« Éviter à tout prix Beyrouth ». Telles étaient les « recommandations » des diplomates occidentaux, en particulier américains, à leurs homologues israéliens concernant la riposte à l’attaque attribuée au Hezbollah qui a tué samedi soir douze enfants et adolescents dans la ville druze de Majdel Chams, dans le Golan annexé. Par « Beyrouth », les diplomates faisaient référence à la banlieue sud, espace densément peuplé et fief du Hezbollah qui considère le ciblage de cette zone comme une « ligne rouge ».
Force est de constater qu’Israël ne l’a pas entendu de cette oreille. Un jet israélien a frappé mardi soir, peu avant 20 heures, le quartier de Haret Hreik qui se situe effectivement dans la banlieue sud de Beyrouth. La cible est éminemment symbolique et marque, en soi, une grave escalade dans la guerre que se livrent Israël et le Hezbollah depuis le 8 octobre dernier. C’est la seconde frappe contre la banlieue sud en près de dix mois après celle qui avait tué le numéro deux du Hamas, Saleh el-Arouri, en janvier dernier. Et à l’instar de la précédente, la frappe était extrêmement ciblée, dans le but d’assassiner une personnalité de premier plan mais également de faire le moins de dommages collatéraux possible.
Cette fois, c’est Fouad Chokor, l’un des principaux commandants militaires du Hezbollah, qui a été visé. Impliqué dans l’attentat contre les Marines en 1983 et à la tête du projet de missiles de précision du parti, il est à l’origine de l’attaque contre Majdel Chams d’après l’armée israélienne. Plus de quatre heures après l'opération, le Hezbollah n’avait toujours pas réagi. L’armée israélienne a pour sa part confirmé que le « bras droit » de Hassan Nasrallah était mort, alors que de nombreuses sources avaient affirmé durant la soirée qu’il avait survécu à l’attaque. Ultérieurement, une source proche du parti chiite a confirmé sa mort. Le long silence du Hezbollah s’explique probablement par le fait que Fouad Chokor avait dû être grièvement blessé mais aussi par la volonté du parti de gagner du temps afin de réfléchir à la nature de la riposte. Dans la matinée de mercredi, le Hezbollah n'avait pas encore confirmé sa mort ; il affirmait en revanche que Fouad Chokor se trouvait bien dans l'immeuble visé par la frappe.
Le fait que les Israéliens soient capables de cibler un gros calibre en pleine banlieue sud confirme leur supériorité sans équivoque en matière de renseignements. Le message, à ce niveau-là, est limpide : nous pouvons vous éliminer partout et à tout moment.
Ampleur de la riposte
C’est un coup très dur pour le parti chiite qui va être contraint de répondre. Cependant, de nombreuses personnalités de premier plan de l’ « axe de la résistance » ont été éliminées ces dernières années, à commencer par le général iranien Kassem Soleimani et l’ex-homme fort du Hezbollah, Imad Moghniyé, sans que cela ne déclenche une riposte de grande ampleur.
Mais le fait que la frappe ait eu lieu dans la banlieue sud change en partie l’équation. Le Hezbollah ne peut pas s’abstenir de riposter à une attaque contre son fief qui a fait au moins 6 morts, dont deux enfants, et 74 blessés (selon un bilan mis à jour le 31 juillet au soir, qui inclut le commandant du Hezbollah Fouad Chokor dont la mort a été confirmée, Ndlr). « S’ils visent Beyrouth, nous viserons Tel Aviv », ont prévenu ces derniers jours les cadres du Hezbollah sondés par les diplomates occidentaux.
Le Hezbollah va vouloir montrer les muscles et mener une opération d’un autre calibre que ce qu’il fait depuis des mois, mais probablement en deçà du seuil de ce qui conduirait inévitablement à une guerre totale.
Israël a tapé fort sans toutefois faire sauter toutes les digues. Mais est-ce que le Hezbollah le perçoit ainsi ? A quel point va-t-il être tenté d’aller loin dans sa riposte ? Encore une fois, et comme dans le cadre de l’escalade irano-israélienne en avril dernier, c’est le risque d’engrenage qui est ici le plus inquiétant. Le parti chiite pourrait être tenté d’utiliser ses missiles de précision contre une grande ville israélienne. En touchant des cibles symboliques sans faire de morts ? C’est probablement la seule façon d’éviter que l’escalade ne devienne incontrôlable.
Ya zalamé, à force de leçons on finira tous dakatras tofnisss...
04 h 54, le 01 août 2024