Actualités - CHRONOLOGIE
Le nettoyage ethnique dans les Balkans, un fléau attisé par la mosaïque des peuples
le 23 avril 1999 à 00h00
Les signes d’une reprise à grande échelle dans les Balkans de la politique d’épuration ethnique se multiplient depuis le début de l’opération «Force alliée», le 24 mars, rappelant les pires moments des conflits dont l’ex-Yougoslavie a été le théâtre depuis 1991. Le Haut commissaire de l’Onu aux réfugiés, Mme Sadako Ogata, a ainsi demandé mardi «un arrêt immédiat du nettoyage ethnique». De son côté, Louise Arbour, procureur du Tribunal pénal international (TPI), créé en 1993 après la publication des premiers rapports de l’Onu sur les massacres en Bosnie, a demandé avec insistance la semaine dernière à l’Otan de l’aider dans ses enquêtes sur les crimes présumés des forces serbes au Kosovo. La Grande-Bretagne a d’ailleurs commencé à transmettre au TPI un dossier précis sur les massacres et viols attribués à la police et à l’armée serbes avant et après le début des bombardements de l’Otan. Enfin, l’Otan a indiqué il y a quelques jours disposer de clichés de 43 sites au Kosovo, qui pourraient être des charniers. De juin 1991 à novembre 1995, la politique d’épuration, destinée à éliminer une catégorie ethnique d’un territoire par tous les moyens, a provoqué la mort de 263 000 personnes, selon le département d’État, et fait plus de trois millions de réfugiés et déplacés, selon le Haut commissariat pour les réfugiés de l’Onu (HCR). En faisant jouer dès avril 1987 la fibre nationaliste à propos du Kosovo, considéré par les Serbes comme leur berceau bien que peuplé à 90% d’Albanais, Slobodan Milosevic est à l’origine de ce dangereux concept. «Personne ne devra plus oser vous battre!», leur avait-il lancé à Kosovo Polje où les troupes ottomanes vainquirent les Serbes en 1389. Mise en œuvre dès l’été 1991 par l’armée fédérale yougoslave en Croatie, région où résidait une forte minorité serbe opposée à son indépendance, la politique d’épuration ethnique allait être systématiquement appliquée par les Serbes pendant trois ans et demi en Bosnie et s’est parfois retournée contre eux. Elle fit des émules parmi les Croates qui, à partir de 1993 et pendant plus d’un an, la mirent en pratique en Bosnie centrale contre les musulmans, puis à l’été 1995, lors de la reconquête de la Krajina, territoire croate sous contrôle des sécessionnistes serbes, que plus de 175 000 Serbes furent contraints d’abandonner lors du plus important exode depuis le début du conflit. Voici quelques-unes des étapes qui ont émaillé cette politique de terreur depuis 1991: — VUKOVAR: Symbole de la résistance et du martyre croates, la plus grande ville de Slavonie orientale tombe après trois mois de siège le 18 novembre 1991 aux mains de l’armée fédérale ex-yougoslave (JNA) et des séparatistes serbes. Près de 3 000 personnes y ont été tuées et 1 300 sont portées disparues. Le lendemain de la chute, 200 des 260 personnes, évacuées de l’hôpital municipal, seront exécutées non loin de Vukovar et leurs corps ensevelis sur le site d’Ovcara. — OMARSKA: Camp de prisonniers musulmans établi après la chute, le 30 avril 1992, de Prijedor, ville du nord de la Bosnie où a débuté la première grande vague de «nettoyage ethnique». Au lendemain de la chute de cette localité, les hommes sont envoyés dans deux camps, dont celui d’Omarska, où ils sont soumis à des privations d’eau, des tortures, voire même exécutés sommairement. — SARAJEVO: Commencé le 5 avril 1992, le siège de la capitale bosniaque (environ 10 000 morts), va durer quatre ans pendant lesquels les habitants, en grande majorité musulmans, vivront sous la menace des obus et des tireurs embusqués, privés d’électricité et de chauffage, et grâce à un pont aérien humanitaire. — MOSTAR: En mai 1993, Croates et musulmans mettent fin à l’alliance qui leur avait permis de repousser l’année précédente les attaques des Serbes contre cette ville. La destruction du Stari Most (Vieux pont) sur la Neretva, un des joyaux de l’architecture ottomane dans les Balkans, par les forces croates de Bosnie en novembre 1993 symbolise la division de Mostar entre le secteur est, où 30 000 musulmans subsistent dans une zone détruite à 80%, et l’ouest où vivent 40 000 Croates. —SREBRENICA: La prise de l’enclave musulmane de Bosnie orientale par les Serbes bosniaques le 11 juillet 1995, après trois ans de calvaire, va être suivie pendant plusieurs semaines d’un des épisodes les plus tragiques de la guerre. Les hommes en âge de combattre seront séparés du reste de la population qui fuit l’enclave et exécutés par groupes avant d’être jetés dans des fosses communes. Les femmes et les enfants seront déportés en zone bosniaque musulmane. Selon l’Onu, 5 à 8 000 hommes sont toujours portés disparus tandis que les autorités bosniaques avancent le chiffre de 10 300 morts.
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