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Moyen-Orient - AVIATION

L’Arabie saoudite veut aussi sa part du marché dans les cieux du Golfe

Une nouvelle compagnie aérienne et une commande massive d’avions devraient placer le royaume wahhabite en position de concurrencer ses voisins pour devenir un hub régional.

L’Arabie saoudite veut aussi sa part du marché dans les cieux du Golfe

Un Boeing 787 Dreamliner en production en Caroline du Sud, aux États-Unis. Logan Cyrus/Archives AFP

Riyad s’est lancé dans une stratégie aérienne agressive pour conquérir des parts d’un marché déjà dominé par d’autres poids lourds du Golfe en annonçant coup sur coup le lancement d’une seconde compagnie aérienne et une grosse commande d’avions. Ce projet s’inscrit dans la volonté du royaume pétrolier de devenir une destination d’affaires et de tourisme, bien que le pari soit loin d’être gagné, estiment des analystes.

Le nouveau transporteur de la capitale, Riyadh Air, a été officiellement dévoilé début mars par le prince héritier et dirigeant de facto du pays Mohammad ben Salmane. Deux jours plus tard, les autorités ont annoncé une commande de 78 Boeing 787 Dreamliner pour préparer le lancement de ses premiers vols début 2025 et étoffer la flotte de la compagnie nationale existante, Saudia, basée à Djeddah. L’accord, évalué à environ 37 milliards de dollars par la

Maison-Blanche, pourrait porter sur 121 appareils avec les options. Il est le cinquième le plus important de l’histoire de Boeing en termes de valeur.

Selon le PDG de Riyadh Air Tony Douglas, le nouveau transporteur desservira les marchés international, régional et national, entrant ainsi en concurrence avec les poids lourds du Golfe, Emirates et Qatar Airways. Riyadh Air devra toutefois conquérir des parts de marché à un moment où les options de vols long-courriers directs, contournant le Moyen-Orient, se multiplient, souligne Alex Macheras, spécialiste du secteur de l’aviation. « Reproduire et développer les modèles réussis des compagnies aériennes voisines sera difficile sur un marché encombré où les passagers n’ont que l’embarras du choix », estime-t-il.

De Djeddah à Riyad

Saudia, ou Saudi Arabian Airlines, a été fondée en 1945 et a reçu son premier avion à réaction en cadeau du président américain Franklin Roosevelt. À l’époque, les étrangers passaient par Djeddah, plutôt que par Riyad, pour entrer dans le pays. La ville, située sur la mer Rouge, accueille chaque année des millions de musulmans effectuant les pèlerinages à La Mecque. Ce n’est que dans les années 1980 que les ambassades étrangères ne se sont installées dans la capitale, dans le centre de l’Arabie. Les autorités cherchent désormais à positionner Riyad comme un rival du centre d’affaires du Golfe, Dubaï, dans le cadre du vaste programme de réformes mené par le prince héritier pour réduire la dépendance du royaume à l’or noir.

Le nouvel aéroport de la ville, dont la construction a été annoncée en novembre dernier, vise à accueillir 120 millions de passagers par an d’ici à 2030, contre environ 35 millions actuellement.

« Djeddah a besoin, à elle seule, d’une compagnie aérienne pour se focaliser » sur les pèlerinages. « Il fallait donc une compagnie axée sur Riyad », a affirmé le ministre saoudien des Finances Mohammad al-Jadaan. Pour Robert Mogielnicki, de l’Arab Gulf States Institute à Washington, les autorités partent sans doute du principe que « si l’ont construit, les gens viendront ». « Le côté demande de l’équation reste encore à déterminer, mais les Saoudiens doivent être assez confiants pour passer une commande d’avions aussi massive », ajoute-t-il.

Outre Riyad, NEOM, une ville futuriste en cours de construction dans le royaume, aura également son propre transporteur. NEOM Airlines « sera opérationnelle à la fin de 2024 », a écrit récemment son PDG Klaus Goersch, estimant que cette ville de 500 milliards de dollars pourrait elle aussi devenir « une plaque tournante de l’aviation mondiale ».

Un nouveau géant

Bien placés pour desservir l’Europe, l’Asie et l’Afrique, les aéroports du Moyen-Orient devraient voir leur trafic passer de 405 millions de passagers en 2019 à 1,1 milliard d’ici à 2040, selon les prévisions de l’association Airports Council International. Avec une population de 35 millions d’habitants, l’Arabie saoudite a l’avantage, par rapport aux petits États voisins du Golfe, de pouvoir compter sur un important marché domestique. Mais les long-courriers commandés à Boeing suggèrent que la nouvelle compagnie veut se positionner comme un « hub de transport pour le transit », souligne M. Macheras.

« Riyadh Air va certainement grignoter une partie des parts de marché dans la région, notamment sur les marchés asiatiques », affirme un responsable de la concurrente Qatar Airways, qui a requis l’anonymat car il n’est pas autorisé à parler à la presse. « Nous sommes prêts à affronter un futur géant », a-t-il ajouté.

Le meilleur atout de Riyadh Air est sans doute son propriétaire. Le très riche fonds souverain saoudien sera en mesure d’amortir « la première phase qui sera inévitablement intensive en capital », selon Alex Macheras. Les autorités considèrent visiblement « qu’il y a encore de la place sur la table, affirme-t-il. Ne serait-ce que pour montrer au reste du monde que l’Arabie saoudite est ouverte aux affaires. »

Robbie COREY-BOULET et

Haitham EL-TABEI/AFP

Riyad s’est lancé dans une stratégie aérienne agressive pour conquérir des parts d’un marché déjà dominé par d’autres poids lourds du Golfe en annonçant coup sur coup le lancement d’une seconde compagnie aérienne et une grosse commande d’avions. Ce projet s’inscrit dans la volonté du royaume pétrolier de devenir une destination d’affaires et de tourisme, bien que le pari...

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