Rechercher
Rechercher

Actualités - CHRONOLOGIE

Poésie - "You'ammer al-ward", d'Amthal Ismaïl Le capiteux parfum des roses et des mots(photo)

C’est quoi la poésie ? Un état où l’être se fond à l’univers, l’amour immodéré des mots, les délices et les tourmentes de l’introspection, le désir de connaître les autres et le monde, le pouvoir de l’imagination et de l’imaginaire, le plaisir de capturer les images et les sons au bout d’un vers ou d’une rime, la volonté de chasser l’angoisse à coup de rêve et d’apprivoiser l’invisible et le non-dit ? C’est peut-être tout cela à la fois mais c’est aussi une manière d’être, une sensibilité indomptée, une soif d’allier le rythme et l’inspiration d’une plume aux sensations et aux impressions d’une vie, d’un instant fugace mais inoubliable... Et puis il y a le démon (ou l’ange, comment le savoir ?) de l’écriture... Amthal Ismaïl est de ceux qui n’ont pu échapper à cette fatalité de l’appel du Parnasse. S’il n’a jamais cessé de taquiner la Muse, celle-ci le lui rend bien. Parcours assez long et austère, calmement ponctué de trois recueils de poésie où la langue arabe a toutes les diaprures et tous les miroitements; et toute la rigueur d’une expression à la fois altière et libérée. À vingt-trois ans, il publiait Toi...et moi traversant les couleurs. Quelques années plus tard, il révélait (incorrigible romantique !) que Vêtu du vide, il est heureux d’être triste. Aujourd’hui, c’est-à-dire plus de dix ans plus tard, loin des premiers élans de la jeunesse mais avec un immuable romantisme, il publie un recueil (dédié à ses enfants) joliment édité (Dar al-Nachr al-Arabi) au graphisme soigné, déclarant avec beaucoup d’aplomb que Longtemps vivent les roses... (You’ammer al-ward..) 328 pages. Bien sûr qu’elles ne vivent pas longtemps les roses ! Elles, si fragiles, et Ronsard est là pour nous le rappeler. Éphémères, comme toutes choses sous le soleil, les roses demeurent toutefois éternelles dans leur éclatant symbolisme d’amour, de passion, de désir, de jeunesse et de beauté... Homme de culture approchant la quarantaine, Amthal Ismaïl est un humaniste qui traverse la vie avec l’espoir au cœur et l’angoisse au bout de la plume. Angoisse de saisir le sens de la vie, sa plénitude et la profondeur insondable de l’amour. Et de les exprimer dans leurs nuances, leur fuyante réalité, leur absolue modernité. Selon une prosodie à la fois classique et libre, avec un esprit rebelle à toutes conventions desséchées et desséchantes, ce poète au verbe sonore, châtié et riche, se raconte avec de belles échappées certes bien trop fleuries et emphatiques mais où l’impudeur et la grandiloquence sont comme une violette pour mieux se dénuder... De ses nombreux et constants voyages entre Beyrouth, Amman, Madrid et Séoul, ce poète aux semelles du vent, chantre de l’érotisme et du corps de la femme, engrange images et art de vivre qu’il dit en termes d’une poésie à la musicalité douce ou stridente, de toute façon savamment dosée et dextrement orchestrée. Aventurier de la langue, ce poète au lyrisme enflammé allie dans son écriture violence et transparence et ne craint pas de confesser, avec une déroutante candeur, en ces temps de féroces compétitions professionnelles : «Non seulement j’attends que la poésie me purifie mais je me réfugie en elle pour mieux revenir à moi-même». Quête de soi à travers les éléments de la nature et les êtres qui nous entourent, préoccupations d’amours (dissolvantes !) et états contemplatifs, voilà les nerfs moteurs de ce recueil où le verbe, par-delà toute méditation ou sensualité, touche profondément et dans le vif au langage et à ses artifices. Sans titre, laissant toute liberté aux rêves et aux fantasmes, ses poèmes se répandent en un bouquet odoriférant où l’association des mots, en dépit parfois de leur hermétisme, reste une source d’images et de sons charriant mélancolie, chagrin, douleurs, éblouissements de la chair, euphorie, exaltation ou félicité. Bref, une désarmante sincérité dans le propos qui fait découvrir les élans de l’âme et les audaces du corps et tout cela en dépoussiérant les mots ou en les drapant du capiteux parfum des roses.
C’est quoi la poésie ? Un état où l’être se fond à l’univers, l’amour immodéré des mots, les délices et les tourmentes de l’introspection, le désir de connaître les autres et le monde, le pouvoir de l’imagination et de l’imaginaire, le plaisir de capturer les images et les sons au bout d’un vers ou d’une rime, la volonté de chasser l’angoisse à coup de rêve et...