Actualités - CHRONOLOGIE
Société - Escroquerie sous l'oeil indulgent de la police Loterie de rue à Saint-Pétersbourg
le 20 avril 1999 à 00h00
Ils surprennent les gens près des stations de métro, des centres commerciaux ou même des palais impériaux : chaque jour, les organisateurs de certaines loteries de rue trompent des centaines de Petersbourgeois crédules avec le même scénario grossier, sous le regard indulgent de la police. «Dans notre pays, tout le monde veut s’enrichir sans rien faire», se justifie Igor, 27 ans, propriétaire d’une loterie près du grand centre commercial Gostini Dvor sur la perspective Nevski, la rue principale de Saint-Pétersbourg. «Depuis deux ans, j’attends que ce torrent d’imbéciles s’épuise mais non, ils continuent de venir...», confie-t-il. L’escroquerie est simple et ne nécessite que trois à cinq personnes dotées de bons talents d’acteurs. Un comparse interpelle un passant – choisi selon des critères éprouvés – et lui demande de venir tirer un billet de loterie. Le billet coloré s’avère évidemment gagnant. Les figurants applaudissent et la «victime» s’imagine déjà remporter l’un des magnétophones ou télévisions exposés à côté de la petite table où s’organise le jeu. C’est alors que l’organisateur explique qu’il y a un autre gagnant (dans la combine), et propose une vente aux enchères américaines pour départager les vainqueurs. La règle du jeu veut que l’argent déposé dans le panier aux enchères ne soit pas récupéré. Sous les encouragements des figurants, la victime sort toutes ses richesses, forcément inférieures à celles de l’autre gagnant... et perd. À chaque fois Tatiana, 57 ans, a ainsi perdu 200 roubles (8 dollars environ), une grosse somme pour elle: «Tout était si naturel, le jeune homme qui a gagné en même temps que moi se plaignait de n’avoir pas assez d’argent, il avait l’air tellement sincère, j’étais sûre de gagner». Sottise et avidité «Heureusement, j’ai compris assez vite la combine et j’ai expliqué que je n’avais plus d’argent», poursuit-elle. «Alors ils ont proposé de m’accompagner en voiture à la maison pour que je puisse y prendre des roubles, mais j’ai catégoriquement refusé». Selon Igor, il n’est pas rare que les «pigeons» acceptent d’aller jusqu’à chez eux chercher de l’argent, et que le jeu entraîne pour eux de très grosses pertes, à l’échelle des salaires russes. «Chacun gagne sa vie à sa manière», se justifie-t-il. «Je ne suis pas responsable de la sottise et de l’avidité des gens», poursuit le jeune homme expliquant qu’en cas de problèmes, il se tient prêt à décamper. Ses clients préférés sont les femmes de 50-60 ans, parce que ce sont «les plus crédules». Grâce à elles, ses revenus atteignent jusqu’à 600 roubles (25 dollars) par jour, soit un salaire mensuel moyen à Saint-Pétersbourg. «J’ai toujours été tellement prudente, mais l’espoir de gagner a été plus fort», confesse Antonina, 57 ans, une autre victime. La police connaît ces pratiques, mais prouver l’escroquerie est compliquée. «Personne ne force ces gens à jouer», assure un policier, observant de loin le petit manège. «Les organisateurs de loterie payent la police... tout le monde le sait mais refuse d’en parler», assure un autre policier, Alexandre Salamonov. Pour le sociologue Anton Astapov, «le désir permanent d’obtenir des choses gratuitement» joue un rôle important dans la crédulité des victimes. Les gens âgés, qui avaient l’habitude de recevoir gratuitement sous le régime soviétique leur appartement, leur datcha à la campagne ou leurs vacances sur la mer Noire, sont les cibles privilégiées de ce genre d’escrocs, assure cet universitaire. Pour le jeune Igor, ce public-là sera toujours une source de revenus garantis: «Moi, je suis tranquille pour mon avenir, je gagnerai toujours ma vie en Russie», dit-il en souriant.
Ils surprennent les gens près des stations de métro, des centres commerciaux ou même des palais impériaux : chaque jour, les organisateurs de certaines loteries de rue trompent des centaines de Petersbourgeois crédules avec le même scénario grossier, sous le regard indulgent de la police. «Dans notre pays, tout le monde veut s’enrichir sans rien faire», se justifie Igor, 27 ans,...
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