Actualités - REPORTAGE
Correspondances baudelairiennes Marie-Thérèse Kheir-Badawi : psychanalyse de l'art .. (photo)
Par ZALZAL Zéna, le 11 avril 1998 à 00h00
Psychanalyste, connue pour ses travaux sur les problèmes des femmes en Orient, notamment sur la sexualité féminine au Liban, Marie-Thérèse Kheir- Badawi a longtemps hésité entre peinture et psychanalyse. Depuis son jeune âge, elle se destinait à l’art. Elle a fait du piano, a appartenu à une chorale, a peint et travaillé la terre glaise... Et a même obtenu un diplôme de Beaux-Arts. Fascinée par la création et par le sens caché des choses, elle se retrouve au moment du choix professionnel irrésistiblement attirée par la psychologie et la psychanalyse. Ce parcours la fera réfléchir plus tard sur la corrélation entre la psychanalyse et l’art. Parallélisme que Marie-Thérèse Kheir- Badawi explique par la fascination pour l’inconscient que l’on retrouve autant chez l’artiste que chez le psychanalyste. «Dans la pratique aussi, dans les deux domaines, il y a un rapport très étroit à l’inconscient», dit-elle. «Quand l’analyste donne une interprétation à l’analysant, il met à jour un contenu inconscient jusque-là ignoré par son patient. De la même manière, l’œuvre de l’artiste est une lumière nouvelle sur sa vie psychique intérieure. Comme l’interprétation est le produit du travail analytique, l’œuvre de l’artiste est le produit de son inconscient». Selon la lecture psychanalytique du processus de création «La production artistique est déclenchée par la fascination. L’artiste (le créatif) est sidéré par une personne, une idée, un objet... Cette sidération renvoie à un contenu psychique inconscient qu’il porte en lui. Dès lors, l’artiste saisit un code déterminé dans le représentant psychique qu’il a en tête et il trouve le matériau qu’il faut pour l’exprimer. Ce matériau, qui est le cheminement de l’inconscient vers le conscient, peut être pictural, littéraire, musical, théâtral... Au moment où il concrétise sa sidération, où il met en œuvre tout ce qu’il sent, il a en tête la représentation du public. Mais ce n’est qu’à la fin du parcours de création qu’aura véritablement lieu la confrontation avec le public». Approche Freud disait que le rêve est la voie royale de l’inconscient. Marie-Thérèse Kheir-Badawi ajoute pour sa part que «l’œuvre d’art est aussi une voie royale de l’inconscient. Elle reflète, d’une part, le contenu psychique de l’artiste. Et d’autre part, si le spectateur, face à une peinture, une sculpture, un texte, un spectacle, une image, est ému, ou s’il ne l’est pas c’est parce qu’il y a-ou non - une communion, une concordance d’inconscient à inconscient ». Amatrice d’art, Marie-Thérèse Kheir-Badawi affirme que son premier contact à une œuvre est émotionnel. Sa formation lui permet cependant de lire, de comprendre et de décortiquer cette œuvre. Car dit-elle «La psychanalyse n’est pas un lorgnon que l’on met pour lire et qu’on enlève pour se promener». C’est une éducation qui vous donne une autre manière de voir et d’envisager le monde. « Lorsqu’on a fait passer les toiles de Gustav Klimt à l’ultrason, on a découvert que sous les lourdes robes aux mille coloris et ajouts dont il parait ses personnages féminins, le peintre dessinait avec une grande précision le corps nu. Je ne connais pas la vie de Klimt, mais pour la psychanalyste que je suis il y aurait là un indice sur un quelconque problème vis-à-vis de la nudité féminine». De Michel-Ange à Dali en passant par les impressionnistes, les goûts de Marie-Thérèse Kheir-Badawi sont aussi variés qu’ éclectiques. Pour elle, les correspondances entre Baudelaire et Dali sont évidentes. «On peut rapprocher les délires littéraires de l’un du surréalisme pictural de l’autre. Dans un autre registre, les impressionnistes, la douceur de vivre, la joie qui éclate dans leurs toiles me font penser à la musique de Mozart». «La culture peut profiter de l’analyse» estime Marie-Thérèse Kheir-Badawi. La polémique en ce domaine veut réduire la psychanalyse à une pratique thérapeutique et ne pas l’étendre à la lecture des phénomènes sociaux, culturels ou même politiques. «Tous les mouvements socio-culturels trouvent leurs racines dans des phénomènes inconscients», soutient-elle. «D’ailleurs, le fondateur de la psychanalyse, Freud lui-même, ne s’est pas limité à l’exercice thérapeutique du divan. Il a fait une analyse de la religion, de figures et d’œuvres d’art et de littérature: Gœthe, Léonard de Vinci... ». Un parti pris d’application de l’analyse aux mouvements d’idées comme au quotidien qui n’est pas sans rappeler que la psychanalyse a pris corps dans une Vienne en pleine effervescence culturelle...
Psychanalyste, connue pour ses travaux sur les problèmes des femmes en Orient, notamment sur la sexualité féminine au Liban, Marie-Thérèse Kheir- Badawi a longtemps hésité entre peinture et psychanalyse. Depuis son jeune âge, elle se destinait à l’art. Elle a fait du piano, a appartenu à une chorale, a peint et travaillé la terre glaise... Et a même obtenu un diplôme de...
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