
Photo qui circule sur les réseaux sociaux de l’armée protégeant les habitants qui rentraient dans leurs villages au Liban-Sud, dimanche 26 janvier 2025.
« Mon fils est toujours là-bas… Son corps gît depuis trois mois par terre, laissez-moi passer.
– C’est votre fils et c’est aussi mon frère… Essayez de comprendre, c’est dans votre seul intérêt que nous vous éloignons. »
Cette scène – entre une femme du Sud qui tentait, comme nombre d’habitants, de se frayer un passage vers les villages frontaliers encore occupés et un soldat libanais qui formait, avec ses camarades, un barrage humain pour les protéger – résume à elle seule la journée de ce dimanche. L’armée devait protéger les habitants du Sud des provocations du Hezbollah et de celles d’Israël. Et dans un contexte impossible, elle a tenu bon. Au grand dam du parti pro-iranien qui imaginait sans doute un tout autre scénario pour cette journée qui devait marquer le retour de la « résistance » au Liban-Sud.
« Il y aura un avant et un après 26 janvier », menaçait récemment Naïm Kassem. Mais alors pourquoi n’avons-nous pas vu les « résistants » traduire leurs paroles en actes face à l’occupant et ses violations continues de l’accord de cessez-le-feu ? En ce 26 janvier, tous les masques sont tombés. Ceux qui étaient là, ce sont les vrais résistants : les habitants du Sud et l’armée libanaise. Ceux qui ont osé braver le danger, ceux qui ont payé de leur vie… sur la route de la libération. Le Hezbollah, lui, a recouru à la seule arme qu’il peut encore manier, celle de se cacher derrière des civils prêts à mourir pour retrouver leur dignité. Et celle de rendre les autres – en l’occurrence l’armée libanaise – coupables de ses propres erreurs et projeter sur eux la responsabilité qu’il refuse d’assumer.
Le bilan de cette sournoiserie : 22 morts, dont au moins deux soldats, sous les balles israéliennes. Un triste bilan, certes. Mais cela aurait pu être bien pire. Car, disons les choses clairement, si un bain de sang a été évité dimanche, c’est parce que ni l’armée libanaise ni les habitants du Sud ne sont tombés dans le piège tendu par une partie prête à toutes les lâchetés pour ne pas avoir à affronter les conséquences de sa défaite.
Brandir quelques drapeaux jaunes sur les décombres, chanter des slogans creux et crier « victoire » ne changeront rien à la réalité. Le Hezbollah a commis une erreur monumentale en déclarant la guerre de « soutien » à Gaza il y a plus d’un an. Non seulement l’enclave palestinienne n’a pas été libérée, mais une parcelle du Liban-Sud a été de nouveau occupée. Après les accords de défaite signés d’abord au Liban et ensuite à Gaza, il ne reste au Hezbollah et au Hamas que mises en scène médiocres, étalage de muscles dégonflés et excès de populisme. « Notre peuple a réussi à faire échec aux équations que l’ennemi cherche à imposer », se félicitait dans la matinée Ali Fayad, député du Hezbollah. « Nous nous inclinons devant la grandeur du peuple de la résistance et assurons que l’équation « armée, peuple, résistance » qui protège le Liban n’est pas lettre morte », renchérissait la formation dans un communiqué « victorieux » en soirée.
Tout ce que le parti chiite essaie de faire, c’est redonner vie au fameux triptyque enterré le 26 novembre dernier, dans le but d’imposer de nouvelles équations sur la scène politique interne. Au pied du mur, il s’est lancé tout au long de la journée dans une campagne médiatisée bien étudiée se résumant à une seule idée : les habitants sont eux-mêmes retournés dans les villages et les ont libérés, ouvrant la voie à une armée incapable de le faire.
Or personne n’est dupe. L’armée avait d’ores et déjà entamé le long et difficile chantier de libération, peinant à mettre en œuvre un accord que le tandem chiite et le gouvernement qu’il parraine se sont retrouvés forcés d’avaliser – y compris les clauses bien cachées qui donnent à l’ennemi israélien le feu vert de poursuivre ses violations. Un accord que le Hezbollah n’a pas lui-même respecté.
Et si, au cours de cette journée, les Israéliens se sont vus contraints de se retirer d’autres villages, c’est parce que la troupe n’a pas jeté les habitants, seuls, dans la gueule du loup. Après les avoir appelés à la retenue et à faire confiance aux forces armées, le président Joseph Aoun – lui-même jusqu’à hier patron de la troupe – a d’ailleurs donné le ton dès les premières heures de cette longue journée. « L’armée libanaise sera toujours à vos côtés. Elle sera toujours là où que vous soyez et restera engagée dans votre protection. » Et en ce 26 janvier, le tableau était on ne peut plus limpide : les habitants du Sud ont quitté leurs villages à cause du Hezbollah et y sont retournés avec l’armée libanaise...
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