Actualités - CHRONOLOGIE
Irak - L'horloge de la capitale sonne à la gloire du président Bagdad vit à l'heure de Saddam Hussein (photo)
le 20 novembre 1998 à 00h00
Quand l’horloge de Bagdad sonne, elle ne donne pas seulement l’heure, elle rappelle aussi aux Irakiens l’omniprésence du président Saddam Hussein, que les États-Unis veulent chasser du pouvoir, dans leur vie quotidienne. La mélodie de l’horloge, adoptée comme top horaire à la radio et la télévision, est en effet tirée d’une chanson célébrant les sacrifices des Irakiens durant la guerre avec l’Iran, de 1980 à 1988, et qui s’adresse au président : «le peuple est lié à toi par un serment». L’Irak donne ainsi l’image d’un pays indissociable de son chef qui le gouverne depuis 19 ans. Les Irakiens que l’on interroge dans la rue affirment qu’ils ne peuvent même pas imaginer qu’il puisse un jour être remplacé. Dès l’enfance, les Irakiens apprennent à aimer et à respecter le chef de l’État. Les programmes scolaires comprennent des visites au musée qui lui est dédié, le «musée du commandant de la victoire», un imposant édifice blanc surplombé par l’horloge, une tour de 53 mètres. «Nous recevons cinq groupes d’élèves en moyenne tous les jours», dit Saleh Mahdi, le directeur du protocole du musée, inauguré en 1995. «À travers le musée, ils apprennent l’histoire de l’Irak», dit Qoureich Abdel Karim, une institutrice qui guide ses élèves de 12 ans à travers les salles en marbre. «Le président symbolise notre dignité», ajoute-t-elle. «Saddam Hussein est mon idole», assure le petit Omar, sans même attendre de faire le tour des salles, qui commence par une photo de la maison où le président a grandi, une bâtisse en torchis dans un village proche de Tikrit, dans le nord. Les photos du petit Saddam, orphelin de père, un de ses bulletins scolaires, un mûrier qu’il a planté dans sa jeunesse, tout est là pour rappeler que le président est «un homme du peuple», souligne M. Mahdi. Un vieux rasoir, un blaireau, un bol en étain complètent le tableau. La suite montre que le président a lutté et souffert afin de devenir «le bâtisseur de la gloire et la splendeur de l’Irak», un de ses titres officiels. Le «roi» sans moustaches On trouve aussi ses photos lors de son exil en Syrie, où il s’est réfugié après une tentative d’assassinat contre l’ancien Premier ministre Abdel Karim Kassem, en 1959, un cliché de la prison où il a été incarcéré, en 1964, après son retour en Irak. C’est de cette époque que date une rare photo du président sans moustache, et en lunettes d’intellectuel, puisqu’il a dû revenir incognito. La photo du restaurant La Gondole de Bagdad, où ses compagnons ont planifié son évasion de la prison, achève de retracer ces temps difficiles, ainsi qu’une autre de son fils aîné, Oudaï, alors bébé. L’enfant a sa place au musée parce que les camarades de Saddam Hussein au sein du parti Baas glissaient des messages à son intention dans les langes. Saddam Hussein, en prison, les recevait lors des visites de famille. Ailleurs sont exposés les cadeaux des chefs d’États et responsables étrangers. Sabres et revolvers en or, fusils incrustés de pierres précieuses, bibelots, livres, montres, la liste n’en finit pas. «Il y a des milliers et des milliers de cadeaux, nous faisons une rotation régulière parce que nous ne pouvons pas tous les exposer, il n’y a pas assez de place» dans ce musée de 30 000 mètres carrés, dit le chef du protocole. Certains présents sont tout de même inamovibles, dont des éperons de cow-boy offerts par l’ancien président américain Ronald Reagan en 1986 ou une vieille épée reçue de Jacques Chirac en 1974 alors qu’il était Premier ministre. Il y aussi ceux offerts par les Irakiens, dont la petite Perry Bakr Chakour, qui a fait le sacrifice de sa natte, exposée à côté d’une lettre où elle écrit: «Rien ne m’est plus cher que mes cheveux longs, mais toi tu es plus cher à mon cœur». Un autre irakien a offert une couronne en or. Saddam est roi, même en république.
Quand l’horloge de Bagdad sonne, elle ne donne pas seulement l’heure, elle rappelle aussi aux Irakiens l’omniprésence du président Saddam Hussein, que les États-Unis veulent chasser du pouvoir, dans leur vie quotidienne. La mélodie de l’horloge, adoptée comme top horaire à la radio et la télévision, est en effet tirée d’une chanson célébrant les sacrifices des Irakiens durant la guerre avec l’Iran, de 1980 à 1988, et qui s’adresse au président : «le peuple est lié à toi par un serment». L’Irak donne ainsi l’image d’un pays indissociable de son chef qui le gouverne depuis 19 ans. Les Irakiens que l’on interroge dans la rue affirment qu’ils ne peuvent même pas imaginer qu’il puisse un jour être remplacé. Dès l’enfance, les Irakiens apprennent à aimer et à respecter le chef de l’État....