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Actualités - REPORTAGES

Exposition - « Art libanais » au musée Sursock jusqu’au 30 décembre - Deux collections fusionnent - pour un manifeste de la mémoire

Une première du genre. Soixante-quatre œuvres appartenant à la collection du ministère de la Culture transitent au musée Nicolas Sursock. S’affichant côte à côte avec 89 peintures et sculptures puisées dans les réserves du musée, elles déclinent une sélection d’œuvres représentatives des arts plastiques au Liban, depuis la fin du XIXe siècle jusqu’à aujourd’hui. Au total, 153 pièces portant la signature de 85 artistes vont parader sur les cimaises, jusqu’au 30 décembre. Une surprise de taille : la sculpture de Youssef Hoyeck, l’ancien «Monument aux Martyrs du 6 mai», dont la partie supérieure intégralement conservée se dresse dans l’axe de l’esplanade du musée sur un socle approprié. À voir aussi, une composition de Salwa Raouda Choucair accueillie en 1968 au VIIIe Salon d’automne. Sévèrement endommagée par les éclats d’obus durant la guerre, la sculpture a été soumise à une restauration habile qui a permis de réunifier, registre par registre, les grands emboîtements de pierre, sauvegardant le rigoureux tracé des lignes. Dans une large mesure, la manifestation concrétise ce que chaque génération a apporté aux arts plastiques du pays. Toutefois, le visiteur aura vite fait de remarquer l’absence d’un Saliba Doueihy ou d’un Moustafa Farroukh, pour ne citer qu’eux ; la rareté des paysages libanais des années 30-50 ; ou l’inexistence des courants actuels (installations, vidéo-art, art conceptuel et autres qui connaissent un grand développement au Liban). Cheville ouvrière de cette manifestation, Mme Sylvia Ajémian indique qu’«un panorama des arts plastiques au Liban eût nécessité une organisation différente, des recherches diversifiées menées aussi bien dans les ateliers d’artistes que dans les collections privées, mais aussi un espace d’accueil bien plus vaste que celui offert par le musée Sursock». Mme Ajémian ajoute que le principe retenu ici est de «mettre en présence, ou en relation, dans un espace restreint, des œuvres tirées de deux collections qui se sont formées parallèlement à quelques années d’intervalle, et qui partagent un sort commun, celui d’être rarement ou très rarement montrées au public». Pour cela, tous les coins et recoins du musée ont été réquisitionnés. Tous les espaces sont à explorer, y compris le salon arabe où trône la vieille garde : Daoud Corm, Georges Corm, Georges Cyr, César Gemayel, Youssef Hoyeck, Philippe Mourani, Omar Ounsi, Khalil Saleeby, Habib Srour et Edmond Soussa. Ils racontent une grande tradition picturale, la clarté incisive des portraits classiques et les paysages de Beyrouth. Quant aux jeunes talents, dont on a assisté à la montée au début des années 90, ils scandent, à travers une interprétation expressionniste, une humanité vulnérable à l’extrême. Plus que jamais, il leur faut exorciser le cauchemar et les séquelles d’une guerre encore présente. «Coup de feu» de Rita Awn ; «Sans titre» de Jean-Marc Nahas ; ou la sulfureuse sculpture intitulée «Silence» de Vartan Aror qui dénonce l’incarcération, mais aussi ces hommes emprisonnés dans leurs préjugés. L’art réflexe de survie apparaît comme la meilleure communication entre les hommes. Toutefois, avec le silence des canons, d’autres ont voulu oublier le cataclysme de la guerre civile. Ils déroulent leur palette en un hymne à la vie. Youssef Aoun assigne à la couleur une fondamentale fonction constructive ; tandis qu’avec ravissement Rima Amyuni fait pousser ses «Mimosas». Quoi de plus généreux ? Les secrets cheminements Toujours en piste, nos deux «naïfs» nationaux : Khalil Zghaib et Sophie Yéramian. Craquantes leurs compositions fuguées. Parmi les noms qui s’inscrivent aussi sur les cimaises, Fayçal Sultan qui rend «hommage au théâtre de Beyrouth». Cette ville qui continue à déchaîner les passions régit le dynamisme des lignes et l’écriture bondissante de Laure Ghorayeb. Mais c’est aux artistes confirmés des années 50-70 que l’exposition fait la part belle. En clin d’œil aux aînés et aux jeunes talents, plus de 50 peintres et sculpteurs investissent le deuxième niveau. Ils sont unis dans un idéal commun de créer dans la paix savourée. Leur œuvre raconte beaucoup d’histoires, et les inventions foisonnent pour reconstruire une vision de la nature et du monde. Et tout un chacun se réserve la liberté de créer la forme, de penser la couleur, l’imaginer ... soit pour privilégier le signe et l’expression gestuelle, soit pour renforcer encore l’enchantement des combinaisons d’images à l’expression spontanée et poétique. Une moisson d’œuvres, expressions des mouvements artistiques et de personnalités différentes. Les uns élaborent une œuvre expressionniste que traverse de part en part un sentiment tragique de l’existence («Oiseau et fils barbelés» de Rafic Charaf, ou «Sans titre» de Séta Manoukian ou «Les trois hommes» de Farid Aouad). D’autres encore exposent leur manifeste en faveur de la mémoire, de l’identité d’une ville, d’une nation. Rendez-vous aussi avec un art libéré de toute référence au réel et où la couleur pure jouit pleinement de ses pouvoirs expressifs. Les compositions d’Yvette Achkar, Chafic Abboud, Moussa Tiba, Krikor Agopian, Helen Khal, Hussein Madi ou Mounir Najm (liste non exhaustive) paraissent comme une improvisation sans fin d’une invention plastique inépuisable. Halte également avec les surréalistes et leur univers de rêve et de l’inconscient. L’espace d’un coin de journal ne suffirait pas pour évoquer la somme des expressions artistiques d’une floraison de talents. Les 85 peintres, graveurs et sculpteurs, ayant chacun son langage pictural pour dire ce qu’il a profondément senti et vécu. Nous laisserons leurs œuvres raconter elles-mêmes leurs secrets cheminements. Jusqu’au 30 décembre.
Une première du genre. Soixante-quatre œuvres appartenant à la collection du ministère de la Culture transitent au musée Nicolas Sursock. S’affichant côte à côte avec 89 peintures et sculptures puisées dans les réserves du musée, elles déclinent une sélection d’œuvres représentatives des arts plastiques au Liban, depuis la fin du XIXe siècle jusqu’à aujourd’hui. Au total,...