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Actualités - OPINION

Tribune Privatisations, mais démocratiquement

Parmi les multiples remèdes que l’État peut utiliser pour nous sortir de la spirale des déficits budgétaires et arrêter la fuite en avant, il en est un qui peut nous faire atteindre des résultats rapides: la privatisation. Il n’est pas un secteur de l’État à travers le globe qui n’ait été touché ou que l’on n’ait envisagé de restructurer par le biais de la privatisation. Cette vague de privatisations dont l’origine remonte à la politique de dérégulation entreprise par les États-Unis dans plusieurs de leurs secteurs socio-économiques, a trouvé un terrain fertile auprès des États en voie de développement. On estime globalement à environ 60 milliards de dollars par an les investissements privés dans tous les secteurs publics au cours des dix dernières années et ce, dans plus de 90 pays et dans le cadre de plus de 600 projets. L’Angleterre en a été une pionnière dès les années 80 et en a codifié les règles et les mécanismes les plus efficaces. L’énergie (notamment l’électricité) et les télécommunications ont d’abord monopolisé la majeure partie des investissements privés pour s’étendre, par la suite, à des secteurs comme l’eau, le transport, le traitement des ordures et déchets. Mais pourquoi la privatisation est-elle un remède efficace aux déficits budgétaires, notamment au Liban? Pour des raisons simples et de bon sens. D’abord parce que le budget de l’État et les recettes qui le constituent ne peuvent suffire à la reconstruction de toutes les infrastructures d’un pays dont les secteurs de production ont été ravagés par une guerre dévastatrice. Ensuite, parce que le Libanais, à l’aube du XXIe siècle, aspire à un standard de qualité dans le fonctionnement des services utilisés tous les jours. La privatisation génère les fonds nécessaires à ces projets d’infrastructure et améliore la qualité des services en permettant à l’État de se «désinvestir». Voilà déjà un résultat dont l’impact peut facilement se mesurer sur nos déficits budgétaires. Il est clair que la bureaucratie est une maladie spécifique de l’État et les cadres de l’économie privée ont toujours été plus productifs et soucieux envers la satisfaction de la clientèle. La notion de profit change les données du jeu et l’entreprise, devenue privée, améliore ses services pour plaire et gagner un plus grand nombre de clients. La privatisation doit créer, à chaque fois qu’elle le peut, la concurrence. L’avancée technologique autorise aujourd’hui d’envisager, par exemple, l’approvisionnement en électricité à travers plusieurs stations plus petites et plus efficaces, au lieu de créer un seul monopole. La concurrence tourne toujours à l’avantage et au bénéfice du consommateur. La privatisation est une porte d’entrée royale au Liban pour les investisseurs hors frontières. Elle apporte aussi le savoir-faire et l’expérience technologique internationale à travers des modèles financiers variés. Elle peut fouetter et régénérer la torpeur du marché financier local et bancaire et créer de nouveaux produits financiers prévoyant une participation du consommateur au capital social des entreprises privatisées à travers la bourse. Il serait bon de rappeler à ce propos que la démocratie implique que ceux qui sont affectés par une décision aient droit à la parole dans les prises de décision. L’un des grands chapitres, et à juste titre d’ailleurs d’inquiétude et de polémique sur les aléas de la privatisation, reste la masse salariale des fonctionnaires et leur devenir professionnel en cas de privatisation. L’Angleterre a développé dans ce sens une série de programmes spécifiques à ce problème. Il est proposé à ces employés des plans d’achat d’actions par emprunts dans les entreprises à privatiser. Ils peuvent aussi recevoir des actions gratuites en proportion de celles qu’ils achètent. Des plans de retraites et d’indemnisations de fins de service anticipés sont créés à des conditions favorables. Enfin, il est souvent de mise qu’une partie de ces employés soient réengagés dans le cadre de la privatisation. La privatisation décharge l’État d’une masse salariale lourde, inefficace et souvent corrompue, choisie chez nous la plupart du temps pour des raisons politiciennes ou confessionnelles et non de compétence. La privatisation des services publics à l’effet de déconfessionnaliser ceux-ci. Comment privatiser et surtout neutraliser, avant de privatiser, l’influence des groupes de pression aux intérêts conflictuels aussi bien économiques que communautaires? Il existe des règles et des mesures de base éprouvées et rodées dans les pays d’Europe ou aux États-Unis. Il faut d’abord créer une structure institutionnelle en charge de la privatisation, formée d’experts financiers, auditeurs conseils, de juristes et de représentants des secteurs publics concernés. En tête des priorités, il faut établir avec rigueur un programme d’ajustements et de primes aux employés des entreprises publiques en voie de privatisation. Il faut définir la technique à adopter pour chaque type de privatisation (vente à un consortium, offre publique en bourse, rachat par les employés eux-mêmes ou par un groupe d’investisseurs). Si elles ne sont pas adoptées, il faut réviser les législations et les structures administratives afin de les rendre souples et adéquates. L’État doit non seulement déterminer et calculer à l’avance l’économie qu’apporte la privatisation en allégement au Trésor Public, mais aussi s’assurer qu’elle procure au citoyen un service plus efficace à un prix compétitif. Toutes ces mesures de base sont doublées d’un mécanisme de contrôle rigoureux, à deux niveaux: celui de la diffusion de l’offre par la publicité la plus large et celui du choix final des bénéficiaires (l’ouverture des offres) totalement transparent et mis à la disposition pour vérification de toutes les parties concernées. Aucun des employés anciens ou en exercice pendant un délai déterminé ou représentants de l’État n’ont le droit de participer directement ou indirectement aux offres de privatisation. Le délit devrait être considéré pénal. Le souci de la transparence ne doit néanmoins pas bloquer et retarder le processus d’exécution. On se prend à rêver après ce tableau idyllique de privatisation démocratique, de changements magiques. Des changements magiques, utopiques? Ce n’est pas si sûr que cela. L’État semble s’engager par la force des nécessités, mais timidement encore, vers les privatisations. Elles restent souvent «improvisées» et ceux qui subissent ses effets sans en profiter sont souvent les derniers avertis. Il n’est pourtant pas si grand, ce petit pays de 10 452 km2 pour ne pas gérer correctement le quotidien d’une population courageuse mais parfois trop fataliste. On recherche, pour privatiser démocratiquement, des hommes intègres, compétents et de bonne volonté.
Parmi les multiples remèdes que l’État peut utiliser pour nous sortir de la spirale des déficits budgétaires et arrêter la fuite en avant, il en est un qui peut nous faire atteindre des résultats rapides: la privatisation. Il n’est pas un secteur de l’État à travers le globe qui n’ait été touché ou que l’on n’ait envisagé de restructurer par le biais de la privatisation. Cette vague de privatisations dont l’origine remonte à la politique de dérégulation entreprise par les États-Unis dans plusieurs de leurs secteurs socio-économiques, a trouvé un terrain fertile auprès des États en voie de développement. On estime globalement à environ 60 milliards de dollars par an les investissements privés dans tous les secteurs publics au cours des dix dernières années et ce, dans plus de 90 pays et dans le cadre...