Actualités - OPINION
Tribune Euro, Horizon 99
Par ISSA Céline, le 05 septembre 1998 à 00h00
L’Union économique et monétaire (UEM) démarre concrètement en Europe le 1er janvier 1999, avec l’apparition de l’Euro non seulement comme unité de compte, mais également comme moyen de paiement. La monnaie européenne sera émise uniquement par la Banque centrale européenne (BCE) qui s’investira dans ses fonctions à partir de ce moment précis. Les secousses du récent hier venant d’Asie, tout comme celles qui partent aujourd’hui de Russie pour donner des fourmillements à Wall Street, prouvent, si besoin était, l’importance de cet événement à venir, tant sur le plan international qu’européen. Mais certains doutes subsistent encore quant au bon déroulement des opérations de mise en place de l’UEM. Il s’agit donc ici de préciser en quoi consistent ces opérations, et quel sera l’impact de l’UEM sur les économies des pays membres dont l’adhésion est, on le sait, liée à des préalables établis afin de promouvoir un Euro stable et crédible. Ces conditions, appelées «critères de convergence», sont: la stabilité des prix, un taux de change constant, des différentiels d’intérêts minimes et un corset fiscal déterminé. — La stabilité des prix nécessite un niveau d’inflation qui ne doit pas dépasser les valeurs de référence des trois pays membres les plus performants, avec une marge de 1,5%. La valeur de référence a, dès lors, été fixée à un niveau d’inflation de 3% du Produit intérieur brut (PIB). — Un taux de change constant est utile pour des politiques économiques extérieures saines. Il ne permet que des marges de fluctuation étroites (2,25%) sauf exception (Italie, 15%). — Les taux d’intérêt doivent être peu différenciés d’un pays à l’autre, avec tolérance d’une marge de 2% de plus que les trois pays les plus performants. — Enfin, les critères fiscaux prévoient que le déficit public ne doit pas excéder 3% du PIB et que la dette publique ne doit pas dépasser les 60% du PIB. En effet une politique budgétaire restrictive est nécessaire pour contrer l’inflation et éviter une hausse des taux d’intérêt qui nuirait à l’investissement comme à la croissance. En pratique, les critères de convergence ne sont jusque-là respectés qu’en ce qui concerne l’inflation et les taux d’intérêt (Grèce et Italie exceptées). Côté critères fiscaux, seul le Luxembourg est à jour. Cependant, d’ici l’échéance, les Etats ont tous promis d’honorer leurs engagements. Transition La transition monétaire, manœuvre délicate qui doit être menée souplement, s’étalera sur trois phases, durant lesquelles le statut de la BCE se verra progressivement précisé. — La phase A comprendra l’intronisation des pays membres et l’établissement de la BCE en tant qu’institution indépendante. Le statut légal de l’Euro sera défini, obligeant le secteur privé (spécialement bancaire) à procéder à des ajustements de gestion. — La phase B (1999-2001) verra la mise en circulation de l’Euro en tant que moyen de paiement. Le taux de change Euro-monnaie nationale sera désormais un taux de conversion. Le système monétaire au sein de chaque pays sera bivalve, ce qui induit la création d’un marché monétaire commun (TARGET), afin d’éviter des distorsions entre la monnaie européenne et les monnaies nationales. En outre l’Euro sera utilisé comme unité de compte dans les règlements internationaux et interbancaires. Autre changement: la dette publique sera exprimée en Euro, qui aura alors cours légal mais non forcé. — Enfin, la phase C (2002) sera marquée par la naissance physique de l’Euro sous la forme fiduciaire des euronotes. La période de transition prendra fin lorsque la monnaie nationale aura totalement disparu dans les règlements des transactions pour être remplacée par l’Euro, qui sera l’unique monnaie en circulation. Le cours du change sera 1 ECU pour 1 Euro. Pour ce qui est de la BCE, institut supranational à statut juridique indépendant, ce n’est que lors de la troisième phase de la transition qu’elle précisera les tenants de sa politique monétaire, dont les objectifs incluront la stabilité des prix en coordination avec les politiques économiques des pays membres. Par ailleurs, elle se fera assister par les différentes banques centrales de l’Union. Outre l’élaboration d’une stratégie monétaire, la BCE aura pour fonction de produire en exclusivité la monnaie européenne et d’en déterminer les quantités. Cette dernière attribution permet d’ailleurs de définir les objectifs intermédiaires de la BCE, à savoir le contrôle quantitatif de la masse monétaire (M3). Ainsi, afin de stabiliser l’inflation, on utiliserait le contrôle de l’offre de monnaie. Système efficace, à condition de disposer d’un tableau précis des agrégats monétaires et de se trouver face à une demande de monnaie relativement stable. En ce qui concerne les instruments monétaires, les opérations d’open-market, plus souples, seront favorisées au profit du contrôle des réserves obligatoires. Pour respecter la politique interne de stabilité des prix, la politique externe du taux de change sera menée en coordination avec les membres du Conseil européen (ECOFIN). Impact Quant aux conséquences sur les composantes des économies européennes, il va sans dire que l’unification comporte des avantages considérables, tant au niveau macroéconomique qu’au niveau microéconomique. Une monnaie unique, circulant à travers le marché européen, favorisera la transparence des prix, caractéristique fondamentale des marchés concurrentiels, induisant en l’occurrence compétitivité et croissance sur les marchés des biens réels. Par ailleurs, l’UEM entraînera une extension des marchés financiers, augmentant ainsi les opportunités de financement des investissements et attirant les capitaux étrangers au sein de l’Europe. Sans oublier l’importance du facteur international, l’Euro devant être utilisé comme monnaie de réserve dans le règlement des échanges internationaux au même titre que le dollar. Outre les avantages économiques, l’Euro générera des avantages politico-sociaux. Il limitera naturellement les dissensions politiques à caractère nationaliste. Et il devra améliorer le niveau de vie du consommateur européen grâce aux vertus d’une transparence des prix éliminant le problème de la parité du pouvoir d’achat, tout en permettant une meilleure information sur la qualité des produits et facilitant leur comparaison. Et, bien que la question de l’emploi n’ait pas été précisément traitée dans les négociations européennes, l’Euro influerait positivement sur le marché du travail: la compétitivité accrue et la meilleure intégration internationale des PME (petites et moyennes entreprises) européennes devraient contribuer à freiner le chômage sur le Vieux continent. Mais l’Euro entraînera forcément de profondes mutations sur le plan financier, touchant spécialement le secteur bancaire. Il sera en effet non seulement un moyen de paiement sous sa forme fiduciaire et scripturale, mais aussi une réserve de valeur, susceptible d’être stockée. Les crédits, les dépôts et le rendement des titres financiers (obligations) seront convertis en Euro, sans changement de leur valeur réelle. Actifs monétaires et financiers ne souffriront pas d’une dégradation de leur pouvoir d’achat: la conversion en Euro revient en fait, tout simplement, à exprimer une monnaie sous la forme d’une autre, ce qui n’entraîne aucune perte de change. Toutefois les banques commerciales ou spécialisées auront à modifier tous leurs comptes d’ici l’an prochain et à réaliser des ajustements organisationnels dans la gestion bancaire. Bien que l’effet de l’Euro sur les marchés financiers demeure incertain, il devra avoir un impact positif sur le marché des actions, grâce à une harmonisation plus renforcée des marchés européens et grâce à l’élimination du risque que constituait le taux de change. La valeur des actions n’inclura plus d’ailleurs une dimension géographique, mais sectorielle. Globalement donc, l’impact de l’Euro sur les marchés financiers dépendra de la compétitivité de chaque centre financier. Compétitivité liée à l’aptitude à pourvoir le marché primaire en titres financiers, à la notion de liquidité, aux coûts de transaction. Mais aussi au dynamisme de l’environnement économique de chaque centre financier. Et à la participation active du pays membre au sein de l’UEM.
L’Union économique et monétaire (UEM) démarre concrètement en Europe le 1er janvier 1999, avec l’apparition de l’Euro non seulement comme unité de compte, mais également comme moyen de paiement. La monnaie européenne sera émise uniquement par la Banque centrale européenne (BCE) qui s’investira dans ses fonctions à partir de ce moment précis. Les secousses du récent hier venant d’Asie, tout comme celles qui partent aujourd’hui de Russie pour donner des fourmillements à Wall Street, prouvent, si besoin était, l’importance de cet événement à venir, tant sur le plan international qu’européen. Mais certains doutes subsistent encore quant au bon déroulement des opérations de mise en place de l’UEM. Il s’agit donc ici de préciser en quoi consistent ces opérations, et quel sera l’impact de l’UEM sur...
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