Le geste de colère du Premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan à Davos, après un accrochage verbal avec le président israélien Shimon Peres, lui a valu des félicitations du Hamas, des gros titres dans les médias du Moyen-Orient, et un accueil en héros dans son pays.
Lancé, lors d'un débat au Forum économique mondial (WEF), dans une plaidoirie en faveur de l'offensive menée par son pays dans la bande de Gaza, le président israélien a demandé à Erdogan, en élevant la voix et en le montrant du doigt, comment celui-ci réagirait si des roquettes s'abattaient chaque nuit sur Istanbul.
M. Erdogan, interrompu par le journaliste qui animait le débat alors qu'il répondait à M. Peres, a quitté avec fracas le forum de Davos en promettant de ne jamais y revenir, reprochant à l'animateur de ne pas le laisser parler. Le débat se déroulait en présence de Ban Ki-moon, secrétaire général de l'Onu, et d'Amr Moussa, secrétaire général de la Ligue arabe.
Plus tard, M. Peres a "regretté l'incident" lors d'une conversation téléphonique, a indiqué M. Erdogan à la presse, vendredi à son retour en Turquie. La présidence israélienne a en revanche catégoriquement démenti que M. Peres ait présenté des excuses à M. Erdogan comme l'affirmait l'agence turque Anatolie.
Le départ précipité de M. Erdogan, un fait rarissime dans l'enceinte très "select" du WEF, a été applaudi par le président Abdullah Gül. "Si on manque de respect à l'égard d'un Premier ministre turc, celui-ci ne va pas l'avaler. Il a fait le nécessaire", a déclaré M. Gül, cité par Anatolie.
"Nous sommes fiers de toi", ont scandé 3.000 militants du Parti de la justice et du développement (AKP), la formation de M. Erdogan, issue de la mouvance islamiste, qui avaient bravé le froid pour l'accueillir à l'aube vendredi à l'aéroport d'Istanbul.
Interrogé quant à l'impact du geste de M. Erdogan sur les relations turco-israéliennes, M. Gül s'est contenté de dire que la Turquie oeuvrait à la paix et la stabilité au Proche-Orient.
L'armée turque qui coopère étroitement avec l'Etat hébreu depuis la signature d'un accord en 1996, a évoqué vendredi les "intérêts" bilatéraux, laissant entendre que les liens ne seraient pas affectés.
Le mouvement islamiste Hamas qui contrôle la bande de Gaza a loué le geste de M. Erdogan. "Le Hamas rend hommage à la position courageuse du Premier ministre turc", a affirmé le porte-parole du Hamas Fawzi Barhoum dans un communiqué. Le journal Al-Khaleej des Emirats Arabes Unis a fait état de l'esclandre d'Erdogan en première page se réjouissant qu'il ait quitté Davos après "avoir dénoncé l'holocauste israélien à Gaza et défendu les Palestiniens".
En revanche, ce geste a suscité des critiques en Turquie où l'opposition reprochait déjà à M. Erdogan d'avoir apporté son appui au Hamas, au détriment du principal allié d'Ankara dans la région, Israël.
Très sensible à la cause musulmane, M. Erdogan avait fustigé quasi-quotidiennement l'opération de 22 jours d'Israël à Gaza qui a coûté la vie à plus de 1.330 Palestiniens.
"M. Erdogan a ruiné le prestige international de la Turquie. Soutenir la cause palestinienne est une chose mais soutenir le Hamas en est une autre" ,a commenté Onur ضymen, vice-président du principal parti d'opposition CHP.
M. Erdogan s'est justifié en disant: "je ne suis pas un chef de tribu, je suis le Premier ministre de la Turquie. J'ai fait ce que je devais faire".
L'opinion publique turque est coutumière des sorties inattendues de M. Erdogan, un politicien charismatique de 53 ans connu pour son franc-parler, arrivé au pouvoir en 2002 en Turquie, pays musulman mais laïc.
Lancé, lors d'un débat au Forum économique mondial...
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