« Nous avons constaté qu'ils ne s'accrochent plus au terrain. Désormais, leur stratégie semble être celle d'une constante mobilité », déclare à l'AFP le général Ernesto Gonzalez, commandant de l'armée de terre, lors d'un déplacement sur place, des propos qui font écho à ceux de ses homologues en Colombie. « Ils changent constamment de bases et pour cela, ils ont établi des corridors tout au long de la frontière. Ils ont des unités très mobiles, ce que l'on ne voyait plus depuis deux ans », poursuit le général. La plupart des bases détectées en Équateur sont proches des rives des fleuves, là où quelque 80 000 Colombiens, déplacés par le conflit ou des difficultés économiques, ont aussi élu domicile. Pour l'armée équatorienne, le choix de leur implantation n'est pas le fait du hasard et bien la preuve que les FARC ont repris la « guerre de guérilla » qui les caractérisait lors de leur fondation en 1964, quand ils privilégiaient les embuscades et la fuite, en se fondant dans la population civile.
Ces présomptions se confirment lorsqu'on constate que, le long de la frontière, la nature est peu propice à l'élevage ou à l'agriculture. « Que font alors les gens qui vivent là ? » s'interrogent des officiers en parcourant un campement démantelé. « Une des tactiques de la guérilla est d'avoir des collaborateurs - souvent contraints - qui vivent près du fleuve. Lorsque les troupes arrivent, ils déclenchent les scies électriques jusqu'à en "épuiser" les moteurs », explique le capitaine Marlon Luna. Le bruit des scies arrive jusqu'aux tréfonds de la jungle où se reposent les combattants, et les alerte.
Vers la fin des années 1990, les FARC comptaient entre 17 000 et 20 000 combattants et une capacité en armement qui, selon les experts, leur permettait de mener une guerre de mouvement, c'est-à-dire de conquête de territoires. Aujourd'hui, elles compteraient entre 7 000 et 10 000 combattants. « Elles sont revenues aux tactiques de la guérilla, évitant les combats car elles sont désavantagées », assure le général.
Pendant ce temps, l'armée équatorienne tente aussi d'adapter sa stratégie. Dans un centre d'entraînement à la frontière, des soldats miment les guérilleros. La barbe teinte, ils vocifèrent des consignes « rebelles » en tentant de se mettre dans la peau de l'ennemi. « La doctrine stipule que seul un guérillero peut vaincre un guérillero », affirme le général.
Hector VELASCO (AFP)