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Moyen-Orient - Focus

Bagdad traque la contrebande de dollars vers l’Iran

Sous la pression de Washington, le gouvernement irakien s’efforce de freiner la fuite de devises vers Téhéran sous sanctions, qui risque d’entraîner une crise de liquidités dans son propre pays.

Bagdad traque la contrebande de dollars vers l’Iran

Un homme compte des dinars irakiens dans une boutique de change à Bagdad, le 23 janvier. Ahmad Saad/Reuters

Dans un nouveau défi d’équilibrisme exigé par sa fonction, le Premier ministre irakien Mohammad Chia al-Soudani est prié de donner des gages à Washington en luttant contre la contrebande de dollars vers Téhéran, tout en évitant de s’attirer l’ire des partis pro-Iran qui soutiennent son gouvernement.Ainsi, il a envoyé samedi des forces de sécurité d’élite pour arrêter des négociants de devises accusés de contribuer à l’envoi d’une centaine de millions de dollars en contrebande vers l’Iran, où les nouvelles sanctions occidentales imposées dans le sillage de la répression brutale d’un mouvement de manifestations provoquent une dépréciation drastique de la monnaie.Or, ces raids ont été menés au moment où la valeur de la monnaie irakienne par rapport au dollar est elle-même en chute libre depuis mi-novembre. Sur le marché, un dollar valait dimanche 1 620 dinars, selon l’agence de presse officielle INA, tandis que sa valeur se maintenait aux alentours de 1 470 dinars il y a deux mois, correspondant au taux de change officiel fixé par le gouvernement. De quoi entraîner une hausse conséquente du coût de la vie, dans un pays où un quart des quelque 42 millions d’habitants vit sous le seuil de pauvreté.

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Sommé de réagir, M. Soudani a annoncé dans une allocution télévisée lundi le départ du gouverneur de la banque centrale Moustafa Ghaleb Mukhif « à sa demande », ainsi que la « mise à la retraite du président de la Banque du commerce d’Irak », précisant que leurs successeurs étaient « connus pour leur expérience, leurs capacités et leur intégrité ». M. Ghaleb Mukhif a été remplacé par Muhsen el-Allaq. Le chef du gouvernement a par ailleurs cherché à rassurer les Irakiens, affirmant que les fluctuations du dinar étaient temporaires et que le taux de change serait vite stabilisé.

« 80 % des demandes » de transferts rejetés

Reste que pour les observateurs, la chute du dinar est avant tout liée à la décision de Bagdad de mettre son système bancaire en conformité avec la réglementation internationale sur les transferts de fonds du mécanisme Swift. Une évolution réalisée sous la pression de Washington, qui avait initialement facilité les transactions bancaires pour l’Irak après avoir envahi le pays en 2003. Le but de la manœuvre est d’accroître la transparence du système financier irakien et de lutter contre le blanchiment d’argent. Pour la Réserve fédérale américaine (Fed, banque centrale), c’est surtout une façon d’empêcher les dollars irakiens d’être transférés à Téhéran en contournant les sanctions.

Les banques irakiennes doivent désormais passer par une plateforme électronique, sur laquelle elles sont sommées de révéler des informations, notamment sur les destinataires de leurs transferts financiers. Or, depuis la mise en place de ce mécanisme, la Fed a rejeté « 80 % des demandes » de leurs virements, car les autorités américaines avaient des soupçons sur les destinataires finaux des sommes à transférer, a indiqué à l’AFP Muzhar Saleh, un conseiller du Premier ministre. Ainsi, les virements depuis les comptes de la banque centrale irakienne auprès de la Fed et d’autres institutions étrangères, principalement issus des revenus pétroliers de Bagdad, étaient estimés à 224 millions de dollars en octobre, avant la mise en place de ces mesures. Ils ont chuté à 22,9 millions à la mi-janvier.

Forte de ses dollars, la banque centrale irakienne fait appel aux banques et aux entreprises privées pour obtenir des dinars, au travers de vente aux enchères de devises. La Fed a néanmoins des « indications sérieuses » que les dollars ainsi achetés ont notamment été envoyés par des banques irakiennes à Téhéran par l’intermédiaire de deux banques égyptiennes basées à Dubaï, qui les ont été transférés vers Oman, puis l’Iran, aurait affirmé en décembre l’ex-gouverneur de la banque centrale irakienne, selon le Middle East Eye (MEE).

Affamer les gens

D’après un conseiller de M. Soudani interrogé par MEE, le ralentissement des transferts de dollars est aussi lié à l’enquête menée par la Fed pour retrouver la trace des fonds pillés lors du « vol du siècle ». Lors de sa prise de fonction en octobre, M. Soudani avait assuré que la majeure partie des 2,5 milliards de dollars de fonds publics volés avaient été transférés hors d’Irak.

Quoi qu’il en soit, la baisse sévère des dollars disponibles à l’achat par les banques irakiennes a entraîné une pénurie de dinars pour les finances publiques, posant un défi de taille au Premier ministre. Au même moment, il avait lancé une campagne visant à étendre le nombre de bénéficiaires de la sécurité sociale, et ce quelques semaines après avoir annoncé vouloir embaucher 370 000 nouveaux fonctionnaires. Or, à l’heure actuelle, le gouvernement irakien a besoin d’au moins huit mille milliards de dinars par mois (5,5 milliards de dollars) pour payer les salaires des fonctionnaires, des retraités, des bénéficiaires de la sécurité sociale et des victimes du terrorisme.

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En raison de la pénurie actuelle de liquidités, le chef du gouvernement risque de devoir revoir ses ambitions à la baisse… Et de s’attirer les critiques des partis pro-iraniens qui le soutiennent. Hadi al-Ameri, le chef du parti pro-iranien Fateh, a ainsi affirmé que les restrictions en cours menées par la Fed étaient une politique délibérée de Washington pour « affamer les gens ».

Selon MEE, de hauts dirigeants du Cadre de coordination, le bloc de partis pro-iraniens dominant le Parlement, auraient demandé en décembre dernier au Premier ministre de se rendre aux États-Unis pour obtenir un répit. « Je ne considère pas qu’il soit impossible de voir l’Irak avoir de bonnes relations avec l’Iran et les États-Unis », avait-il déclaré mi-janvier au Wall Street Journal. Il a ainsi annoncé au quotidien américain qu’il enverrait une délégation à Washington le mois prochain pour demander de suspendre provisoirement le contrôle strict des transactions financières irakiennes.

Dans un nouveau défi d’équilibrisme exigé par sa fonction, le Premier ministre irakien Mohammad Chia al-Soudani est prié de donner des gages à Washington en luttant contre la contrebande de dollars vers Téhéran, tout en évitant de s’attirer l’ire des partis pro-Iran qui soutiennent son gouvernement.Ainsi, il a envoyé samedi des forces de sécurité d’élite pour arrêter des...

commentaires (2)

Liban et maintenant l’Iraq. Les pays sous sanctions (Iran, Syrie …) siphonent Les pays voisins. Qui blamer ? Les Americans ? Les Iraniens ? Oui, Certainement Mais eaglement les Libanais et les Iraquiens qui detruisent leur pays pour le compte de l’etranger

LH

09 h 28, le 25 janvier 2023

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Commentaires (2)

  • Liban et maintenant l’Iraq. Les pays sous sanctions (Iran, Syrie …) siphonent Les pays voisins. Qui blamer ? Les Americans ? Les Iraniens ? Oui, Certainement Mais eaglement les Libanais et les Iraquiens qui detruisent leur pays pour le compte de l’etranger

    LH

    09 h 28, le 25 janvier 2023

  • nous avons le même problème au Liban, blanchiment d argent lié à la drogue tel que le captagon , la résine de cannabis.... aussi l état est dépossédé de ses impôts douaniers et fiscaux. Le désordre et la désorganisation de l état à rajouter la corruption de nos politiciens.... Pauvre Liban , en espérant que L Irak s en sorte de cette gangrène mafieuse allahtollienne... Aussi l entente en dessous des tables entre les perses qui n ont aucun problèmes avec les juifs à aucun moment de l histoire et qui tout deux et deverse leur haine vis à vis des Arabes pour les départager en mini état et désordre sociaux. à bon entendeur salut.

    Le juste milieu

    00 h 22, le 25 janvier 2023

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