On reste en revanche sans nouvelle de Gerry Roufs, le skipper de Groupe LG 2 qui pointait en deuxième position du classement. Hors course depuis son escale en Afrique du Sud, la Française Isabelle Autissier a fait demi-tour mercredi soir, mais se trouvait alors à une quarantaine de milles nautiques de la dernière position connue de Roufs.
Point final d’une mésaventure commencée dimanche, Thierry Dubois, le skipper français de Amnesty International qui s’était réfugié sur un canot de survie largué lundi par un avion de recherches australien, a été hélitreuillé aux premières lueurs du jour par un Seahawk embarqué sur la frégate.
Quelques heures plus tard, le navigateur britannique Tony Bullimore tombait à son tour dans les bras des sauveteurs australiens après cinq jours de confinement à l’intérieur de la coque de son Global Exide Challenger.
Bullimore, 56 ans, a lui-même surgi de son bateau retourné lorsque des membres de l’équipage de la frégate Adelaïde ont frappé sur la coque du voilier.
«Pour l’heure, je me sens en extase», a déclaré l’ancien marin de la Royal Navy à la BBC. Souffrant d’hypothermie et de déshydratation, Bullimore a expliqué être resté en vie grâce à «une détermination absolue, un peu d’eau, un peu de chocolat, m’acrochant à la vie et espérant que quelque chose se produirait».
Le circumnavigateur est également atteint de gelures aux pieds et a perdu l’extrémité d’un doigt, sectionné dans un accident.
Champagne et
tasse de thé
Le capitaine de frégate Raydon Gates, commandant de l’Adelaïde, avait raconté un peu plus tôt l’indescriptible joie qui s’était emparé de tout l’équipage lorsque le navigateur solitaire a répondu aux coups frappés sur son voilier, donnant pour la première fois signe de vie depuis le déclenchement de sa balise de détresse dimanche à 2.600 km au large des côtes australiennes.
«Ses premières paroles ont été «Merci mon Dieu!» et «C’est un miracle!»», a poursuivi Raydon Gates. «Il n’a pas été, au départ, très bavard mais il était tout sourire. La première chose qu’il a demandé, c’est une tasse de thé...».
«Miracle est le mot qui nous est venu à l’esprit», a-t-il confirmé.
Thierry Dubois, âgé de 29 ans, est également dans un état de santé étonnamment bon, ont dit les secours australiens. Il souffre d’hypothermie et d’ampoules aux mains et aux pieds trop longtemps exposés au froid et à l’humidité.
La manœuvre de treillage du skipper français s’est déroulée à merveille. «Son premier mot fut «Merci». Il ne parle pas beaucoup mais il sourit beaucoup», a poursuivi le commandant Gates.
Le succès de cette opération de secours organisée dans des conditions défavorables (zone éloignée, vents soufflant à 50 nœuds, mer formée avec des creux de 5 mètres) a valu à l’Australie l’hommage et les remerciements des autorités britanniques et françaises.
En visite en Inde, le premier ministre britannique John Major a immédiatement réagi à l’annonce du sauvetage: «Je crois que c’est une histoire absolument extraordinaire», a-t-il dit. «Nous sommes très reconnaissants envers ceux qui l’ont fait. Je crois que très peu de personnes attendaient cette issue heureuse et je suis absolument enchanté d’avoir entendu cette nouvelle».
Questions sur le parcours
du Vendée Globe
A Bristol (Angleterre), entourée d’une vingtaine de proches et de membres de sa famille, l’épouse du marin britannique, Lalel, a sablé le champagne dans les effusions de joie qu’on imagine en apprenant le sauvetage de son mari.
Pour l’Agence australienne des secours maritimes (AMSA), l’opération tient de la magie. «C’est un acte digne d’Houdini, a déclaré le porte-parole David Gray, c’est à n’en pas douter l’une des plus importantes opérations de recherche et de sauvetage de tous les temps».
Mais la coûteuse organisation des secours qui s’ajoute aux recherches lancées fin décembre pour venir en aide à un autre concurrent du Vendée Globe, le Français Raphaël Dinelli (arrivé sain et sauf mardi à Hobart), et au sauvetage deux ans plus tôt de la navigatrice française Isabelle Autissier, en perdition dans le Boc Challenge, ont lancé une polémique sur le partage du financement et sur le parcours même du Tour du monde à la voile en solitaire et sans escale.
Le ministre australien des Sports, Warwick Smith, a écrit à son homologue français Guy Drut pour lui demander d’intervenir auprès des organisateurs de la course pour rendre le parcours plus sûr.
«L’Australie ne remet pas en question ses obligations liées aux conventions internationales de porter secours aux navigateurs en difficulté», écrit le ministre.
«Cependant, ces récents sauvetages doivent interpeller l’organisation de tels événements (sportifs). Si je ne suggère nullement que ces courses soient interdites, j’estime qu’il faut reconsidérer les routes que les concurrents sont autorisés à suivre».
«En particulier, je suggère que les concurrents empruntent une route plus longue, plus au nord et de fait plus sûre». (Toute la flotte du Vendée Globe encore en mer croise en ce moment entre les 50e et 60e parallèles sud, dans une zone éloignée de tout et particulièrement hostile à la navigation).
D’autres critiques portent sur la conception même des voiliers et les règles de sécurité imposées par les organisateurs. «Le véritable problème, ce n’est pas la course ni les routes trop au sud, mais la construction des voiliers», a estimé Chay Blith, vétéran de la voile et premier marin à avoir accompli un tour du monde solo d’Est en Ouest. «Ce qui est en jeu ici, c’est le facteur «conception» et le dépassement des limites».
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