Comme une voix lointaine, ce livre a la beauté secrète et étrange des choses indicibles. Kitab al-Ramel (Le livre des sables) de Bassam Hajjar (132 pages-éditions al-Massar) est une œuvre déroutante où la poésie et la réflexion font un heureux compagnonnage. L’auteur a déjà à son actif plus d’une publication. Parmi une dizaine d’ouvrages édités, on cite volontiers quelques titres de ce parcours littéraire où depuis 1980 Bassam Hajjar a conquis ses galons d’homme de lettres : «Simple fatigue»... «Éloge de la trahison»... «Préoccupations d’un homme très calme»... «L’histoire de l’homme qui a aimé le canari»... Aujourd’hui, conciliant érudition et sens de la formule, Bassam Hajjar offre sa dernière création littéraire avec cette exergue de J.-L. Borgèse : «Il m’a dit que son livre s’appelait le livre des sables parce que le livre et le sable n’ont ni début ni fin...». En effet, de la première à la dernière phrase, l’auteur suit les méandres d’une pensée livrée à l’inspiration du moment, à l’imaginaire et aux sensations de l’environnement ou aux impressions d’une lecture... Le sable est bien éloquent, symbole des lieux d’origine ou de disparition... Dans une langue arabe austère, châtiée, riche d’un lyrisme contenu, avec des phrases courtes et incisives, par aphorismes ou formules lumineuses, Bassam Hajjar trace les grandes lignes d’une prose poétique (truffée de citations d’auteurs arabes et étrangers) oscillant entre rêve, méditation et discours solitaire mais où l’ensemble est constamment d’une étonnante modernité. Se connaître, connaître l’autre, vivre d’interrogations et d’attente tout en fouillant minutieusement les gestes quotidiens et le vécu, cette narration dévoile en douce tous les replis de l’être comme un vent qui lève le mystère des dunes en emportant au loin, par myriades, les grains de sable...