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La Cité médicale al-Hussein : pèlerinage au coeur du drame (photo)
Par N. G., le 08 février 1999 à 00h00
Samedi soir, la Cité médicale al-Hussein. À l’intérieur, le roi agonise encore. Dehors, une foule en pleurs attend. Étrange paradoxe pour ces femmes et ces hommes qui ne sont pas dupes des indications laconiques du gouvernement, qui savent pertinemment que leur roi bien-aimé ne reprendra plus jamais les rênes du pouvoir, mais qui continuent envers et contre tout à prier pour sa guérison. Quelques heures avant le décès du roi, le trajet menant à la Cité médicale avait pris des allures de pèlerinage. Des barrages de la police bouclaient les principaux carrefours menant à l’hôpital, obligeant les automobilistes à garer leurs véhicules à une distance de près de deux kilomètres et de poursuivre à pied. Une mesure qui n’a pas découragé enfants, jeunes et vieillards venus sous la pluie et par un froid glacial prier pour ce souverain devenu, en 46 ans de règne, indissociable de la Jordanie. Face à l’entrée de l’hôpital, surmontée d’un portrait géant du roi, le terre-plein est noir de monde. On y prie avec une intense ferveur. Puis un cri fuse, et le recueillement se transforme en hystérie collective. Certains sont prêts à faire don de leurs organes en échange de la guérison de leur roi. Photo du souverain en main ou épinglée sur leur poitrine, des bédouins se frappent la tête avec l’énergie du désespoir. À côté, une femme voilée s’évanouit et doit être soutenue par des proches. Plus loin, des jeunes filles participent à une émouvante procession, cierges allumés en main. Derrière elles, une jeune chrétienne prie en silence avec son chapelet. À ce stade, personne ne veut parler de succession ou même de stabilité politique. Pour eux, seuls comptaient la fin du cauchemar et le retour du roi. La détresse de Noor Soudain, une clameur monte, s’amplifie, se propage. Noor, l’épouse du roi, sort de l’hôpital et vient à la rencontre de la foule. Grand moment d’émotion au cours duquel la détresse d’une reine croise le désespoir de son peuple. C’est sa première apparition publique depuis le retour en catastrophe des États-Unis. Elle est aussitôt happée par des dizaines de mains, bousculée, sollicitée par ces gens qui crient leur loyauté envers leur monarque et veulent s’accrocher à la moindre information. Mais la reine, accompagnée de deux de ses enfants, n’a plus grand-chose à dire et c’est en larmes qu’elle parvient à peine à prodiguer des remerciements, glisser quelques mots de réconfort. Puis, c’est le ballet des voitures officielles. Ministres, députés, hauts fonctionnaires et officiers de l’armée viennent à leur tour s’enquérir de la santé du roi. Ils se frayent un passage difficile au milieu de la foule, mais savent à l’avance qu’à l’intérieur, ils n’auront droit qu’à la formule devenue classique : «État stationnaire». Pour comprendre l’intensité émotionnelle de ces gens, il suffit de savoir que plus de 80 pour cent des Jordaniens n’ont pas connu d’autre roi que Hussein. Pour eux, il est celui qui les a menés à travers les multiples écueils du conflit du Proche-Orient, qui a donné des institutions à ce pays créé de toutes pièces après la déroute du Chérif Hussein, aïeul du souverain actuel. La nuit tombe. Vaincue par la fatigue et le froid, la foule se disperse. Seuls quelques irréductibles entendent passer la nuit à même le sol, sur ce terre-plein devenu boueux. À l’intérieur de la Cité médicale, véritable cœur du drame jordanien, Hussein livrait son dernier combat.
Samedi soir, la Cité médicale al-Hussein. À l’intérieur, le roi agonise encore. Dehors, une foule en pleurs attend. Étrange paradoxe pour ces femmes et ces hommes qui ne sont pas dupes des indications laconiques du gouvernement, qui savent pertinemment que leur roi bien-aimé ne reprendra plus jamais les rênes du pouvoir, mais qui continuent envers et contre tout à prier pour sa guérison. Quelques heures avant le décès du roi, le trajet menant à la Cité médicale avait pris des allures de pèlerinage. Des barrages de la police bouclaient les principaux carrefours menant à l’hôpital, obligeant les automobilistes à garer leurs véhicules à une distance de près de deux kilomètres et de poursuivre à pied. Une mesure qui n’a pas découragé enfants, jeunes et vieillards venus sous la pluie et par un froid glacial...
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