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Actualités - CHRONOLOGIE

Satellites de pointe US contre agents infiltrés européens Bataille du renseignement au sein de l'Alliance

Les membres de l’Otan se livrent une sourde bataille dans le domaine du renseignement sur fond de guerre menée de manière apparemment unie depuis le 24 mars à la Yougoslavie, selon des diplomates. «À l’Otan, la communauté de renseignement se limite à deux pays», lance, ironique et sous couvert d’anonymat, un diplomate européen de haut rang au siège de l’Alliance, en visant implicitement les relations privilégiées entretenues de longue date entre les États-Unis et la Grande-Bretagne. Le ton est donné. Manifestement, le domaine très sensible du renseignement n’est ni un sujet d’union ni de vaste partage. Entre les 19 membres de l’Otan, très différents, cette bataille du secret apparaît cependant relativement naturelle, surtout en période de guerre. Le choix des cibles en Yougoslavie en est un exemple. Ce sont des «catégories» qui ont été définies par les alliés et non des cibles précises, a expliqué le porte-parole de l’Alliance Jamie Shea. En situation de guerre, un choix trop précis ferait peser le risque d’en avertir Belgrade, estiment des diplomates, en rappelant, incidemment, les relations spécifiques entre la Serbie et la Grèce, membre de l’Alliance. Pendant le conflit livré en 1991 à l’Irak par une coalition alliée dirigée par les États-Unis, les Européens s’étaient souvent plaints d’être «sourds et aveugles». À l’époque, ils dépendaient quasi exclusivement des informations américaines, données souvent avec parcimonie, sur la réalité des dommages infligés à l’ennemi et sur ses mouvements. Depuis, ces mêmes Européens se sont dotés d’un satellite d’observation militaire, baptisé Hélios et appartenant à la France, l’Espagne et l’Italie. Cet engin ne leur permet cependant pas de lutter à armes égales avec les États-Unis. Équipée en Espagne d’un centre d’interprétation satellitaire unique au monde, l’Union de l’Europe occidentale (UEO) fournit depuis plusieurs mois et régulièrement à l’Otan des «dossiers» de renseignement sur le Kosovo, comprenant chacun un nombre variable d’objectifs. À la différence de la guerre du Golfe, les Européens disposent désormais d’une certaine autonomie d’appréciation de l’évolution de la situation par rapport aux États-Unis, estime-t-on aujourd’hui à l’UEO. «À l’Otan, la transparence des informations sensibles n’existe pas», selon des diplomates. À titre d’exemple, l’un d’entre eux signale que les États-Unis «ont fait un pointage très précis des villages brûlés au Kosovo, un peu comme un collectionneur de timbres» mais qu’ils n’ont donné leur album qu’à «un seul» pays sur les 19 membres de l’Alliance. «Le monde du renseignement est un monde à part et les échanges ne se font pas», a déploré ce diplomate. La publication des informations, à Bruxelles ou à Washington, s’en ressent. «Nous n’avons pas l’équivalent à l’Otan des cartes diffusées» dans la capitale américaine, précise-t-il. Dans le monde du renseignement, «on ne peut recevoir de l’information que si l’on en donne», indique sous couvert d’anonymat un spécialiste du renseignement. «Il s’agit le plus souvent de troc», ajoute-t-il, du genre : «Je te donne cela, mais tu me donnes cela». Face à l’impressionnant réseau satellitaire des États-Unis qui fournissent par ailleurs les deux tiers des avions alliés, les Européens font pâle figure avec leur satellite Hélios unique. À la différence des Américains, ils disposent cependant d’une réelle capacité en matière de «renseignement humain», c’est-à-dire liée à l’information recueillie au sol par des hommes, infiltrés au besoin derrière les lignes ennemies. Dans ce domaine, les Britanniques et les Français ont meilleure réputation que les Américains. Au début de la guerre contre la Yougoslavie, l’annonce de la fausse mort de Fehmi Agani, conseiller d’Ibrahim Rugova, en a été la preuve. L’information est venue des militaires américains et aussitôt démentie à Paris et à Bonn.
Les membres de l’Otan se livrent une sourde bataille dans le domaine du renseignement sur fond de guerre menée de manière apparemment unie depuis le 24 mars à la Yougoslavie, selon des diplomates. «À l’Otan, la communauté de renseignement se limite à deux pays», lance, ironique et sous couvert d’anonymat, un diplomate européen de haut rang au siège de l’Alliance, en visant...