«Elles tentent de convaincre le petit peuple que traiter avec les autres banques est illicite», a protesté Ibrahim Siida, rédacteur en chef de l’hebdomadaire gouvernemental Akhbar al-Yom, à la pointe du combat.
«Ce sont des tartufes», renchérit le directeur de la rédaction Kamal Abdel Raouf. «Elles utilisent l’islam pour attirer la population et leur subtiliser une partie de ses gains, tout en affirmant financer des projets de bienfaisance et assurer un profit “halal”» (licite selon l’islam), déclare-t-il.
Ce sont les banques islamiques qui ont déclenché les hostilités, en lançant en janvier, durant le Ramadan, une campagne télévisée assurant qu’elles seules offraient «des bénéfices halal» à leurs clients.
Tout musulman doit verser la zakat (contribution à une œuvre de charité) mais des divergences existent sur la rémunération des dépôts bancaires.
Certains oulémas (théologiens musulmans) jugent illicite de fixer au préalable le taux d’intérêt car cela s’apparente à de l’usure, prohibée par l’islam. Pour sa part, l’imam d’Al-Azhar, cheikh Mohammad Sayyed Tantaoui, estime que les taux d’intérêt sont permis.
Dans une déclaration sans précédent, qui a suscité la colère des fondamentalistes, cheikh Tantaoui a souligné récemment que ces banques devraient «supprimer l’appellation “islamique” qui pourrait donner l’impression que les autres banques ne le sont pas».
Il existe trois banques islamiques en Egypte: la Banque de financement égypto-séoudienne, la Banque islamique internationale pour l’investissement et le développement et la plus importante, la Banque Fayçal islamique, avec un capital de 300 millions de dollars et comme conseiller, l’ancien mufti d’Egypte, cheikh Mohammad Khater.
Cacher les bénéfices
En outre, deux banques publiques, la Misr et la Banque du Caire ont créé des secteurs spécialisés dans «les transactions islamiques».
Mais leur poids est faible. Elles ne représentent que 20% des 3,5 milliards de dollars de dépôts placés dans les banques d’affaires égyptiennes et une infime partie des 44 mds de dépôts dans la centaine de banques commerciales du pays.
«Le gouvernement n’a pas peur de les voir un jour contrôler le système bancaire mais la presse est exaspérée par leur publicité affairo-moralisante», commente un banquier occidental.
Un ancien ministre des Finances, qui a dirigé une banque islamique dans les années quatre-vingts, M. Ahmed Zendou, les a accusées dans les colonnes de Akhbar al-Yom de «cacher leurs bénéfices réels et d’en fabriquer d’autres pour les clients, en les présentant comme une répartition des profits».
Un ancien chef des services de sûreté de l’Etat, le général Fouad Allam, a carrément accusé les islamistes d’utiliser les bénéfices de ces banques pour financer des actes terroristes.
«C’est absolument infondé. Si des banques sont utilisées pour des activités illégales, nous découvrirons qu’il s’agit de banques non-islamiques», a rétorqué le porte-parole des Frères musulmans, M. Maamoune Hodeiby.
«L’activité des ces banques est contrôlée par l’Etat», a renchéri M. Mahmoud al-Ansari, ancien vice-président de l’Union internationale des banques islamiques.
«Elles font tellement de bénéfices que la Citibank américaine a décidé d’ouvrir une filiale pour les transactions islamiques dans le Golfe», a-t-il souligné.
Après un mois de silence, le gouvernement a réagi par la voix du ministre de l’Economie. Mme Nawal al-Tataoui a estimé que «rien ne justifiait la suppression des banques islamiques qui font partie du système bancaire (égyptien) et qui œuvrent comme les autres dans l’intérêt de la société».
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