Nadim Karam n’est pas peu fier d’avoir remporté son pari: exposer ses statues géantes sur le plus fameux pont de Prague. «A l’origine, nous avions prévu que la «procession» serait sur le Pont Manes, et l’éléphant sur le Pont Charles» dit Nadim Karam. «A la dernière minute, il a été décidé de placer l’éléphant sur les rives de la Vltava, en face du Pont Manes».
Au Musée Sursock
et au Musée national
Rappelons que la «procession archaïque» est un projet conçu et réalisé par l’atelier «d’art-chitecture» de Karam, Hap-Situs. Ces statues-personnages en fil de fer ont déjà été exposées au Musée Sursock puis au Musée national. Elles sortent de l’imagination débridée de Karam. «Pour Prague, rappelle Karam, elles figurent la matérialisation éblouissante de la rencontre du peintre russe Kandinsky de passage à Prague et de l’écrivain tchèque Kafka...». La «procession archaïque» s’est cependant heurtée à l’opposition de comités d’artistes tchèques. «Ils ont soulevé deux problèmes: d’abord ils ont été désolés de voir que les ponts de leur ville accueillent pour la première fois l’exposition des œuvres d’un étranger. Ensuite, ils ont affirmé que la dimension des statues (4,5 mètres) défigure la ville».
Mais le président tchèque, Vaclav Havel, a protégé Karam. Passant sur le pont, il est séduit par ces géants de fer qui exécutent une folle danse. Il s’arrête, se renseigne. Puis revient, «accompagné par les caméras de télé et les photographes». C’est une reconnaissance inespérée...
Les statues ne rentrent donc à Beyrouth que fin juin. Elles investiront le centre-ville pour s’y établir jusqu’en l’an 2000...
Expo à Berlin
Parallèlement, Nadim Karam présente à Berlin, à partir du jeudi 19 juin, différentes «légendes urbaines» ou planches pour reconstruire le centre-ville de Beyrouth. «Hilarius Beyrouth», une exposition d’architecture afin «d’inciter les jeunes architectes et artistes à ne pas s’arrêter aux plans déjà décidés pour la reconstruction de leur ville», explique Karam. Il travaille toujours en collaboration avec une équipe de jeunes architectes. «Il faut toujours critiquer si on veut que la ville avance», dit-il.
A l’Université technique de Berlin (section architecture et urbanisme), Karam présentera 15 planches de 1m x 1,5m. Différentes idées «à penser; des concepts à développer, à rendre réalisables», explique Nadim Karam. Quelques exemples? «Le «Code barre», immeubles qui en s’assemblant formeraient comme une mosaïque. Le «Puzzle nomade» dans lequel les terrains sont découpés en puzzle, «nomade» car tous les cinq ans, un nouveau propriétaire reprendrait la construction et y changerait quelque chose. «Syndrome mercure» est un concept plus abstrait: partant des immeubles encore sur place, il s’agit de construire des bâtisses en courbe qui épouseraient les formes des immeubles déjà existants. Le tout en conservant à chaque construction son espace vital». Nadim Karam espère ramener cette exposition à Beyrouth, car c’est à la capitale libanaise qu’elle s’adresse en premier...
A. G.