Son discours de près d’une heure était rythmé par les longues et nombreuses ovations des élus majoritairement républicains composant l’assemblée. Accueilli triomphalement par les deux chambres du Congrès américain réunies, Benjamin Netanyahu a profité de cette tribune pour rallier un soutien américain plus important et marquer des points auprès de sa population. Un succès pour le Premier ministre qui s’est exprimé pour la quatrième fois de sa vie devant le Congrès, soit le plus grand nombre d’allocutions prononcées par un dirigeant étranger dans l’histoire.
Le chef de l’exécutif a notamment défendu avec force la guerre menée depuis plus de neuf mois à Gaza. Repoussant une nouvelle fois les discussions sur le jour d’après, ce dernier s’est montré particulièrement évasif sur la question. Sa prise de parole a également été marquée par l’absence d’offre politique aux Palestiniens, alors qu’aucune mention n’a été faite de la solution à deux États. Si une grande partie de l’assistance l’a largement acclamé, une soixantaine d’élus démocrates ont boycotté le discours. Des milliers de manifestants défilaient en outre au moment même à Washington aux couleurs du drapeau palestinien, accusant le dirigeant israélien de commettre un « génocide » contre les Palestiniens. Voici les principaux points à retenir du discours de Benjamin Netanyahu.
• Accueil triomphant malgré un Congrès divisé
Pendant près d’une heure, Benjamin Netanyahu a été acclamé à des dizaines de reprises par des élus majoritairement républicains. Malgré tout, le Premier ministre israélien a tenu son discours devant un Congrès américain profondément divisé sur la guerre à Gaza. Une poignée de législateurs républicains ont boycotté l’allocution, à l’instar de Thomas Massie, représentant du Kentucky à la Chambre basse. JD Vance, sénateur de l’Ohio choisi par Donald Trump comme colistier en vue d’exercer la fonction de vice-président en cas de victoire du candidat républicain à l’élection présidentielle de novembre, était également absent sous prétexte de mener campagne. Dans les rangs démocrates, une soixantaine d’élus ne se sont pas présentés en guise de protestation contre le Premier ministre israélien, tandis que la vice-présidente américaine et présidente du Sénat Kamala Harris – devenue candidate au scrutin présidentiel après le retrait de Joe Biden de la course à la Maison-Blanche – avait auparavant indiqué qu’elle serait en déplacement dans l’Indiana. Présente dans l’assemblée avec un keffieh, l’unique élue américaine d’origine palestinienne au Congrès, Rashida Tlaib, a brandi lors du discours une pancarte sur laquelle était écrit « coupable de génocide » d’un côté et « criminel de guerre » de l’autre.
• Remerciement à Joe Biden et Donald Trump
Dans cette période incertaine pour l’avenir politique des États-Unis, Benjamin Netanyahu, soucieux de récolter un soutien américain bipartisan, s’est gardé de défier le président démocrate Joe Biden, avec qui les relations se sont nettement détériorées depuis le début de la guerre à Gaza. Le Premier ministre israélien a ainsi remercié le dirigeant des États-Unis avec qui il doit s’entretenir jeudi pour « ses efforts acharnés en faveur des otages ». Mais il a également tenu « à remercier le président Trump pour tout ce qu’il a fait pour Israël », dénonçant la tentative d’assassinat « ignoble » qui a récemment visé le milliardaire républicain, les deux hommes devant se rencontrer vendredi. Tandis que son discours visait essentiellement à solidifier l’alliance unissant Washington à son plus proche allié régional, le chef de l’exécutif a soutenu que la « victoire d’Israël » sera aussi celle des États-Unis, insistant sur la nécessité que les deux pays restent « unis ».
• Guerre existentielle
Benjamin Netanyahu a ainsi présenté la guerre menée à Gaza comme « existentielle » pour son pays, mais aussi pour son allié. Inscrivant celle-ci dans le cadre d’un conflit plus large entre l’Iran et les États-Unis, le Premier ministre a déclaré qu’il ne s’agissait pas d’« un choc des civilisations », mais d’« un choc entre la barbarie et la civilisation », « entre ceux qui glorifient la mort et ceux qui sanctifient la vie ». Le chef de l’exécutif a adressé de virulentes critiques contre l’Iran, qui cherche selon lui à imposer « l’islam radical » au monde et considère les États-Unis comme son plus grand ennemi parce qu’ils sont « les gardiens de la civilisation occidentale et la plus grande puissance du monde ». Il a également appelé à une « alliance d’Abraham » militaire avec les États arabes « modérés » contre Téhéran, en référence aux accords de normalisation signés entre Israël et plusieurs pays de la région dès 2020. Benjamin Netanyahu a également accusé les protestataires présents à Washington d’être « officiellement devenus les idiots utiles de l’Iran ».
• Guerre encore longue à Gaza
Alors que Benjamin Netanyahu a réitéré ses objectifs de guerre à Gaza – parmi lesquels la défaite du Hamas –, tout porte à croire que celle-ci va encore durer et que le Premier ministre n’est pas pressé d’arracher un accord de libération des otages dans l’enclave palestinienne et de cessez-le-feu poussé par les États-Unis. Le chef du cabinet israélien a affirmé que la guerre prendrait fin demain si le Hamas se rendait, se désarmait et restituait la totalité des otages retenus dans l’enclave. « S’il ne le fait pas, Israël se battra jusqu’à ce que nous détruisions les capacités militaires du Hamas et son pouvoir à Gaza et que nous ramenions tous nos otages à la maison », a-t-il déclaré.
Benjamin Netanyahu a également avancé qu’« une nouvelle Gaza pourrait voir le jour » si la langue de terre était « démilitarisée et déradicalisée ». Ce dernier a notamment fait le parallèle avec l’approche de la démilitarisation et de la déradicalisation utilisée en Allemagne et au Japon après la Seconde Guerre mondiale. « Cela a conduit à des décennies de paix, de prospérité et de sécurité », a-t-il ajouté. Restant évasif sur les plans pour le jour d’après à Gaza, le Premier ministre a évoqué l’appui à cette fin d’une « administration civile dirigée par des Palestiniens qui ne cherchent pas à détruire Israël », tout en précisant que Tel-Aviv « ne cherchait pas à “réoccuper” Gaza ». « Dans un avenir proche, nous devrons y maintenir un contrôle de sécurité prépondérant afin d’empêcher la résurgence de la violence et de faire en sorte que Gaza ne constitue plus jamais une menace pour Israël », a-t-il poursuivi.
• Défense d’Israël avant tout
Face aux critiques de l’armée et à la polarisation de la société israélienne, Benjamin Netanyahu a tenu à souligner l’unité à défendre le pays, en présentant notamment un militaire d’origine éthiopienne et un soldat bédouin musulman qui l’accompagnaient.
Visé depuis fin mai par une demande de la Cour pénale internationale (CPI) d’un mandat d’arrêt contre lui et son ministre de la Défense, Yoav Gallant, pour « crimes de guerre » et « crimes contre l’humanité », le Premier ministre a également tenu à se défendre contre ces accusations et contre les ordonnances émises par la Cour internationale de justice (CIJ) relatives à la conduite de la guerre à Gaza. « Le procureur de la Cour pénale internationale a honteusement accusé Israël d’affamer délibérément la population de Gaza. C’est un non-sens total. Il s’agit d’une fabrication pure et simple », s’est justifié le Premier ministre. Selon une analyse réalisée en avril par l’ONG Oxfam, sur la base de données des Nations unies, les habitants du nord de Gaza survivaient avec seulement 245 calories par jour, bien en deçà des recommandations. « Malgré tous les mensonges que vous avez entendus, la guerre à Gaza présente l’un des plus faibles taux de pertes entre combattants et non-combattants de l’histoire des guerres urbaines », a également plaidé le chef de l’exécutif israélien, alors que près de 40 000 Gazaouis ont été tués depuis octobre selon le ministère de la Santé de l’enclave, le Hamas n’opérant pas de distinction entre civils et combattants.
"… son discours visait essentiellement à solidifier l’alliance unissant Washington à son plus proche allié régional …" - Le jour où les États-Unis se rendront compte que sans Israel, ils auraient eu 22 alliés proches au Moyen-Orient (sans compter l’Iran), ça va faire mal, très mal…
13 h 49, le 26 juillet 2024