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Actualités - OPINION

Regard - Cinq beaux livres complémentaires sur Beyrouth (et le Liban) Visite guidée (II)

Une nuit la semaine dernière, une jeune femme a donné naissance par césarienne à un petit garçon dans un hôpital de Bagdad. Une demi-heure plus tard, les bombes ont commencé à s’abattre sur la ville. Dès que les raids ont cessé, la femme a pris son enfant et est rentrée chez elle. Les médecins de la cité médicale Saddam, où elle avait été admise, ne se souviennent même plus de son nom et ne connaîtront jamais celui de l’enfant. Ce n’est pas par indifférence qu’ils oublient, mais parce que de tels cas sont tellement fréquents en Irak, où les plus faibles sont les plus durement touchés par les sanctions en vigueur depuis huit ans. L’hôpital pédiatrique du centre médical Saddam est l’un des mieux équipés d’Irak, selon la responsable de l’information du Fonds des Nations Unies pour l’Enfance (Unicef) à Bagdad, Areej Daghistani. Mais même là, «il y a un manque de matériel, de médicaments et de personnel médical. Il n’y a même pas de couvertures pour les enfants, leurs parents doivent en apporter eux-mêmes», dit-elle, soulignant que les médecins sont payés entre deux et cinq dollars par mois. Des ingénieurs de l’Unicef étaient à l’œuvre mardi dans un hôpital voisin, tentant de réparer les dégâts causés par les bombardements, qui visaient probablement l’ancien siège du ministère de la Défense, tout proche. Mais même lorsque les travaux seront achevés le mois prochain, la situation des hôpitaux restera effroyable. Dans une salle, Sara, deux ans, repose sur un lit sale. Maigre à faire peur, les yeux à peine ouverts, elle respire avec difficulté. Souffrant d’insuffisance rénale, elle a subi l’ablation des reins mais l’hôpital manque des équipements nécessaires pour la maintenir en vie. «Nous pouvons obtenir le sang nécessaire, mais nous n’avons pas de sacs de transfusion et pas de produits chimiques pour le préserver. Quand un patient a besoin de cinq sacs de sang, nous ne pouvons lui en donner qu’un seul», dit le chef des internes, Ali Nasser. «Nous étions ici quand le bombardement a commencé, mais Sara ne l’a pas senti. Elle est très fatiguée et je ne crois pas qu’elle a réalisé ce qui se passait. Moi-même, je me suis habituée après un certain temps», dit Wafa Mahmoud, la mère de la fillette. Le docteur Ali souligne que la cause la plus commune de décès dans les hôpitaux irakiens n’est plus la raison pour laquelle les malades sont admis, mais les infections, les hémorragies et le manque de transfusions sanguines. Hors des hôpitaux, la principale cause de décès des enfants est la malnutrition, souligne Mme Daghistani. «Tout est disponible sur le marché mais n’est pas à la portée de la plupart des gens. La plus grande partie de la population dépend totalement des vivres» distribuées par les autorités chaque mois en vertu d’un programme de rationnement, dit-elle. Depuis décembre 1996, l’Irak est autorisé par l’Onu, conformément au programme «pétrole contre nourriture», à vendre du pétrole pour acheter des produits de première nécessité dont les vivres et les médicaments. Mais selon les médecins de la cité Saddam, les équipements et les médicaments ne sont arrivés qu’au compte-goutte depuis deux ans. Bagdad accuse les représentants américain et britannique au Comité des sanctions de l’Onu de bloquer l’approbation des contrats de médicaments. Si les enfants de Bagdad souffrent, leur sort est de loin meilleur que ceux des enfants du reste de l’Irak. «La situation dans le sud est terrible. Les systèmes d’égoûts et d’adduction d’eau sont les plus touchés et provoquent le choléra et la typhoïde. Il n’y a pas d’eau potable et j’ai vu dans certains endroits des enfants qui pataugeaient dans les égoûts», dit Mme Daghistani. Le temps qu’il faudra pour remédier à cette situation, une fois que les sanctions seront levées, n’est pas connu. La plupart des données gouvernementales ne sont pas publiées, mais les études de l’Onu estiment qu’il faudra plusieurs années.
Une nuit la semaine dernière, une jeune femme a donné naissance par césarienne à un petit garçon dans un hôpital de Bagdad. Une demi-heure plus tard, les bombes ont commencé à s’abattre sur la ville. Dès que les raids ont cessé, la femme a pris son enfant et est rentrée chez elle. Les médecins de la cité médicale Saddam, où elle avait été admise, ne se souviennent même plus de...