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Nos Lecteurs ont la Parole

Accueillir le surgissement de l’imprévisible

Nous avons, pour la plupart d’entre nous, une tendance vivace et parfois tenace à anticiper, et de préférence à vouloir maîtriser ce qui peut surgir de l’immédiat ou du futur proche et lointain. Non que nous soyons en permanence sur le qui-vive ou sur la défensive, mais cela nous rassure, semble-t-il, de prévoir et aussi de contrôler ou de tenter d’espérer exercer une influence sur le surgissement de l’imprévisible, pour le mettre éventuellement à notre service. Il y a une accélération de plus en plus grande du temps, due à un éparpillement, à une sollicitation de notre attention qui nous décentre et parfois nous égare.

Les comportements consommatoires laissent peu de place à un espace de rêve ou d’accueil dans lequel viendrait se loger l’inattendu ou se bercer la part de mystère qui est au cœur de toute vie. Car les planifications, les programmations et les organisations de toute sorte empêchent l’improvisation et limitent considérablement l’accueil de l’imprévisible.

Nous passons trop souvent à côté des petits miracles du quotidien. Il semble que nous ayons de moins en moins de temps pour nous arrêter, accueillir, accompagner un événement, amplifier une rencontre qui aurait pu se révéler à nous plus riche, plus chargée de possibles et de découvertes, et transformer notre regard ou notre relation au monde.

L’histoire de l’humanité peut s’entendre comme la tentative, pathétique et souvent couronnée de succès, de l’homme à exercer un pouvoir sur son environnement, pour le modifier, le soumettre à ses besoins ou à ses pulsions ! C’est ainsi que s’est développé au cours des siècles, sur la quasi-totalité de la planète, un ensemble de relations à base d’exploitation et de prédation non exemptes de violence, d’injustice et d’abus ! Alors, la plupart des nations s’arment, se perdent dans la corruption, violentent les individus, détériorent les ressources naturelles et se structurent en dictatures qui se reproduisent d’un coup d’État à un autre.

Nous constatons cependant qu’au-delà de l’emprise politique, des comportements et conditionnements socio-culturels bien établis, il existe des démarches originales, des engagements et des choix de vie plus souples, plus conviviaux, plus respectueux envers la nature et envers autrui. Il existe de plus en plus de femmes et d’hommes qui ont le souci de prendre en charge la qualité de leur existence, et cela bien au-delà de la culture du moi (qui paraît à certains porteuse de trop d’égocentrisme ou de narcissisme). Culture non de l’ego mais d’une affirmation, d’une responsabilisation qui s’est développée dans les dernières décennies. Un mouvement profond pour tenter de se réapproprier un pouvoir de vie, une autonomie plus grande pour répondre, par soi-même, à ses propres besoins relationnels.

Ainsi l’abandon, le lâcher-prise, une plus grande liberté que certains recherchent, peuvent être assimilés à un renoncement du contrôle et par là même à une diminution des contraintes sur eux-mêmes et sur leurs proches. Ce n’est plus la maîtrise du futur immédiat qui est recherchée, mais une plus vaste conscientisation de l’instant. Une manière d’entrer dans le mouvement de la vie au présent, de l’accompagner en respectant son rythme et ses ressources.

Accueillir l’imprévisible suppose une double disponibilité vis-à-vis de nous-mêmes et vis-à-vis d’autrui.

Vis-à-vis de nous-mêmes, quand nous ne cultivons pas l’autoprivation, quand nous sommes bien ancrés dans le présent, quand chacun de nos actes est en cohérence avec nos ressentis et nos valeurs, quand nos énergies ne sont pas mobilisées à gérer des situations agressives du présent.

Vis-à-vis d’autrui, pour accepter de nous confronter à lui, sans chercher à le nier ou à le réduire, pour nous laisser éventuellement influencer pour agrandir notre propre champ d’action, pour mieux exister dans notre différence.

Cela suppose aussi un bon ancrage et une capacité à se faire confiance. C’est par la confrontation que peut naître le surgissement d’une créativité et d’une liberté d’être qui n’avait pas pu être envisagée jusque-là et qui va nous étonner et nous transformer.

Comment un miracle peut-il arriver ? En sachant l’accueillir.

Les textes publiés dans le cadre de la rubrique « Courrier » n’engagent que leurs auteurs. Dans cet espace, « L’Orient-Le Jour » offre à ses lecteurs l’opportunité d’exprimer leurs idées, leurs commentaires et leurs réflexions sur divers sujets, à condition que les propos ne soient ni diffamatoires, ni injurieux, ni racistes.

Nous avons, pour la plupart d’entre nous, une tendance vivace et parfois tenace à anticiper, et de préférence à vouloir maîtriser ce qui peut surgir de l’immédiat ou du futur proche et lointain. Non que nous soyons en permanence sur le qui-vive ou sur la défensive, mais cela nous rassure, semble-t-il, de prévoir et aussi de contrôler ou de tenter d’espérer exercer une influence...

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