Report du passage à la « dollarisation » dans les supermarchés, annoncent Salam et la CGTL

Comme annoncé vendredi, le ministre sortant de l’Économie et du Commerce Amine Salam s’est réuni lundi avec une délégation de la Confédération générale des travailleurs libanais (CGTL), présidée par Béchara Asmar, afin de discuter de sa récente proposition de passer à la tarification des marchandises en dollars dans les supermarchés.

Une décision contre laquelle Béchara Asmar s’était déjà positionné dans un communiqué dimanche soir, la jugeant « hâtive » et « irréfléchie », en affirmant qu’elle ne peut être appliquée compte tenu de « la fluctuation du taux de change, qui monte et descend souvent plusieurs fois par jour, par heure, voire par minute », dans un Liban en crise depuis plus trois ans. Selon les propos tenus par les deux parties lors d’une conférence de presse à l’issue de la réunion, la décision de dollariser les prix dans les supermarchés a pour le moment été reportée en attendant de résoudre les problèmes liés à son application évoqués par la CGTL.

Au-delà des considérations quant à la « protection du consommateur », Béchara Asmar a souligné la question du paiement de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA). « Le commerçant facturera la TVA au consommateur au taux du marché parallèle (autour de 63 000 livres libanaises lundi, NDLR) mais déclarera cette taxe au ministère des Finances à son taux officiel de 15 000 livres », selon lui. Le président de la CGTL a également mis en relief le fait qu’une « dollarisation des produits de base » entraînera celle « de toutes les autres commodités », comme les carburants, « alors que les salaires du secteur public sont, eux, toujours calculés à un taux de 1 507,5 livres », soit l’ancienne parité officielle entre la livre et le dollar modifiée par la Banque du Liban à 15 000 livres mercredi dernier.

Techniquement, dans le budget 2022 voté en septembre dernier, l’État a multiplié par trois les salaires initiaux des fonctionnaires, qui étaient toujours calculés sur base d’un dollar à 1 507,5 livres. Même s’ils peuvent retirer ces montants en dollars au taux de la plateforme de change de la BDL Sayrafa (conformément au mécanisme de la circulaire n° 161), celui-ci reste inférieur à celui du marché (42 000 livres ces derniers jours), et le montant reçu ne suffit évidemment pas à combler le déficit retenu sur le niveau de vie en raison de l’aggravation de la dépréciation de la monnaie nationale et de l’inflation liée à la crise.

Par ailleurs, Béchara Asmar a reporté lundi la grève générale prévue mercredi pour protester contre la détérioration continue de la qualité de vie des travailleurs. Le mouvement a été reporté d’une semaine « en raison du mauvais temps et de la sensibilité des citoyens au tremblement de terre qui a frappé le Liban » dans la nuit de dimanche à lundi. La tempête hivernale qui frappe actuellement le Liban continue en effet de provoquer des dégâts et de ralentir la circulation dans tout le pays en raison des inondations sur les axes routiers, alors que les habitants du pays ont été réveillés à l’aube lundi matin par les secousses d’un énorme tremblement de terre qui a frappé le sud de la Turquie et fait des milliers de victimes dans ce pays et en Syrie.