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Actualités - CHRONOLOGIES

Recherche et avenir - « L’enfant du futur » est en marche

Dans un ouvrage paru récemment, le Pr Bernard Debré, chef du service d’urologie à Cochin (France), commente avec enthousiasme les grands bouleversements scientifiques actuels en se rejouissant de leurs progrès. Dans «La Grande Transgression», le livre en question, cet éminent homme de sciences, ancien membre du Comité national d’éthique de France, commente les manipulations génétiques actuelles comme des précieux moyens d’avancement des connaissances sans exclure même le clonage humain. Cette prise de position suscite, dans les cercles scientifiques français, de vifs débats auxquels cet homme de sciences novateur répond : «Il y a trente ans, Chris Barnard inaugurait une ère nouvelle en transplantant le cœur d’un homme en état de mort clinique, un cœur encore palpitant, pour permettre la survie d’un autre homme. Une immense transgression devenue aujourd’hui quasi banale. Il faut s’attendre à ce que l’enfant du troisième millénaire soit le fruit de la science». Pour le Pr Debré, un homme nouveau est en marche, instaurant une nouvelle approche de l’éthique médicale. Dans La Grande Transgression (Éd. Michel Lafont), le Pr Bernard Debré annonce l’avènement d’un nouvel homme : l’Homo scientificus, qui prendra la relève de son prédécesseur l’Homo sapiens. Cet être futur pour l’auteur est déjà en marche. Les inséminations intra-cytoplasmiques (implantation d’un spermatozoïde dans un ovule) sont appliquées aujourd’hui couramment. Elles ne constituent pas moins une transgression indéniable, puisqu’elles substituent, au hasard de la fécondation naturelle, l’intervention médicale. Au lieu de laisser à un seul spermatozoïde, sur plusieurs millions de candidats entourant l’ovule, la chance de la pénétrer pour former un nouvel être humain, ce qui est le cas dans une fécondation normale, on injecte directement dans l’ovule, telle une flèche, le spermatozoïde qui va la féconder. À l’heure actuelle, la science réussit déjà à féconder l’ovule avec des cellules germinales, avant même leur maturation, les spermabides ! La recherche actuelle s’oriente vers la transformation de n’importe quelle cellule du corps humain en cellule tolipolente. Autrement dit capable d’assurer la même fonction que les cellules souches (celles qui se développent dans les quatorze premiers jours de la vie embryonnaire pour former le futur être humain). Baisse de la fertilité masculine La recherche poussée en matière de fécondation est inspirée par un autre fait maintenu plus ou moins secret : la baisse de la fertilité masculine, enregistrée depuis quelques années. Les hommes des pays avancés sont de moins en moins fertiles. On incrimine la pollution, la nourriture, des facteurs génétiques, les métaux lourds mais on est toujours à la recherche de la cause... Les femmes actuelles, par ailleurs, avec la prolongation de la vie et la lutte contre la vieillesse, souhaiteraient de plus en plus avoir des enfants après l’âge de la ménopause. D’autant plus que leur éducation et leur formation bien plus poussées qu’auparavant ainsi que leur participation à la vie professionnelle active les empêchent d’enfanter durant les années de fécondité allouées par la nature aux femmes. «Il y aura de plus en plus de fécondations “in vitro”, avertit le Pr Bernard Debré, parce que les hommes des pays développés sont de moins en moins fertiles, sans qu’on connaisse encore la raison, et les femmes de plus en plus nombreuses à souhaiter avec insistance d’avoir des enfants à un âge avancé». Une autre prévision, d’ailleurs, également surprenante, serait la longévité des générations futures. D’après le Pr Debré, le nouvel homme du XXIe, quasiment inusable, pourrait vivre pour bien plus qu’un siècle. «En tout cas bien plus que cent vingt ans... Bien sûr, le cristallin se trouble dès la cinquantaine, l’aorte flanche à cent dix ans, la peau perd toute son élasticité à cent cinquante ans, estime le Pr Debré, mais les fonctions cérébrales ont la vie longue. La vitesse de conduction nerveuse ne s’altère que bien après 150 ans. Quant aux fonctions cérébrales, elles peuvent durer jusqu’à 350 ans ! Déjà on possède des produits dopant épatants, alliés précieux dans cette bataille contre la sénescence...». Des bébés parfaits Cette nouvelle manière de procréer fait que les enfants à naître sont triés sur le volet. Ceux qui auront droit à l’existence seront des bébés parfaits, dépourvus de tout handicap et, selon le Pr Debré, appelés à des missions nouvelles, capables d’améliorer les performances de ceux qui les ont devancés. Sans oublier le chromosome artificiel, fabriqué en 1997 par une équipe scientifique américaine, déjà transféré sur une souris où il a réussi à se dupliquer ! Bouleversante et effrayante découverte qui marque la plus téméraire des transgressions. On frémit en pensant aux éventuelles dérives. Mais aussi à la profondeur du fossé qui se creuse entre pays pauvres et pays avancés. Comme le souligne le Pr Debré lui-même, le laisser-faire en matière de progrès scientifique a comme contrecoup d’aggraver les inégalités entre pays riches et pays pauvres. «On pourrait bien se retrouver un jour, signale-t-il, face à une humanité divisée en deux parties : ceux végétant en Afrique, en Asie, en Amérique du Sud, selon la vieille formule d’Homo sapiens, et l’Homo scientificus triomphant dans les pays développés. Cet asservissement résultant d’un non-partage, en ce siècle de révolutions scientifiques et médicales, me paraît la plus intolérable des transgressions. Ce n’est que grâce au partage et à la solidarité qu’il subsistera dans l’homme, en un siècle de mutations inouies et de mutations radicales, une parcelle de divin».
Dans un ouvrage paru récemment, le Pr Bernard Debré, chef du service d’urologie à Cochin (France), commente avec enthousiasme les grands bouleversements scientifiques actuels en se rejouissant de leurs progrès. Dans «La Grande Transgression», le livre en question, cet éminent homme de sciences, ancien membre du Comité national d’éthique de France, commente les manipulations...