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Monde - REPORTAGE

Le retour en Ukraine d’enfants enlevés par la Russie

Sujet du mandat d’arrêt de la CPI contre Vladimir Poutine, le « crime de guerre de déportation illégale » est nié par Moscou.

Le retour en Ukraine d’enfants enlevés par la Russie

Taya Volynska, 15 ans, sort d'un bus qui la ramène auprès de sa famille, à Kiev, le 22 mars 2023. Sergei Chuzavkov/AFP

À la sortie d’un bus à Kiev, un petit garçon de 10 ans saute dans les bras de son père. Il fait partie d’un groupe de 17 enfants revenus, grâce à une ONG, de leur « déportation » en Russie ou des territoires ukrainiens occupés. Denys Zaporojtchenko n’avait pas vu son fils, ainsi que ses deux filles également dans le bus, depuis six mois et demi. Tous habitaient ensemble à Kherson, dans le sud occupé de l’Ukraine lorsqu’ils ont été séparés le 7 octobre, un mois avant la reconquête de la ville par les forces ukrainiennes, raconte-t-il.

Alors que des combats terribles s’annonçaient à Kherson avec la contre-offensive ukrainienne, M. Zaporojtchenko affirme avoir accepté d’envoyer ses enfants loin de la guerre en « camp de vacances » plus au sud, en Crimée annexée. Les responsables russes de l’école où étaient scolarisés ses enfants « avaient promis de les envoyer pour une semaine ou deux dans ce camp », poursuit-il. « Mais quand on a réalisé qu’il n’aurait pas fallu faire ça, c’était trop tard. » Il précise avoir pu échanger avec ses trois enfants par téléphone pendant ces longs mois de séparation.

Pour l’Ukraine, ces enfants, comme quelque 16 000 autres au moins, ont été « enlevés » par les Russes. Moscou dément, s’auréole de les avoir « sauvés » de la guerre et d’avoir mis en place des procédures pour les réunir avec leurs familles. La Cour pénale internationale (CPI) a, elle, émis la semaine dernière un mandat d’arrêt historique contre Vladimir Poutine, en estimant qu’il était présumé responsable du « crime de guerre de déportation illégale » de mineurs.

Lavage de cerveaux

Myroslava Khartchenko, juriste pour l’ONG Save Ukraine, qui a organisé le rapatriement des 17 enfants, affirme que les autorités russes ont utilisé « l’intimidation, la manipulation et le chantage » pour s’emparer des bambins. « Ils disent (aux parents) qu’ils ont une heure pour réfléchir et que si les Ukrainiens arrivent, ils amèneront des mercenaires américains qui “vous frapperont et vous violeront et que c’est votre unique chance de sauver vos enfants”. »

L’ONG répond, elle, aux demandes de parents désespérés qui n’ont pas réussi à récupérer leurs enfants, face au refus de l’administration russe. Sans l’aide d’organisations gouvernementales ou internationales, faute d’accord diplomatique entre Kiev et Moscou, l’ONG doit se plier à des procédures administratives mises en place par les Russes pour chaque rapatriement. Pour la première fois, l’association a réussi à organiser un retour groupé en Ukraine. Elle a affrété un bus, en emmenant à bord certaines des mères, faisant un très long détour via la Pologne, la Biélorussie, la Russie puis la Crimée, faute d’avoir eu l’autorisation de franchir la ligne de front dans le Sud ukrainien.

Plusieurs enfants disent ne pas avoir subi de mauvais traitements, mais racontent une forme d’éducation politique pour les convertir au discours du Kremlin. « Si tu ne chantais pas l’hymne national (russe), ils t’obligeaient à écrire des notes explicatives. Et au Nouvel An, ils nous ont montré (le discours de) Poutine », raconte Taïssia Volynska, 15 ans, originaire de Kherson. Yana Zaporojtchenko, la fillette de 11 ans de Denys, dit qu’il y avait « beaucoup » d’inspections de responsables russes dans son camp. « Ils nous demandaient de chanter et de danser quand il y avait des inspections », indique la jeune fille.

Inessa Vertoch, 43 ans, qui a attendu son fils « jour après jour », dit l’avoir retrouvé « plus sérieux ». « Il me regarde et me dit “Maman, je ne veux pas te raconter, tu ne dormirais plus la nuit”. » Myroslava Khartchenko, de Save Ukraine, assure que des psychologues prendront en charge chacun de ces enfants. Et elle insiste auprès des parents pour qu’ils ne retournent pas vivre dans « des zones dangereuses ».

Daria ANDRIIEVSKA/AFP

Kiev veut passer « très bientôt » à l’offensive à Bakhmout

Notant la fatigue des troupes russes et des mercenaires du groupe Wagner mobilisés en masse à Bakhmout, épicentre des combats dans l’Est, le commandant ukrainien des forces terrestres, Oleksandre Syrsky, a affirmé hier qu’elles tireraient « très bientôt » parti de cette opportunité, sans donner de détails sur le calendrier d’une telle contre-offensive. Le soir, l’armée ukrainienne affirmait que les troupes russes s’étaient retirées de la ville de Nova Kakhovka, située de l’autre côté du Dniepr, dans la région de Kherson, au sud de l’Ukraine. Une information invérifiable de source indépendante immédiatement. Le président ukrainien Volodymyr Zelensky s’est rendu le même jour près du front dans cette région, partiellement occupée par la Russie, qui en a revendiqué l’annexion en septembre 2022. De retour de Kherson, il a demandé aux dirigeants européens l’adoption de nouvelles sanctions contre la Russie et mis en garde contre le refus de fournir à ses forces des missiles à longue portée et des avions de combat modernes.

À la sortie d’un bus à Kiev, un petit garçon de 10 ans saute dans les bras de son père. Il fait partie d’un groupe de 17 enfants revenus, grâce à une ONG, de leur « déportation » en Russie ou des territoires ukrainiens occupés. Denys Zaporojtchenko n’avait pas vu son fils, ainsi que ses deux filles également dans le bus, depuis six mois et demi. Tous habitaient ensemble...

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