Actualités - CHRONOLOGIE
Différences de style de vie et divergences politiques Quand les citadins redoutent l'"invasion des villageois"
le 09 juillet 1999 à 00h00
Dans les ruines du quartier albanais de Kosovska Mitrovica (nord du Kosovo) se dressent encore quelques immeubles. Après la répression serbe et les bombardements de l’Otan, les citadins kosovars redoutent à présent «l’invasion des villageois». «Nous n’appartenons pas à la même planète», dit Nita Oruji en montrant le linge pendant au balcon de ses nouveaux voisins. «Nos mentalités sont à des années-lumière», dit-elle. Pathologiste albanaise, Nita, 47 ans, voit chaque jour de nouveaux réfugiés s’installer dans son quartier. «Je suis désolée pour ces gens mais ils ne sont pas de Kosovska Mitrovica, certains viennent même d’Albanie et prennent les appartements de vieilles familles d’ici», dit-elle. Dans la rue, des Albanaises portant fichu et pantalons bouffants des campagnes contrastent avec les mini-jupes et les jeans serrés des jeunes citadines. «Les villageois nous envahissent et essaient de nous imposer leur style de vie et leur musique», proteste Alma, jeune Albanaise de 23 ans, en haussant la voix face au déferlement de musique traditionnelle albanaise venant des immeubles voisins. À Sarajevo, Zenica (Bosnie), ou Zagreb (Croatie), déjà, l’afflux de réfugiés des campagnes avait profondément changé la composition sociale de la population. Les organisations humanitaires craignent un retour massif de réfugiés albanais à Kosovska Mitrovica, divisée entre un quartier serbe très peu détruit, au nord, et un secteur albanais rasé et calciné, au sud. Mais les problèmes logistiques et humanitaires causés par le retour des réfugiés sont décuplés en raison de l’arrivée dans cette ville de nombreux Kosovars albanais des campagnes dont le village ou la maison a été détruit. Pour les rares Serbes restant dans la zone sud, l’arrivée de ces «étrangers» a également des conséquences négatives. «J’ai des voisins albanais depuis 20 ans, ils me connaissent et je n’ai jamais eu aucun problème avec eux», souligne Stana Vusic. «Mais les nouveaux venus me voient simplement comme une Serbe et une ennemie», dit-elle. Amir Resiqi, revenu au Kosovo après quatre ans d’exil en Belgique pour échapper au service militaire, dresse un constat sans équivoque. «Je ne pourrais plus vivre ici», dit-il avec un fort accent belge, «c’est le Moyen Âge». Pour l’élite albanaise, les différences de style de vie avec les réfugiés des campagnes se doublent également de divergences politiques. Ancien archéologue employé par le musée de Pristina, Fazli Ramadan espère toujours le retour du chef modéré de la Ligue démocratique du Kosovo (LDK), Ibrahim Rugova, en exil en Italie. Souvent formés à l’étranger, Fazli et ses amis professeurs, chercheurs, juristes ou médecins se disent «agacés» par le comportement des «petits chefs» locaux de l’Armée de libération du Kosovo (UCK) et considèrent le dirigeant de l’UCK Hashim Thaçi comme «un simple trafiquant sans aucune éducation». «Peut-être n’est-ce pas politiquement correct de le dire ?», murmure Fazli en souriant.
Dans les ruines du quartier albanais de Kosovska Mitrovica (nord du Kosovo) se dressent encore quelques immeubles. Après la répression serbe et les bombardements de l’Otan, les citadins kosovars redoutent à présent «l’invasion des villageois». «Nous n’appartenons pas à la même planète», dit Nita Oruji en montrant le linge pendant au balcon de ses nouveaux voisins. «Nos...
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