Poulain de Jean-Pierre Jeunet - Meilleur court métrage : Au premier dimanche d’août de Florence Miailhe - Meilleurs costumes : Dominique Borg pour Le pacte des loups de Christophe Ganz - Meilleure photo : Tetsuo Nagata pour La chambre des officiers de François Dupeyron - Meilleur décor : Aline Bonetto pour Le fabuleux destin d’Amélie Poulain de Jean-Pierre Jeunet - Meilleur montage : Marie-Josèphe Yoyotte pour Le peuple migrateur de Jacques Perrin, Michel Debats et Jacques Cluzaud - Meilleur son : Marc-Antoine Beldent, Pascal Villard et Cyril Holtz pour Sur mes lèvres de Jacques Audiard. Les films les plus primés depuis la création des César Depuis la création des César en 1975 deux films (Le Dernier métro et Cyrano de Bergerac) ont été les plus primés avec dix distinctions chacun. Quatre autres œuvres (Providence, Au revoir les enfants, Tous les matins du monde, On connaît la chanson) ont reçu sept César. Le fabuleux destin d’Amélie Poulain de Jean-Pierre Jeunet a été récompensé quatre fois lors de la 27e nuit des César samedi à Paris (meilleur film, réalisateur, décor (Aline Bonetto) et musique (Yann Tiersen). Il est cependant loin des records établis par certains triomphateurs du cinéma français. Voici les films ayant reçu le plus grand nombre de César : - Le dernier métro de François Truffaut (dix Césars en 1981) : prix du meilleur film, meilleur réalisateur, acteur (Gérard Depardieu), actrice (Catherine Deneuve), scénario (François Truffaut et Suzanne Schiffman), musique (Georges Delerue), montage (Martine Barraqué-Currie), son (Michel Laurent), décors (Jean-Pierre Kohut-Svelko) et photo (Nestor Almendros) - Cyrano de Bergerac de Jean-Paul Rappeneau (dix César en 1991) : prix du meilleur film, meilleur réalisateur, acteur (Gérard Depardieu), second rôle masculin (Jacques Weber), photo (Pierre Lhomme), son (Pierre Gamet et Dominique Hennequin), décors (Ezio Frigerio), costumes (Franca Squarciapino), montage (Noëlle Boisson) et musique (Jean-Claude Petit) - Providence d’Alain Resnais (sept César en 1978) : prix du meilleur film, meilleur réalisateur, scénario (David Mercer), musique (Miklos Rosza), décors (Jacques Saulnier), montage (Albert Jurgenson) et son (René Magnol et Jacques Maumont) - Au revoir les enfants de Louis Malle» (sept César en 1988) : prix du meilleur film, meilleur réalisateur, scénario (Louis Malle), photo (Renato Berta), son (Jean-Claude Laureux et Claude Villand), décors (Willy Holt) et montage (Emmanuelle Castro) - Tous les matins du monde d’Alain Corneau (sept César en 1992) : prix du meilleur film, meilleur réalisateur, second rôle féminin (Anne Brochet), photo (Yves Angelo), son (Pierre Gamet, Gérard Lamps, Anne Le Campion et Pierre Verany), musique (Jordi Savall) et costumes (Corinne Jorry). - On connaît la chanson d’Alain Resnais (sept César en 1998) : prix du meilleur film, scénario (Agnès Jaoui et Jean-Pierre Bacri), acteur (André Dussolier), second rôle masculin (Jean-Pierre Bacri), second rôle féminin (Agnès Jaoui), montage (Hervé de Luze) et son (Pierre Lenoir et Jean-Pierre Laforce). - Vénus Beauté (Institut) de Tonie Marshall (quatre César en 2000) : prix du meilleur film, meilleur réalisateur, meilleur scénario (Tonie Marshall) et meilleur espoir féminin (Audrey Tautou). - Le goût des autres, d’Agnès Jaoui (quatre César en 2001) : prix du meilleur film, scénario (Agnès Jaoui et Jean-Pierre Bacri), second rôle masculin (Gerard Lanvin) et second rôle féminin (Anne Alvaro). - Harry, un ami qui vous veut du bien, de Dominik Moll (quatre César en 2001) : prix du meilleur réalisateur, acteur (Sergi Lopez), son (François Maurel, Gérard Lamps et Gerard Hardy) et montage (Yannick Kergoat). Les petites phrases des César - Annie Girardot, César de la meilleure actrice dans un second rôle pour La pianiste : «Je ne veux plus penser à ce que j’ai vécu il y a quelques années. Il y a longtemps que je n’avais pas tourné un si beau film. C’est le bonheur de tourner. J’ai besoin du théâtre autant que du cinéma. Je suis vivante, profitons-en». - Jeremy Irons, César d’honneur, habillé par Armani : «C’est un grand honneur d’être récompensé à Paris. J’ai demandé à Fanny Ardant d’être ma marraine. Nous venons de tourner ensemble un film sur la Callas qui sortira en septembre. L’an prochain, je voudrais remettre un César d’honneur à Fanny. J’ai reçu deux ou trois prix mais c’est le plus beau car c’est la France. Je dois remercier le public. Un film, c’est d’abord une communication avec le public. Comme une conversation, on a besoin de deux personnes. Un personnage a besoin d’une audience et quand ça marche, c’est très bien pour moi».
Le cœur des 3025 membres de l’Académie des César a battu au même rythme que celui du public et a sacré meilleur film Le fabuleux destin d’Amélie Poulain de Jean-Pierre Jeunet lors de la 27e nuit des César à laquelle assistait pour la première fois le Premier ministre Lionel Jospin. Favori des César avec treize nominations, ce concentré de bonheur dans un ruban rouge a décroché quatre des 19 trophées français, un triomphe somme toute modeste dans un palmarès éclectique, qui a surpris par l’originalité du choix des meilleurs acteurs, Emmanuelle Devos et Michel Bouquet. Jean-Pierre Jeunet, déjà césarisé pour ses deux premiers courts métrages ainsi que pour Delicatessen, ajoute à sa collection le trophée du meilleur réalisateur pour Le fabuleux destin d’Amélie Poulain, en lice le 24 mars pour les Oscars...