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Idées - Tribune

Une nouvelle stratégie nationale de santé pour faire face aux défis

Une nouvelle stratégie nationale de santé pour faire face aux défis

Un patient se reposant sur un lit dans un couloir de l’hôpital universitaire Rafic Hariri à Beyrouth. Photo d’archives AFP

Le Liban traverse l’une des crises les plus graves et les plus complexes de son histoire récente. La conjugaison des turbulences politiques, de l’effondrement financier, de l’afflux continu de réfugiés et de la pandémie persistante de Covid-19 a mis le système de santé à rude épreuve. Cette situation a été aggravée par une fuite des ressources humaines, en particulier celles qui ont des compétences élevées. Plus de 20 % des infirmières et 40 % des médecins ont migré. L’accès aux services de santé est devenu difficile car le coût des soins continue de grimper, notamment en raison de la baisse du pouvoir d’achat et de la dépendance accrue à l’égard des produits médicaux importés. En conséquence, certains indicateurs sanitaires clés, comme l’espérance de vie, la mortalité maternelle et la vaccination des enfants, se sont détériorés. Par ailleurs, des maladies oubliées, comme la diphtérie, le tétanos et, plus récemment, le choléra, sont réapparues dans le pays et les progrès sanitaires des années précédentes s’estompent.

On constate aussi l’émergence d’un décalage massif entre les besoins sanitaires de la population et les ressources disponibles : le budget global du ministère de la Santé publique est passé de 486 millions de dollars en 2018 à moins de 37 millions de dollars en 2022. Dans ce contexte, le recours au système de santé par la population est moindre : les estimations sur les dépenses totales en matière de santé montrent une réduction de plus de 40 %. Cependant, la facture a fortement augmenté pour les patients : alors que la majorité de la population se situe en dessous du seuil de pauvreté, ils doivent désormais payer près de la moitié de leurs frais de santé de leur propre poche. L’aide étrangère est devenue de plus en plus indispensable à la pérennité des services de santé de base. Cependant, la crise internationale, l’inflation mondiale croissante, la lassitude des donateurs et les agendas politiques internationaux contradictoires ont étouffé le flux des aides déjà insuffisant. La décision de nombreux donateurs de travailler directement avec des ONG plutôt qu’avec des institutions publiques, la présence d’une multitude de plateformes d’aide non coordonnées et parfois concurrentes et un système de santé fragmenté ont eu pour conséquence des initiatives d’aide moins efficaces, à un moment où les ressources deviennent de plus en plus rares.

Il était donc impératif d’élaborer une stratégie nationale de santé unificatrice qui fixe la direction et souligne les priorités. Le ministère de la Santé publique, en consultation avec toutes les parties prenantes nationales et internationales, a dirigé le processus de rédaction de la stratégie en vue d’un système de santé plus équitable, intégré et efficace, assurant un accès universel à des soins de qualité fondés sur la valeur et centrés sur les personnes. La stratégie contribuera à orienter le soutien international offert au Liban, car elle devient la base d’une réponse mieux coordonnée aux besoins sanitaires aigus, tout en construisant un système plus fort, autosuffisant et plus réactif.

La stratégie nationale de santé se concentrera sur plusieurs points :

– L’amélioration de la gouvernance du secteur de la santé, et l’institutionnalisation d’une politique et d’un processus décisionnel fondés sur des données probantes. Cette évolution soulignera la nécessité d’une stratégie de financement de la santé qui servira de base à la mise en cohérence de la multitude des fonds alloués, et qui conduira à un financement pérenne, plus indépendant des donateurs.

– Positionner les soins de santé primaires comme la pierre angulaire de la fourniture de services de santé de qualité. Ce service doit bénéficier d’un financement, servir de passerelle vers les soins secondaires et tertiaires et être un centre d’interventions de santé publique. L’investissement dans les soins de santé primaires devrait générer des économies qui pourront être réinvesties et ouvrir la voie à une moindre dépendance à l’égard de l’aide. La feuille de route pour le renforcement des soins de santé primaires nécessite de redéfinir le rôle du ministère de la Santé, de revoir l’ensemble des prestations et de revoir les schémas de financement.

– Il est impératif d’investir dans le renforcement du système de santé publique et la préparation aux situations d’urgence pour garantir la résilience et l’adaptabilité du système. Cela nécessite d’investir dans des infrastructures essentielles telles qu’un laboratoire de référence (pour contrôler la qualité de l’eau, de l’alimentation et les bactéries), un centre opérationnel d’urgence et un réseau de structures de surveillance antimicrobienne.

– Identifier la pénurie de personnel de santé comme le plus grand défi pour le système de santé, et s’attaquer aux causes profondes de l’hémorragie des effectifs, en améliorant les conditions de travail dans les établissements et en développant une feuille de route pour le rétablissement du personnel de santé avec une perspective à court, moyen et long terme.

– La transition numérique est fondamentale pour renforcer la transparence, la responsabilité, et contribuer à regagner la confiance dans les institutions publiques. Cela facilitera également le suivi des médicaments et donc la lutte contre les pratiques délétères, et permettra de suivre les résultats obtenus en matière de santé. Il est donc fondamental de disposer d’un plan directeur national pour le système d’information de santé qui puisse concentrer les efforts sous une direction commune.

Malgré les difficultés, le Liban prend conscience que dans la crise se trouve une opportunité. La mise en œuvre de cette stratégie nationale doit permettre aux individus de vivre en meilleure santé et de bénéficier d’un accès à des soins de qualité sans avoir à supporter un surplus de difficultés financières ; aux prestataires de travailler dans un système qui prend en compte les principaux déterminants de la santé et répond aux urgences sanitaires ; aux institutions publiques d’œuvrer en faveur de la couverture sanitaire universelle et de travailler dans l’intérêt général. L’investissement dans la santé devrait contribuer au développement humain et à la croissance économique. Il présente des avantages bien au-delà de la santé. Bien que ces objectifs puissent paraître ambitieux, un voyage de mille lieues commence par un premier pas.


Par Firas ABIAD

Ministre de la Santé publique (depuis 2021)

Le Liban traverse l’une des crises les plus graves et les plus complexes de son histoire récente. La conjugaison des turbulences politiques, de l’effondrement financier, de l’afflux continu de réfugiés et de la pandémie persistante de Covid-19 a mis le système de santé à rude épreuve. Cette situation a été aggravée par une fuite des ressources humaines, en particulier celles qui...

commentaires (2)

Aucun de ces sinistres n’est de bonne foi. Sinon ça se saurait. Continuer à exécuter les ordres des vendus en tuant à petit feu mais en masse le peuple est tout sauf de la bonne foi.

Sissi zayyat

17 h 43, le 05 février 2023

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Commentaires (2)

  • Aucun de ces sinistres n’est de bonne foi. Sinon ça se saurait. Continuer à exécuter les ordres des vendus en tuant à petit feu mais en masse le peuple est tout sauf de la bonne foi.

    Sissi zayyat

    17 h 43, le 05 février 2023

  • JE NE DOUTE PAS QUE LE MINISTRE DE LA SANTE MONSIEUR ABIAD EST DE BONNE FOI ET CAPABLE D,EXECUTER CE QU,IL DIT. MAIS LE LAISSERONT-ILS TRAVAILLER ? CAR AU LIBAN LA OU ON PARLE DE NOUVELLE STRATEGIE, QUELLE QUE SOIT, ON FINIT GRACE AUX INTERVENTIONS DIVERSES EN UN BORDEL.

    LA LIBRE EXPRESSION

    13 h 52, le 01 février 2023

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