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Lifestyle - Mode

L’automne-hiver 2023-2024 de Dior, un hommage aux années 1950

L’automne-hiver 2023-2024 de Dior, un hommage aux années 1950

La finale du défilé automne-hiver de Dior. Photo DR

En temps de guerre et de crise, interrogeons l’histoire. La maison Christian Dior porte ces souffrances dans son ADN. Catherine, la sœur cadette de Monsieur Dior, engagée dans la Résistance, a été déportée et torturée à Drancy et à Ravensbrück dont elle a été libérée un an plus tard, en 1945, dans un état que l’on peut imaginer. Là n’est pas tout à fait le propos de la nouvelle collection de Maria Grazia Chiuri pour la maison qui a connu son heure de gloire en 1947, dans l’immédiat après-guerre, grâce à la volonté de son fondateur de ramener la légèreté et la joie de vivre dans un monde plombé par les malheurs.

La collection Dior de la prochaine saison froide est surtout un hommage à trois Parisiennes qui incarnent l’élégance à la française, à la fois morale et vestimentaire : Catherine Dior, Juliette Gréco et Édith Piaf. Trois grandes âmes qui ont connu la souffrance et la misère avant de devenir, sous la lumière, des icones quasi universelles. Leurs années sont celles de l’existentialisme, d’une réflexion révolutionnaire issue de l’un des plus grands traumatismes de l’histoire que fut la Seconde Guerre mondiale, sur la place et le rôle de l’humain dans l’univers. C’est leur époque de pénuries et de restrictions, mais aussi de courage et de détermination, que ramènent ces jupes cloche au jarret, ou corolle, le modèle signature de Dior, ces vestes courtes, inspirées de la coupe Bar (inventée par Christian Dior pour permettre aux femmes de s’installer sur les chaises hautes des bars), tissus froissés, pied-de-coq et domination du noir et blanc notamment à travers des babies contrastées à talon oblique.

Comment passer à côté du somptueux décor du défilé donné sous une tente au jardin des Tuileries ? Photo DR

Chaque collection est pour Maria Grazia Chiuri l’occasion d’explorer le rôle et l’essence du vêtement dans sa relation au(x) corps et à la mode. La relecture des années 1950, au cœur de cette ligne Dior prêt-à-porter automne-hiver 2023-2024, lui permet une nouvelle fois de célébrer l’histoire de Dior et d’approfondir le style français autour des trois personnalités extraordinaires que furent Catherine Dior, Édith Piaf et Juliette Gréco. Ce que la directrice artistique de la maison met en avant est d’abord l’esprit d’indépendance ayant guidé leurs choix et leur contribution à contredire les stéréotypes féminins de leur époque. « Pour Catherine Dior, cela se fait par son désir de cultiver, vendre des fleurs comme message d’espoir. Pour Édith Piaf et Juliette Gréco, c’est par leur voix et leur présence scénique absolue », souligne le manifeste. Leur garde-robe telle que nous la montre leur iconographie incarne l’âme de Paris telle qu’elle flotte encore dans l’imaginaire collectif et les fantasmes des années existentialistes des caves de Saint-Germain, du jazz, de la bande à Sartre-Beauvoir et des deux cafés mythiques que sont restés Le Flore et les Deux Magots. C’est une époque où le texte, poésie et littérature, mais aussi la musique, qui le rend inoubliable en le véhiculant de l’élitisme intellectuel aux milieux populaires, a une place de choix dans le quotidien. « L’expérience du vêtement est l’incarnation tactile d’une forme, une façon d’appréhender le monde », ajoute le manifeste de la collection.

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Cette collection Dior devient l’empreinte d’une féminité à contre-courant. Rebelle. Forte et fragile. Les motifs floraux choisis par Monsieur Dior ont été réinterprétés : la texture du chiné est entrelacée d’un fil métallique qui rend le tissu comme vivant, modelable, et gomme les contours, obtenant un effet abstrait. Les couleurs primaires occupent le devant de la scène : rubis, émeraude, jaune topaze, bleu. Les étoffes écossaises aux nuances délicates investissent les manteaux ainsi que les vestes et les jupes droites (qui peuvent également être portées sous de larges manteaux). La popeline est tissée, elle aussi, avec un fil métallique. Les broderies composent de petits jaillissements de lumière. Célébrant l’image kaléidoscopique d’une féminité dessinée par des icônes puissantes, habitées de conscience, ces créations suggèrent des parcours émotionnels aux nouvelles générations de femmes qui ébauchent notre avenir.

Comment, enfin, passer à côté du somptueux décor du défilé donné sous une tente au jardin des Tuileries? Cette installation géante de l’artiste contemporaine Joana Vasconcelos, exprimée en forme de montgolfières lumineuses inversées, composées d’un assemblage de tissus de la maison, représente des îles de la Baltique flottant dans la lumière bleue des nuits sans fin du Grand Nord. Demeures des walkyries, femmes guerrières de la mythologie nordique, elles offraient avec leur poésie l’arrière-plan parfait pour une nouvelle ère de combats où le vêtement reprend sa place d’armure.

En temps de guerre et de crise, interrogeons l’histoire. La maison Christian Dior porte ces souffrances dans son ADN. Catherine, la sœur cadette de Monsieur Dior, engagée dans la Résistance, a été déportée et torturée à Drancy et à Ravensbrück dont elle a été libérée un an plus tard, en 1945, dans un état que l’on peut imaginer. Là n’est pas tout à fait le propos de la...

commentaires (1)

Ce sont ces articles sur la mode, sur Dior précisément, qui me permettent de m’évader, de changer d’atmosphère pendant cette dure période de calamité de toute sorte. Oui Dior est un génie, et sa "veste-bar" donne à la femme plus d’allure et de féminité (je vous cite : ""pour permettre aux femmes de s’installer sur les chaises hautes des bars"" et être à la même hauteur, à égalité de taille qu’un homme, contrairement à tous les commentaires par le passé sur cette création. Comble de l’horreur, cette veste par goût de commodité est portée avec un jeans, le vêtement passe-partout. Chaque collection Dior ""est l’empreinte d’une féminité à contre-courant"". Un livre récent (au prix exorbitant, mais qui aime les beaux ouvrages, ne compte pas), de Sarah Moon sur Dior. Bon, la photographe Sarah Moon, même sur Dior, fait du Sarah Moon, avec des photos qui rappellent le dessin au fusain, et reprend dans son livre une citation du couturier extraite de sa conférence à la Sorbonne en 1955 : ""une robe –surtout si elle est bien portée – est plus éloquente qu’un couturier"". Tout est dit. Mais qu’elle est belle une femme en Dior !

Nabil

02 h 10, le 13 mars 2023

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Commentaires (1)

  • Ce sont ces articles sur la mode, sur Dior précisément, qui me permettent de m’évader, de changer d’atmosphère pendant cette dure période de calamité de toute sorte. Oui Dior est un génie, et sa "veste-bar" donne à la femme plus d’allure et de féminité (je vous cite : ""pour permettre aux femmes de s’installer sur les chaises hautes des bars"" et être à la même hauteur, à égalité de taille qu’un homme, contrairement à tous les commentaires par le passé sur cette création. Comble de l’horreur, cette veste par goût de commodité est portée avec un jeans, le vêtement passe-partout. Chaque collection Dior ""est l’empreinte d’une féminité à contre-courant"". Un livre récent (au prix exorbitant, mais qui aime les beaux ouvrages, ne compte pas), de Sarah Moon sur Dior. Bon, la photographe Sarah Moon, même sur Dior, fait du Sarah Moon, avec des photos qui rappellent le dessin au fusain, et reprend dans son livre une citation du couturier extraite de sa conférence à la Sorbonne en 1955 : ""une robe –surtout si elle est bien portée – est plus éloquente qu’un couturier"". Tout est dit. Mais qu’elle est belle une femme en Dior !

    Nabil

    02 h 10, le 13 mars 2023

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