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Actualités - REPORTAGES

SÉCURITÉ ROUTIERE - Comment assurer le contrôle mécanique des « cercueils ambulants »

Le ministre de l’Intérieur, M. Élias Murr, a annoncé dernièrement qu’aurait lieu prochainement une «adjudication internationale pour la visite technique des voitures qui permettra de saisir tous les véhicules ne répondant pas aux normes de sécurité de la circulation»(1). Au fil des ans et des règlements, le Service d’immatriculation des voitures et des véhicules, communément appelé Service automobile, investi par la loi du contrôle technique des voitures, s’est dessaisi ou a été dessaisi d’une grande partie de ses attributions en ce qui concerne la visite technique des voitures de tourisme privées. Pour diverses raisons, en tête desquelles figuraient la vétusté et l’exiguïté des locaux du Service automobile, le manque de personnel, l’augmentation exponentielle du nombre de voitures, etc., les voitures neuves immatriculées pour la première fois au Liban furent dispensées de la visite technique durant les cinq premières années à dater de leur mise en circulation, l’État se contentant d’encaisser les taxes annuelles. Puis l’État se déchargea sur les banques pour encaisser les taxes annuelles (et délivrer la vignette aux automobilistes), comme il s’était déchargé précédemment sur les agents importateurs pour immatriculer les voitures et délivrer les plaques d’immatriculation, dont chaque agent avait un certain stock à sa disposition. Toutes ces mesures avaient pour but de simplifier les formalités, d’épargner aux usagers les pertes de temps occasionnées par les déplacements jusqu’aux locaux du Service automobile et de ses branches dans les mohafazats et, surtout, d’alléger la charge de travail de ce service pour ne pas avoir à le renforcer en ressources humaines et matérielles. Autrement dit, l’État a opté pour la solution de facilité. Il faut dire que l’État avait bien essayé de «canaliser», au sens propre du terme, le flux des paperasses multiples nécessaires aux formalités, en installant à grands frais dans les locaux du Service automobile à Dékouané un réseau de tuyaux pneumatiques pour la «circulation» des formalités entre les différents bureaux. Ce système de pneus n’a jamais fonctionné à cause de la réticence, pour ne pas dire la résistance des fonctionnaires, et surtout à cause de l’opposition des «démarcheurs auprès du Service automobile». En raison de l’impossibilité pour un simple mortel de s’en tirer dans le dédale des formalités au Service automobile, une véritable caste d’intervenants et d’intermédiaires s’était créée entre l’usager et l’administration, où l’anarchie triomphante régnait souverainement. Devant cette situation ubuesque où aucune formalité ne pouvait être accomplie sans l’aide de ces «deus ex machina», l’État se résigna à reconnaître officiellement l’existence de ces intermédiaires en promulguant la loi n°33/66 du 31 mai 1966 organisant la profession de démarcheur auprès du Service automobile, et l’arrêté n° 262 du 12 juillet 1966 fixant le cadre de leurs effectifs à Beyrouth et en province. *** Comme on le voit, le problème de la visite technique des voitures n’est pas né d’aujourd’hui. Le ministre Murr, dans un souci hautement louable de mettre de l’ordre dans ce domaine qui touche la sécurité de tous les usagers de la route, a projeté de le confier, par adjudication internationale, à une société spécialisée disposant de la technologie la plus avancée en matière du contrôle technique des voitures. C’est-à-dire que le projet ne verra un début d’exécution que dans une demi-douzaine d’années. Et encore ! Autrement dit, comme pour ce qui concerne les feux de signalisation, le ministre de l’Intérieur a vu trop grand et trop loin. Au lieu d’attendre des années avant que son projet donne les fruits escomptés, pourquoi M. Murr n’utiliserait-il pas les pouvoirs que lui donne la législation en vigueur, justement pour faire respecter cette législation ? En effet, l’alinéa 3 de l’article 114 du Code de la route (loi n°76/67 du 26 décembre 1967), modifié par le décret-loi no 128 du 16 septembre 1987, dispose : «Les voitures, véhicules et remorques de toutes catégories sont soumis, lorsqu’ils circulent sur les routes, à des visites mécaniques effectuées à n’importe quel moment par les fonctionnaires du service compétent, appuyés par des éléments des Forces de sécurité intérieure, en vue de s’assurer qu’ils remplissent toutes les conditions imposées». Les deux catégories de personnels requis, à savoir les fonctionnaires du Service automobile et les éléments des FSI, sont sous l’autorité du ministre de l’Intérieur, et il suffit d’un arrêté portant la seule signature du ministre pour mettre en œuvre le contrôle technique des voitures sur les routes. C’est ce qu’ont fait certains des prédécesseurs de M. Murr au ministère de l’Intérieur, et notamment M. Badri Méouchi (arrêté n°50 du 2 février 1968), «chargeant certains fonctionnaires du Service automobile de procéder au contrôle des véhicules à moteur sur les routes». Des milliers de voitures sans pare-chocs, sans feux, sans ailes, cabossées de toutes parts, parfois sans une ou deux portières, et qui sont de véritables poubelles ambulantes, ou plutôt des cercueils ambulants, circulent au vu et au su de tout le monde, pour ne pas dire au nez et à la barbe des agents des FSI, non seulement sur des routes de campagne perdues, mais surtout en pleine ville. M. Murr, qui avait déclaré que 1 000 procès-verbaux étaient établis chaque jour par les radars pour excès de vitesse, pourrait-il nous dire combien de procès-verbaux sont dressés quotidiennement par les agents des FSI pour conduite de véhicules ne répondant pas aux normes imposées ? En attendant de voir réalisés les grands rêves de perfection technique, redescendons sur terre et faisons œuvre utile et concrète avec les moyens du bord. Le nécessaire d’abord, le superflu ensuite. N’est-ce pas, Monsieur le ministre ? (1) Voir «L’Orient-Le Jour» du 14 mai 2001.
Le ministre de l’Intérieur, M. Élias Murr, a annoncé dernièrement qu’aurait lieu prochainement une «adjudication internationale pour la visite technique des voitures qui permettra de saisir tous les véhicules ne répondant pas aux normes de sécurité de la circulation»(1). Au fil des ans et des règlements, le Service d’immatriculation des voitures et des véhicules, communément...