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À la solennelle National Portrait Gallery, place à l’intime

Les grands du monde et les célébrités ont traditionnellement leur place au musée, mais elle ne leur est plus exclusivement réservée. La National Portrait Gallery à Washington s’ouvre à un nouveau regard.

À la solennelle National Portrait Gallery, place à l’intime

Scènes de la vie quotidienne. Photo National Portrait Gallery

Comme toute galerie de portraits, la National Portrait Gallery à Washington n’a jamais failli à sa mission, accueillant au gré des années les visages historiques du pays. Pour elle, aujourd’hui, décrire le pays c’est également dessiner un tissu social basé sur les relations humaines, en particulier familiales. Pour preuve l’exposition qu’elle présente jusqu’au 7 janvier 2024, sous l’intitulé Kinship (Parenté). Ici, le narcissisme, de même que le fameux cri d’André Gide, Famille je vous hais, ont été bannis du vocabulaire pictural. Le portrait solennel a fait place à une ambiance plus intime.

La vie simple élevée au rang de galerie de portraits. Photo National Portrait Gallery

Huit artistes ont traversé les murs des cadres familiaux et pénétré dans leur huis clos afin d’explorer la complexité des relations personnelles, tant au sein des unités parentales qu’à l’extérieur. Cette nouvelle approche comprend des peintures, photographies, sculptures, vidéos et performances. La présentation met en lumière les travaux récents, à ce sujet, et à travers une sélection de plus de 40 œuvres des créateurs suivants : Njideka Akunyili Crosby, Ruth Leonela Buentello, Jess T. Dugan, LaToya Ruby Frazier, Jessica Todd Harper, Thomas Holton, Sedrick Huckaby et Anna Tsouhlarakis. Selon la curatrice de l’événement, Leslie Urena, « chacun des participants a illustré les manières complexes et profondément émotionnelles du fonctionnement des relations entre proches, leur durée et leur changement ».

Elinor sous la douche avec son autre maman. Photo National Portrait Gallery

La photo tendresse de Jess T. Dugan

Et, comme la parenté, de par sa nature même, embrasse les contradictions, cette nature des choses est spectaculairement représentée à travers l’objectif de la photographe Jess T. Dugan et un duo de portraits. L’un, intitulé Self Portrait with Elinor (Autoportrait avec Elinor), montre l’artiste tenant tendrement contre sa poitrine un nouveau-né en langes, sa fille Elinor. Dans le second, intitulé Vanessa and Elinor in the Shower (Vanessa et Elinor sous la douche), ce même nouveau-né dénudé sous la douche est porté avec chaleur et douceur par une personne nue, saisie de profil et dont rien ne relève l’identité, masculine ou féminine soit-elle. Il s’agit en fait de sa partenaire et donc de la seconde mère du bébé. Ces deux images sont tirées de la série Family Pictures réalisée par Jess T. Dugan, qui explore les questions d’identité à travers ses photographies. Son travail a été largement exposé et fait partie des collections permanentes de plus de quarante musées à travers les États-Unis. Dugan, qui avait été nommée en 2015 par la Maison-Blanche « l’artiste LGBT championne du changement », s’est axée largement sur les relations familiales : parents et enfants.

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En tant que lesbienne, elle s’identifie comme telle et comme mère ayant une fille avec sa partenaire féminine. Ceci se reflète dans ses portraits car, précise-t-elle, « les images commerciales mettant en scène des personnes LGBT, présentées comme une famille, ne sont devenues courantes que récemment ». C’est ce qu’elle a également exprimé dans une série intitulée Family Pictures aux pâles couleurs apaisantes, dans une ambiance de tendresse et de sérénité. Le tout est profondément naturel, à une époque où les familles LGBTQ sont toujours considérées avec hostilité et comme « différentes ». Et, d’un point de vue esthétique, quand l’artiste photographie sa partenaire et leur bébé nus, c’est pour, assurément, véhiculer l’innocence du corps nu.

Autoportait par Jess T. Dugan et sa fille Elinor. Photo National Portrait Gallery

La diversité contemporaine tirée en portrait

Le talent de Jess T. Dugan sied parfaitement à l’exposition Kinship qui se veut récurrente de la série Portraiture Now, qui a débuté en 2006. Avant cela, et depuis son ouverture en 1968 jusqu’en 2000, la National Portrait Gallery ne collectionnait que les portraits de sujets décédés. Aujourd’hui, elle se préoccupe sciemment des caméras braquées sur des portraits tirés de la diversité contemporaine et cernés dans leur propre environnement. Dans cet esprit, à travers le prisme de la famille, thème de cet accrochage, ont été notamment visualisées les inégalités qui affligent les communautés noires et celles moins nanties. On n’avait jamais vu auparavant dans un musée prestigieux des photos du quotidien de ces tranches de la société. Comme cette prise de vue d’un espace multifonctionnel d’une famille, servant à la fois de vestiaire, de cuisine et de salle à manger où l’on voit un père, une mère et leurs trois enfants s’apprêtant à prendre un repas sur une table en bois simplement mise, et qui s’intitule Portrait de famille. Ailleurs, sous le titre L’heure du bain, c’est un instantané de trois petits barbotant dans une grande cuvette baignoire collée à l’évier de la cuisine où la mère fait la vaisselle en ayant un œil sur eux. « Les peintures et les images de l’exposition adoptent de nouvelles approches du portrait, un genre d’art autrefois réservé aux riches. Ces séries photographiques défiant le temps et ces portraits peints dépassent le style conventionnel afin d’élever les proches et les personnes chères au rang digne de la notion établie d’une galerie de portraits. Je pense qu’il y a aussi cette accessibilité de l’appareil photo qui permet cette démocratisation », conclut Leslie Urena.

Comme toute galerie de portraits, la National Portrait Gallery à Washington n’a jamais failli à sa mission, accueillant au gré des années les visages historiques du pays. Pour elle, aujourd’hui, décrire le pays c’est également dessiner un tissu social basé sur les relations humaines, en particulier familiales. Pour preuve l’exposition qu’elle présente jusqu’au 7 janvier 2024,...

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