De manière plus précise, Abou Mahjane est accusé de diriger une bande de malfaiteurs qu’il a formée pour «attiser les dissensions confessionnelles, entreprendre des actions de sabotage et pour organiser des attentats à la bombe contre des établissements touristiques et des établissements de commerce vendant de l’alcool». Il est également accusé d’avoir tenté d’assassiner le mufti de Tripoli, cheikh Taha Sabounji, et le mufti des Ahbache à Tripoli, cheikh Taha Nagi. Il est aussi accusé du meurtre du chef des Ahbache, cheikh Nizar Halabi, tué à Beyrouth le 31 août 1995.
La peine de mort a également été requise contre douze complices présumés de Abou Mahjane. Il s’agit de Fouad Samir Zeyné, Wassim Mohamed Abdallah, Tarek Mohamed Abdallah, Saïd Hassan Chahhal, Abdel Rahman Fathi Fayek, Raëd Ahmed Atoum, Imad Abdel Hamid Ali, Omar Ezzeddine Ali, Ahmed Ezzeddine Ali, Mohamed Houssam Saïd Naboulsi, Ahmed Toufic el-Hassan Rifaï et Nasser Ahmed Ismaël. Dix parmi eux ont pu être arrêtés et doivent être jugés pour atteinte à la sécurité intérieure de l’Etat. Il s’agit de Zeyné, des deux frères Abdallah, de Chahhal, Fayek, Atoum, des trois frères Ali et de Naboulsi. Nasser Ismaël est le seul avec Abou Mahjane à être poursuivi dans l’affaire Halabi.
Dans l’acte d’accusation qu’il a publié hier, le juge Bitar a mis l’accent sur les tiraillements au sein de la communauté sunnite, soulignant en allusion à Abou Mahjane que «certaines parties installées au Liban ont exploité la tension sur la scène sunnite». Sous prétexte de préserver les préceptes de l’islam et de venger la mort d’ulémas tués durant la guerre, ces parties ont tenté de provoquer les conflits confessionnels et idéologiques pour encourager les membres d’une même communauté à s’entretuer. Leur but à long terme était de pousser le peuple libanais à s’entretuer de nouveau et de promouvoir la création d’un Etat islamique au Liban.
Entraîné par le
Hezbollah et
les Iraniens
En vue de la création de cet Etat, Ahmed Toufic el-Hassan Rifaï qui avait été entraîné par le Hezbollah et les Gardiens de la révolution iranienne, a formé une bande armée regroupant entre autres Fouad Zeyné, Raëd Atoum, Wassim et Tarek Abdallah, ainsi que Saïd Chahhal. Il a établi sa base militaire à Jibal el-Arbaïne dans le caza de Denniyé et a voulu dans un premier temps former le noyau d’une société islamique fondée sur le Jihad (guerre religieuse) pour pouvoir édifier l’Etat escompté. Depuis 1992, la bande a entrepris de mener une série d’attentats contre des établissements de commerce, des centres touristiques au Liban-Nord. Plusieurs tentatives d’attaquer des boîtes de nuit dans cette région ou de tuer des personnes qu’ils considéraient comme étant «des débauchés» sont tombées à l’eau.
Ahmed Rifaï qui surveillait les mouvements de l’armée à Tripoli et encourageait l’assassinat de chrétiens, achetait ses armes et ses munitions à un armurier à Nahr el-Bared, Hajj Nasser Ismaël. C’est ce dernier qui a envoyé Fouad Zeyné, au début de l’année 1993, auprès d’Abou Mahjane. A partir de là, Zeyni a commencé à collaborer étroitement avec Abou Mahjane qui l’a chargé de rassembler des informations sur les mosquées, les hommes de religion, les sujets abordés dans les prêches et les responsables des Waqfs à Tripoli.
Durant ses entretiens avec Zeyné, Abou Mahjane montait ce dernier contre les Ahbache qu’il accusait de collaborer avec les Israéliens et «approfondissait» ses connaissances en matière de «Charia» (loi islamique) telle qu’il la voyait. C’est lui qui a encouragé Zeyné à abattre cheikh Taha Sabounji. Mais la tentative de meurtre, perpétrée le 14 septembre 1994 à Bkaasafrine, dans le caza de Denniyé, a échoué à cause d’un disfonctionnement du fusil mitrailleur de Zeyné.
Liquider
Nizar Halabi
Par la suite, influencé par les propos d’Abou Mahjane sur les Ahbache, Zeyné a décidé de liquider cheikh Nizar Halabi en déposant une charge électrique sous la tribune sur laquelle se tenait le leader des Ahbache pour prononcer son prêche du vendredi à la mosquée de Bourj Abi Haïdar. Il a envisagé de se cacher dans les toilettes de la mosquée jusqu’au départ de tout le monde puis de déposer tranquillement sous la tribune 100 kg de TNt qui seront reliés à un détonateur activé à distance. Zeyné a soumis son projet à Abou Mahjane qui l’a trouvé défaillant et a chargé ce dernier de rassembler des informations sur cheikh Taha Nagi et de lui faire un exposé sur tous les points où des embuscades pouvaient être tendues à Tripoli.
Trois mois plus tard, cheikh Nizar Halabi a été assassiné. Un mois et demi après, Abou Mahjane a demandé à Zeyné de liquider cheikh Taha Nagi. Zeyné a alors décidé avec la complicité de Saïd Chahhal et de Imad Ali, de tendre une embuscade au dignitaire sunnite près du domicile de ses beaux-parents où il avait l’habitude de se rendre dans le quartier d’Abi Samra. Mais la tentative d’assassinat a échoué parce que cheikh Nagi était resté jusque tard dans la nuit chez ses beaux-parents. Le trio n’était pas sûr de pouvoir l’atteindre dans l’obscurité et s’est vu contraint de remettre son projet à plus tard. Il n’aura pas le temps de récidiver parce que les forces de l’ordre avaient commencé à découvrir les caches d’armes et les auteurs des attentats.
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