Actualités - CHRONOLOGIE
Rencontre avec l'Autre Nassib El-Husseini : casser la dichotomie
Par J. Je, le 12 novembre 1998 à 00h00
«Je suis autant musulman que chrétien et autant penseur libre qui habite à Montréal. Je suis le fruit de mon temps», c’est par cette caractérisation mixte et universaliste que se définit Nassib el-Husseini, auteur d’un ouvrage intitulé L’Occident imaginaire, qui vient de paraître aux éditions Presses de l’Université du Québec. Faisant écho à l’ouvrage, de Tierry Hentsch – L’Orient imaginaire – paru en 1988, l’œuvre de Husseini ressemble d’ailleurs beaucoup au personnage. Dans son ouvrage ce dernier essaye de repenser l’image de l’Occident qui s’est formée, au fil du temps, dans la conscience politique arabe. De même qu’il remet en question les différents concepts et préjugés que viennent nourrir les médias dominants de part et d’autre. Son ouvrage comporte également une analyse en profondeur du regard porté sur les événements historiques douloureux, ainsi que sur les écrits qui ont reflété et perpétué la dichotomie Est/Ouest. C’est «à l’Autre, cet autre qui n’est nul que moi», que Nassib el-Husseini dédie son ouvrage. Car l’Autre, parce qu’il est différent, va exercer sur moi un attrait mais également susciter une peur, dit l’auteur, d’où ce mélange d’amour et de haine qui vont contribuer à constituer une perception rigide de “l’Orient” envers “l’Occident”. Nassib el-Husseini invite, dans son livre, le lecteur “oriental” à «sonder la vision de l’Occident dans la conscience politique arabe». «La roue motrice du projet, ajoute-t-il, c’est de mieux se connaître à travers l’étude de l’image que l’on se forme de l’Autre, cet autre état de l’Occident» sur lequel “les peuples de l’Orient” ont accumulé toutes sortes de préjugés par le biais de prismes déformants «qu’offrent spontanément la mémoire collective et la diversité des acteurs impliqués à tout moment». Quant aux lecteurs occidentaux, l’auteur s’adresse à eux en ces termes: «Je leur offre un voyage dans notre tête, dans notre cœur et dans notre âme» en même temps que «je m’offre une recherche de soi», le but ultime étant de casser ou de rectifier certaines images préconçues. L’histoire faussée Se basant sur le vécu incarné par les grands moments historiques qui ont marqué la conscience politique arabe, sur son passé personnel et sur la réflexion théorique, apportée par les intellectuels et les artistes arabes, Nassib el-Husseini creuse et décortique tous les clichés. Après un premier arrêt sur l’analyse du concept “d’Occident mythologique”, véhiculé à travers les grandes civilisations de l’Antiquité, par la conquête arabe de l’Andalousie ou par les croisades, l’auteur explique comment des images associées à ces “jalons historiques” ont contribué à façonner les représentations qui nourrissent la “conscience politique arabe” en essayant de faire “la part des choses” à travers un nouveau regard porté sur l’histoire. De même, dit-il, que “l’Occident historique” a été représenté, à travers une vision manichéenne durant la période de “la grande désillusion” qui a suivi le joug ottoman. Cette période s’est caractérisée par le développement des relations bilatérales avec l’“Occident”, par l’orientalisme qui s’ensuivit, et, point culminant de la “déception”, par la collusion entre Israël et Al-Gharb, «un thème central qui orchestrera la perception arabe de l’Occident au XXe siècle: “celui du complot...”»! Le “Sharq” explique l’auteur, se sent agressé au nom de l’Occident d’où une réaction de haine pourtant nuancée par des réactions d’attrait ou d’identification, “de rejet ou d’idéalisation”, réactions qui seront exprimées par toute la pensée arabe contemporaine, que l’auteur décortique dans ses moindres nuances. De Al-Tahttâwi à Taha Hussein et Anouar Sadate, qui ont plus penché vers l’idéalisation, ou encore des penseurs comme Mohammad Abdou, Hassan al-Banna et Sayyed Koutb, l’ayatollah Khomeiny, ou Sayyed Mohammad Hussein Fadlallah, incarnant respectivement le rejet islamiste sunnite et chiite, au “rejet laïque” représenté par Michel Aflaq, Nassib el-Husseini analyse la pensée de tous ces auteurs pour en arriver à dire que “c’est la même personne qui va aimer et rejeter cet Occident” avec toutes les nuances qu’une telle affirmation entraîne (“présence d’éléments d’idéalisation chez les tenants du rejet, et d’éléments de rejet chez les idéalisateurs”). Ce déchirement, poursuit l’auteur, on le retrouve de façon encore plus marqué, et toujours aussi nuancée, chez des auteurs très contemporains, tels que Mahmoud Hussein, Edward Saïd, mais aussi à travers l’œuvre d’un romancier comme Al-Tayyeb Çaleh ou les conceptions d’un artiste comme le chanteur populaire Marcel Khalifé. C’est vers l’altérité que tend tout l’ouvrage de Nassib el-Husseini, une altérité qui devrait permettre selon l’auteur, de dresser un “pont” entre le monde arabe et l’Autre, à travers la recherche de soi. Il faudra sonder les relations complexes entre les peuples, plutôt que de se satisfaire des clichés ou du sensationnel, comme il dit. Mon but ultime, explique l’auteur, c’est essayer d’aider un Montréalais à comprendre la résistance à une paix avec Israël par exemple... La confrontation et la haine existent certes, dit l’auteur, mais la présence de l’amour est également indéniable.
«Je suis autant musulman que chrétien et autant penseur libre qui habite à Montréal. Je suis le fruit de mon temps», c’est par cette caractérisation mixte et universaliste que se définit Nassib el-Husseini, auteur d’un ouvrage intitulé L’Occident imaginaire, qui vient de paraître aux éditions Presses de l’Université du Québec. Faisant écho à l’ouvrage, de Tierry Hentsch – L’Orient imaginaire – paru en 1988, l’œuvre de Husseini ressemble d’ailleurs beaucoup au personnage. Dans son ouvrage ce dernier essaye de repenser l’image de l’Occident qui s’est formée, au fil du temps, dans la conscience politique arabe. De même qu’il remet en question les différents concepts et préjugés que viennent nourrir les médias dominants de part et d’autre. Son ouvrage comporte également une analyse en...
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