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FORUM LIBANAIS DES ONG - Une superstructure pour plus d'efficacité Travail social et campagnes de mobilisation
Par JALKH Jeanine, le 02 juillet 1999 à 00h00
La présence des ONG et des institutions civiles sur l’échiquier sociopolitique, et l’influence qu’elles ont acquise au fil du temps ne peuvent plus être ignorées. Ce qui surprend par contre, c’est leur nombre empressionnant, ce qui laisse parfois planer des doutes sur l’efficacité de leur action et le sérieux de leurs ambitions. Parfois même, l’on assiste à une récupération politique ou confessionnelle qui vient contredire la mission et l’objectif de départ pour lesquels elles ont été constituées. Bref, cette société civile que l’on voudrait bien sûr honorer pour les réalisations spectaculaires faites au cours des deux dernières décennies devrait sans doute opérer une sorte de grand ménage interne et surtout une réadaptation aux exigences du siècle à venir. Le Forum libanais des ONG, un regroupement de 10 associations membres, a déjà tracé le chemin. Produit de la guerre destructrice et servant les causes les plus nobles, les ONG ont aujourd’hui pris le relais pour enclencher le processus de développement et préparer le terrain pour la transition vers une société libre et démocratique. Or un tel dessein doit nécessairement s’accompagner des outils de modernité qui vont permettre cette mutation, nous explique Mme Tania Hélou, directrice exécutive du forum, constitué par 10 associations représentant les différentes catégories socio-communautaires. Neuf ans auparavant, elles avaient décidé de joindre leur efforts afin d’œuvrer, ensemble, à réaliser des programmes d’envergure nationale. Quelques années plus tard, ce forum à réussi à mettre en place une structure flexible, mais non moins opérationnelle, dont l’action s’inscrit dans le domaine social, juridique, ainsi que celui de l’éducation et de la santé. «Durant la guerre, nous explique Mme Hélou, le besoin de s’unir s’est fait ressentir vivement entre des ONG venant de différents horizons, qui s’activaient dans des créneaux aussi variés que le secours, le travail social ou encore la réhabilitation et le développement». Après des années de concertations, quelques-unes parmi ces ONG ont réussi à mettre en place une formule qui consiste à joindre leurs efforts dans le cadre d’une seule association, qui chapeaute les dix membres. Actions en faveur des femmes et des prisonniers Cette association-mère initie des programmes dont elle assure le financement et qui sont réalisés en partenariat avec des associations et institutions civiques concernées par les thèmes traités. Un véritable forum national a vu le jour. Mais pourquoi donc des associations aussi hétérogènes renonceraient-elles à une partie de leurs prérogatives pour se fondre dans une structure unifiée? «Outre l’aspect organisationnel qui est à l’origine même de ce forum , note Mme Hélou, il s’agit également d’offrir un modèle d’unité nationale qui transcende la mosaïque communautaire et confessionnelle dont a souffert le Liban pendant très longtemps». Le YMCA, Dar al-Fatwa, le Conseil communautaire grec-catholique, le Synode évangélique de Syrie et du Liban, le Conseil supérieur chiite, la Fondation druze pour l’action sociale, l’Ordre libanais des moines maronites, la Fédéraion libanaise pour l’assistance à l’enfance, etc. autant de regroupements religieux communautaires et laïques membres de ce forum qui ont réussi, à travers l’action sociale, humanitaire, à laisser de côté leurs allégeances, le temps de conscientiser, d’aider, de construire et de former. «Le dénominateur commun de ces association est le fait que leur principe de travail est areligieux, apolitique», affirme la directrice du forum. Sur le terrain, leurs projets, toujours conçus à l’échelle nationale, se font en partenariat avec les ONG du pays. Le dernier en date, le CAP ( Comité de coordination et d’action pour les prisonniers), s’est adressé à toutes les parties concernées par cette question. Également en association avec toutes les ONG féminines, le “Women’s Rights Monitor” assure un mécanisme de contrôle de l’application de la CEDAW au Liban (Convention pour l’élimination de toutes les formes de discrimination contre la femme). Cette structure traite également de toutes les questions relatives aux droits sociaux et politiques de la femme, et ce à travers une structure de coordination et d’information communiquée sur Internet à toutes les ONG concernées. Un séminaire, organisé avec la collaboration du Forum libanais, avait rassemblé il y a quelques semaines toutes les associations féminines pour les former aux outils de la communication, dans le but de mieux gérer leurs rapports avec les médias. Également par le biais des séminaires, le Forum libanais des ONG offre aux multiples organisations et institutions civiles œuvrant sur le terrain, toute la formation nécessaire pour établir les différents «rapports alternatifs» soumis aux commissions des Nations unies. Ces documents, qui doivent être rédigés selon des critères bien précis et des techniques arrêtées par les organismes internationaux, dénotent du sérieux de l’ONG concernée. Ils constituent en outre de véritables outils de pression pour informer ou dénoncer la situation sociopolitique qui prévaut dans le pays. Ils donnent par conséquent une dimension internationale à l’action entreprise par les ONG concernées. Outre les droits des femmes et des prisonniers, d’autres catégories dites vulnérables sont également visées par l’action du forum. Les enfants bien sûr, pour lesquels un nouveau programme informatisé sera prochainement mis en place, mais aussi les déplacés, réfugiés, apatrides, sans-documents, bref tous les groupes sociaux fragilisés, en l’absence d’un système juridique global et équitable qui assure leur protection et garantit leurs droits. Concours de 100 avocats En l’absence d’un tel système, le Forum libanais des ONG s’est doté d’une Commission d’aide juridictionnelle qui œuvre conjointement avec l’Ordre des avocats. Cette commission regroupe 100 avocats qui travaillent pro bono et peut être saisie pour tous les cas civils et pénaux dans les milieux de groupement déshérités. Cette commission détient également des statistiques relatives aux questions juridiques qui seront bientôt diffusées sur Internet. Suppléant au manque qui normalement aurait dû être comblé par le ministère de la Justice, la Commission d’aide juridictionnelle œuvre selon le fameux principe du «droit de tous à l’accès à la justice». Toujours dans le cadre juridique, un véritable programme «d’éducation populaire aux notions de justice» a été mis en place par cette commission. Le projet consiste en une campagne nationale menée par plusieurs avocats qui sillonnent les villages des déplacés dans une tentative d’information et de conscientisation des habitants sur leurs droits. «L’idée est d’informer les gens sur les notions juridiques de base et de réhabiliter une mentalité d’État de droit», relève Tania Hélou. En tout cas, c’est un exemple de rationalité, de modernité et de professionnalisme que nous offre le Forum libanais des ONG. Un “Web-page” sur Internet qui présente les différentes facettes de cette organisation, des programmes spécialisés qui s’érigent en véritable réseau connectant les ONG au niveau national, une base de données sophistiquées, une source de documentation dans tous les domaines socio-juridiques, tout cela combiné à un travail de longue haleine et une forte persévérance, voilà de quoi nourrir un succès permanent. Autre élément qui a parachevé l’édification de ce forum, c’est «l’esprit démocratique qui prévaut au sein du regroupement», commente Mme Hélou. L’objectif initial pour lequel œuvre le forum, à savoir la cohésion nationale à travers un travail humanitaire et social ainsi qu’un échange fructueux de know-how en matière d’ONG, dépasse toute autre considération d’intérêt communautaire ou politique. Une véritable symbiose qui a pour seule cible l’Homme dans toute sa dignité. Mais aussi, une communauté d’hommes et de femmes qui ont décidé de contribuer au développement d’un État de droit, en se transformant en un véritable groupe de pression qui vient rappeler à nos gouvernants, par les moyens les plus sophistiqués, que le potentiel démocratique et humain du Liban ne fera que s’affermir. Une formule de réussite qui ne demande qu’à être dupliquée. Intéressés, branchez-vous sur : www.lnf@org.lb
La présence des ONG et des institutions civiles sur l’échiquier sociopolitique, et l’influence qu’elles ont acquise au fil du temps ne peuvent plus être ignorées. Ce qui surprend par contre, c’est leur nombre empressionnant, ce qui laisse parfois planer des doutes sur l’efficacité de leur action et le sérieux de leurs ambitions. Parfois même, l’on assiste à une récupération...
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