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GUIDE DES MÉTIERS - La vocation est nécessaire car le travail est parfois harassant Éducation spécialitée : une formation de quatre ans pour s'occuper des enfants handicapés
Par EL_HAGE Anne-Marie, le 20 juillet 1999 à 00h00
Il est différent des autres, et pourtant on s’y attache, on l’aime et on accepte sa différence. Qu’il soit handicapé physique ou mental, un enfant a besoin de soins, d’amour et d’éducation. Il a aussi besoin d’évoluer dans un milieu sécurisant qui l’amènera à accepter sa différence et à s’adapter le mieux possible au monde extérieur qui l’entoure. Si au Liban certains se battent pour aider les enfants handicapés à s’intégrer dans la société, le handicap physique et le retard mental sont encore des sujets tabous qui sont perçus comme honteux par une grande partie de la population. L’enfant inadapté, on le cache, on l’enferme, on a peur de le montrer. On néglige alors son éducation parce qu’on en a honte et qu’il représente un poids pour son entourage. Or cet enfant différent, mis à part l’amour et l’acceptation, c’est précisément d’éducation qu’il a besoin. Car il faut l’aider à devenir un adulte, intégré autant que possible dans la société. Et c’est là qu’intervient l’éducatrice spécialisée, au féminin, car ce métier attire au Liban beaucoup plus de femmes que d’hommes, bien qu’ouvert aux étudiants des deux sexes. Elle participe à l’éducation et au soutien d’enfants ou d’adolescents présentant des déficiences physiques ou mentales, sensorielles ou intellectuelles, comportementales ou relationnelles. Intervenant aussi bien dans les institutions spécialisées, les écoles, les hôpitaux, les prisons, que dans le cadre familial, l’éducatrice spécialisée ne travaille jamais seule, mais collabore avec une équipe de psychologues, psychiatres, médecins et éducateurs pour une prise en charge éducative, thérapeutique et sociale de l’enfant. À l’Institut libanais d’éducateurs de l’USJ, la formation est étalée sur 4 ans, au bout de laquelle est délivrée une licence en éducation spécialisée. La théorie, alternée de stages dans différents milieux ou institutions, permettra à l’étudiante de s’orienter vers la voie de son choix durant sa quatrième année d’études. «Car l’éventail est large dans le domaine de l’éducation spécialisée et les débouchés sont nombreux dans un champ encore vierge», explique Leila Dirani, directrice de l’ILE. En effet, les problèmes de l’enfance et de l’adolescence sont nombreux, qu’ils soient physiques, mentaux ou comportementaux. S’ils peuvent être de simples problèmes d’adaptation scolaire, ils consistent aussi en des handicaps plus ou moins importants comme le retard mental, l’infirmité partielle ou totale, la surdité, la cécité, l’autisme, la psychose ou autres. Chaque domaine étant différent de l’autre dans l’approche éducative et la thérapeutique. Des obstacles à dépasser L’enfance à problème, négligée par l’État libanais, n’est prise en charge que par des institutions privées, généralement rattachées à des sociétés caritatives. Et poussées par un besoin pressant d’éducatrices spécialisées, elles recrutent les étudiantes à leur sortie de l’université. Mais ces dernières exercent leur profession dans des conditions de travail souvent difficiles, assistées et parfois même dirigées par un personnel incompétent. Car bon nombre de ces institutions manquent cruellement d’effectifs qualifiés, et se voient contraintes d’embaucher du personnel pleinement disposé à encadrer les enfants handicapés, mais sans formation aucune. Ceci s’explique par le fait que la profession, n’étant pas encore reconnue officiellement dans le pays, n’est pas protégée et n’est régie par aucune norme. Et le contrôle de la qualité manque terriblement tant au niveau des compétences que de l’équipement des centres, puisque l’État n’assure que des subventions minimes et que les sociétés caritatives vivent de dons. De plus, une éducatrice spécialisée n’est pas rémunérée de manière correcte à ses débuts, malgré la demande pressante dont elle fait l’objet. Et si Leila Dirani avance le chiffre de 720 000 LL comme salaire de base d’une éducatrice spécialisée, «certaines institutions caritatives, touchées par la crise économique, limitent le salaire de départ de la licenciée à 450 000 LL», déplore Roula Najm, responsable du programme de formation des psychotiques dans une institution spécialisée réputée. «Mais les débouchés sont nombreux dans la profession et les promotions rapides, vu le besoin de gens qualifiés», ajoute-elle. «Et les personnes compétentes atteignent assez vite des postes de responsabilité». La vocation certes, mais des atouts nécessaires Mais dans cette profession où tout est don de soi, l’argent n’est pas le plus important. Car pour devenir éducateur spécialisé, il faut avant tout avoir «la vocation», remarquent les deux femmes d’expérience. «Il est nécessaire de savoir accepter et comprendre une personne différente», insiste Leila Dirani, «et d’avoir le souffle nécessaire pour l’aider dans son évolution, même si les résultats ne sont pas toujours évidents». Sachant travailler en équipe, l’éducatrice spécialisée doit de plus jouir d’une bonne santé physique et morale et avoir de l’endurance, car elle doit effectuer un travail physique parfois harassant. Comme elle doit savoir vivre la souffrance de l’autre sans en être affectée dans sa propre vie privée. Et finalement, l’éducatrice spécialisée doit posséder le bagage académique indispensable, accompagné d’une bonne capacité de raisonnement, «ce qui n’est pas toujours le cas dans la réalité», déplore Leila Dirani. S’il est vrai que l’évolution de certains handicapés n’est pas toujours évidente, «des progrès sont généralement observés, même dans les pathologie graves, et aucun enfant ne reste à l’état initial», déclare Roula Najm. «C’est une satisfaction quotidienne que nous sommes heureuses de vivre car nous assistons à son évolution et celle de sa famille», ajoute-t-elle. Un travail de titan attend les nouvelles recrues, car il y a énormément à faire dans la profession. «Venez, nous avons besoin de bras», lance Roula Najm. Car dans son combat pour l’intégration des enfants différents dans la société libanaise, elle est consciente qu’à elle seule, elle ne peut changer la mentalité de tout un pays. «Mais l’évolution se fait, constate-t-elle, même si elle est lente», même si certains parents ont encore peur de mettre leur enfant en contact avec l’enfance handicapée...
Il est différent des autres, et pourtant on s’y attache, on l’aime et on accepte sa différence. Qu’il soit handicapé physique ou mental, un enfant a besoin de soins, d’amour et d’éducation. Il a aussi besoin d’évoluer dans un milieu sécurisant qui l’amènera à accepter sa différence et à s’adapter le mieux possible au monde extérieur qui l’entoure. Si au Liban certains se battent pour aider les enfants handicapés à s’intégrer dans la société, le handicap physique et le retard mental sont encore des sujets tabous qui sont perçus comme honteux par une grande partie de la population. L’enfant inadapté, on le cache, on l’enferme, on a peur de le montrer. On néglige alors son éducation parce qu’on en a honte et qu’il représente un poids pour son entourage. Or cet enfant différent, mis à part...
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