Rechercher
Rechercher

Moyen-Orient - Éclairage

Les pays arabes face à l’escalade des tensions entre Israël et les Palestiniens

La nouvelle spirale de violence dans laquelle sont pris Jérusalem et les territoires occupés met les États de la région dans l’embarras.

Les pays arabes face à l’escalade des tensions entre Israël et les Palestiniens

Les hauts représentants des pays ayant normalisé leurs relations avec Israël en présence de responsables US lors d’une conférence de presse conjointe à l’occasion de la première réunion du comité directeur du Forum du Néguev, au sud de Manama, le 27 juin 2022. Mazen Mahdi/AFP

Jusqu’où les pays arabes, parmi lesquels les États signataires des accords d’Abraham, laisseront-ils faire Benjamin Netanyahu ? Comment réagiront-ils, en cas de conflit à grande échelle ? Car ces derniers jours, tout s’est accéléré. À Jérusalem et dans les territoires palestiniens, la spirale de violence est montée d’un cran. Au point de donner l’impression qu’à tout moment, la situation menace de basculer dans une nouvelle guerre. Le lendemain d’un raid israélien mené jeudi dernier sur Jénine, le plus meurtrier en Cisjordanie depuis 2005, un Palestinien commet, aux abords d’une synagogue à Jérusalem-Est, la pire attaque contre des Israéliens depuis 2008, selon leurs autorités. Les représailles ne se font pas attendre et promettent le pire. L’État hébreu réactive son logiciel de punition collective et de répression : les familles des auteurs d’attentats sont privées de leurs droits, le permis de port d’armes notamment facilité pour les civils israéliens.

L'édito d'Anthony Samrani

L’État (suprémaciste) juif

Certes, après le raid sur Jénine, les condamnations pleuvent du côté des pays arabes : la Jordanie, l’Égypte, les Émirats arabes unis – chefs de file des accords d’Abraham signés avec Israël et rejoints par le Bahreïn, le Soudan et le Maroc entre septembre et décembre 2020 – l’Arabie saoudite, Oman ou encore le Koweït publient des déclarations en ce sens. Mais, au-delà des mots, aucun acte. Comme à leur habitude, les réactions se sont limitées à des déclarations vides de promesses. Officiellement signés, dans le cas émirati, en contrepartie de la fin de l’annexion de territoires en Cisjordanie, les accords d’Abraham « n’étaient pas poussés par la question palestinienne, mais par d’autres intérêts, ce qui laisse penser que d’éventuelles réactions (face à Israël) seraient assez floues », suggère Aziz Alghashian, chercheur saoudien spécialisé dans les relations entre les pays du Golfe et Israël. Une posture toutefois susceptible d’évoluer.

Pression domestique

Tandis que cette année, à nouveau, le mois de ramadan coïncide avec la Pâque juive, d’« énormes efforts seront nécessaires pour réduire les tensions et, jusqu’à présent, il ne semble pas que suffisamment d’efforts soient déployés pour atteindre cet objectif », prévient Hesham Youssef, chercheur résident au United States Institut of Peace. Le secrétaire d’État américain Antony Blinken s’est toutefois rendu en Israël lundi et à Ramallah hier, en vue de calmer le jeu. Mais l’escalade pourrait bien être ravivée par le ministre de la Sécurité nationale Itamar Ben Gvir, adepte des provocations. Le 29 décembre dernier, soit une semaine après avoir prêté serment, son intrusion sur l’esplanade des Mosquées – en dépit du statu quo hérité de la guerre des Six-Jours – provoque un tollé dans la région. Il promet que ce ne sera pas la dernière fois.


« Si une guerre venait à éclater, comme en mai 2021, la priorité pour les États ayant normalisé leurs relations sera de mettre immédiatement fin au conflit pour se protéger d’une pression domestique, même s’il est moins probable que la population aux EAU ou au Bahreïn s’exprime dans la rue contre le leadership », estime Aziz Alghashian. Au printemps 2021, une guerre de 11 jours avait éclaté entre Israël et le Hamas, au pouvoir dans la bande de Gaza, après les incursions controversées de responsables israéliens sur l’esplanade des Mosquées à Jérusalem et sur fond de tensions dans le quartier de Cheikh Jarrah.

Lire aussi

En Cisjordanie, Blinken se dit triste après la mort de Palestiniens "innocents"

Davantage que les autres pays, la Jordanie, dont la moitié des habitants sont d’origine palestinienne, pourrait faire face à une pression interne. Gardienne des lieux saints de Jérusalem, Amman avait vivement réagi à l’intrusion de Ben Gvir fin décembre. Dans une volonté d’apaiser les tensions, le Premier ministre israélien s’est rendu le 24 janvier dernier à Amman pour y rencontrer le roi Abdallah II. Une visite surprise qui est intervenue deux semaines après la conclusion de deux jours de réunions entre de hauts fonctionnaires des États-Unis, d’Israël, du Bahreïn, du Maroc, d’Égypte et des EAU dans le cadre du Forum du Néguev organisé à Abou Dhabi, auquel le royaume hachémite a refusé de participer sans la présence des Palestiniens. L’occasion pour le roi de Jordanie de rappeler « la nécessité de respecter le statu quo historique et juridique sur l’esplanade des Mosquées et de ne pas y toucher ». Une rare rencontre : les deux dirigeants ne s’étaient pas réunis depuis 2018. Mais le déplacement de Benjamin Netanyahu n’aura pas suffi. Car, un jour plus tard, Itamar Ben Gvir s’adonne à une nouvelle provocation et déclare : « Je gère ma propre politique concernant le Mont du Temple (nom donné par les Juifs au complexe de la mosquée al-Aqsa), pas celle du gouvernement jordanien. »

Une normalisation mutuellement bénéfique

Membre provisoire du Conseil de sécurité de l’ONU, les EAU avaient eux aussi condamné l’incursion de Ben Gvir sur l’esplanade des Mosquées, demandant au nom de l’Autorité palestinienne et de la Jordanie la tenue d’une réunion d’urgence du Conseil de sécurité. Mais cela n’empêche pas Abou Dhabi d’approfondir sa relation stratégique avec Tel-Aviv. Les EAU sont déjà très avancés dans le processus de normalisation, en témoigne leur récente annonce de l’enseignement de l’Holocauste dans les écoles primaires et secondaires. La normalisation avec l’État hébreu vise notamment à renforcer un front anti-iranien dans la région. Dans ce contexte, difficile pour Abou Dhabi de mettre en danger une potentielle alliance sécuritaire, encouragée aussi par les États-Unis. Pièce importante de ce puzzle, le royaume de Bahreïn abrite le quartier général de la Cinquième Flotte américaine, gérée par le Commandement US pour le Moyen-Orient et l’Asie centrale (Centcom), que les forces israéliennes ont intégré l’année dernière.

Pour mémoire

À la veille des élections israéliennes, le malaise émirati

Les deux États ont certes mentionné auparavant « une certaine limite quant à l’étendue de leur coopération avec Israël si la question du territoire palestinien n’évoluait pas », rappelle Hesham Youssef. Mais les violences envers les Palestiniens ne changeront pas les relations des pays s’étant déjà engagés dans la normalisation, selon Abdulkhaleq Abdulla, professeur de sciences politiques aux EAU. En effet, leur choix représente « une décision très importante et une option stratégique qu’ils essaieront de poursuivre jusqu’à la fin (…) et la normalisation est bénéfique pour les intérêts personnels respectifs de tous les pays signataires ». Bien que ces pays puissent exercer une pression sur Israël lors de la prochaine édition du sommet de Néguev, qui doit se tenir en mars au Maroc, « il est peu probable que les participants entravent leur relation (…) car ils s’y sont déjà trop investis », soutient Aziz Alghashian. « Si des discussions relatives à une annexion imminente (de territoires palestiniens, comme prévoit de le faire Bezalel Smotrich, à la tête d’une branche de l’armée gérant l’administration des civils dans les territoires occupés) se font entendre, un affaiblissement des relations avec Israël pourrait avoir lieu », indique le chercheur, néanmoins perplexe quant à cette possibilité.

Courtisée par Benjamin Netanyahu pour rejoindre son « cercle de paix », l’Arabie saoudite a elle aussi dénoncé dans un communiqué officiel les violences envers les civils survenues ces derniers jours. Bien qu’il ait exprimé une certaine inclination à se lier à l’État hébreu, Riyad a réitéré le 21 janvier dernier par la voix de son ministre des Affaires étrangères que « la normalisation avec Israël n’aura pas lieu sans une solution à deux États pour la Palestine ». Avec une majorité de sa population soutenant la cause palestinienne, le royaume wahhabite devrait exiger d’importantes concessions auprès des États-Unis et de l’État hébreu pour faire un pas vers un rétablissement de ses relations avec le gouvernement le plus à droite de l’histoire d’Israël.

Pour mémoire

Au Qatar, les accords d’Abraham à l’épreuve du terrain

Jusqu’où les pays arabes, parmi lesquels les États signataires des accords d’Abraham, laisseront-ils faire Benjamin Netanyahu ? Comment réagiront-ils, en cas de conflit à grande échelle ? Car ces derniers jours, tout s’est accéléré. À Jérusalem et dans les territoires palestiniens, la spirale de violence est montée d’un cran. Au point de donner l’impression qu’à tout...

commentaires (3)

Vous croyez vraiment que la question palestinienne est encore a l órdre du jour? Il n y a qu'au Liban et les pays de la sois disant moumanaá qui revent encore en couleur....

IMB a SPO

17 h 27, le 01 février 2023

Tous les commentaires

Commentaires (3)

  • Vous croyez vraiment que la question palestinienne est encore a l órdre du jour? Il n y a qu'au Liban et les pays de la sois disant moumanaá qui revent encore en couleur....

    IMB a SPO

    17 h 27, le 01 février 2023

  • Les pays arabes et leurs populations ont tout intérêt de garder / protéger les accords d’Abraham et la paix. Cette paix leur a apporté d’énormes bénéfices aussi bien grâce aux technologies israéliennes dans les domaines sécuritaires, spatial, économiques etc… Les palestiniens ont eu largement le temps et les opportunités de garder en vie l’accord de paix signé par Arafat. Bah non… il a fallu qu’un certain Hamas encouragé par des pays étrangers remettent tout en cause et font en sorte que la paix n’ait jamais eu lieu sur le terrain. Ce qui , avec le temps, a poussé l’extrême droite israélienne au pouvoir. Surtout que psychologiquement, les palestiniens ont grandi avec la notion de haine et de guerre ( et réciproquement côté israélien) . Faire la paix nécessite l’éducation des populations à la notion de paix. On ne peut pas faire la paix d’une part et menacer de jeter à la mer son adversaire ennemi. Aujourd’hui, les habitants du Gulf ont touché du doigt tout l’intérêt de la paix et les retombées bénéfiques de cette paix. Reste aux autres pays arabes de le découvrir. C’est le seul moyen de tuer dans l’œuf l’extrême droite israélienne que les israéliens eux-mêmes rejettent, à la lumière des manifestations auxquelles nous assistons dans les rues israéliennes. En espérant que le calme revienne : les civils étant malheureusement les principales victimes de cette sale guerre qui n’a que trop duré

    LE FRANCOPHONE

    13 h 50, le 01 février 2023

  • LES ARABES ? PEUH ! LA SEULE CHOSE BONNE C,EST QU,ISRAEL EST MAINTENANT PRES DES FRONTIERES DE L,IRAN ET CONTREBALANCE LA PRESENCE IRANIENNE AU LIBAN,

    LA LIBRE EXPRESSION

    13 h 39, le 01 février 2023

Retour en haut