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Économie - Monnaie

La Banque du Liban tente une nouvelle fois d’ajuster le marché

La forte hausse du taux de Sayrafa fera augmenter la facture de la téléphonie mobile de plus de 20 %.

La Banque du Liban tente une nouvelle fois d’ajuster le marché

Un agent de change à Hazmiyé. Photo P.H.B.

La livre libanaise a connu une nouvelle phase de fortes fluctuations lors du premier jour ouvré suivant le long week-end de Noël, chômé pour les employés de banque comme ceux de la Banque du Liban, mais pas par les agents de change qui ont été nombreux à ouvrir lundi.

Alors qu’il enchaînait les records de hausse depuis une dizaine de jours, passant successivement les barres de 44 000 à 47 000 livres sur cette période, le dollar a finalement commencé à reculer de façon hésitante dans l’après-midi pour flotter de façon complètement incertaine entre 43 000 et 45 000 livres en fin de journée, en fonction des agents et des sites relayant le taux. Une fois de plus, la BDL semble à l’origine de ces remous. Peu avant que le marché ne change de cap, elle a publié deux communiqués – le 2nd précisant le 1er – pour annoncer deux mesures exceptionnelles concernant sa propre plateforme de change, Sayrafa, dont le taux est inférieur de plusieurs milliers de livres à celui du marché. La première mesure a été de majorer brutalement le taux de Sayrafa, habituellement modifié tous les jours ouvrés en début de soirée. Fixé à 31 200 livres pour un dollar vendredi soir, il a été rehaussé à 38 000 livres aux environs de 11h hier, soit une majoration d’une ampleur jamais vue depuis le lancement de la plateforme dans sa version actuelle en mai 2021.

« Jusqu’à nouvel ordre »

La seconde a été de lever toutes les limites d’achat et de vente pour « les particuliers et les sociétés » dans les banques, et ce « jusqu’à nouvel ordre ».

Dans son second communiqué, l’institution a ensuite précisé que les transactions pourront être effectuées dans les établissements bancaires jusqu’à 17h chaque jour ouvré jusqu’au 31 janvier prochain. Une employée de banque que nous avons interrogée sous le couvert de l’anonymat a affirmé avoir été notifiée qu’elle devait rester au travail jusqu’à 17h à partir d’aujourd’hui et jusqu’à la fin de la semaine, alors qu’elle finissait ses journées en début d’après-midi.

L'éditorial de Issa Goraïeb

Du fiel dans le miel

« Les banques ont besoin d’un peu de temps pour s’organiser et surtout fixer les commissions qu’elles vont prendre sur chaque transaction », a expliqué une autre source bancaire, qui n’est pas, elle non plus, autorisée à parler à la presse.

Les opérations concernées sont celles liées au dispositif de la circulaire n° 161 qui permet depuis le 16 décembre 2021 aux titulaires de comptes en livres libanaises, dont la valeur s’est effondrée sur le marché (plus de 96 % de dépréciation depuis le début de la crise), de convertir puis de retirer chaque mois de petits montants en « dollars frais » au taux de Sayrafa. Ces opérations étaient soumises à deux plafonds distincts : celui des opérations pouvant être réalisées en convertissant des « dollars bancaires » en livres avant de les convertir à nouveau en dollars, qui sont limitées par les plafonds de conversion et de retrait spécifiques à chaque banque ; et celui limitant les montants d’espèces en livres que chaque client peut directement déposer à sa banque pour les échanger contre des dollars au taux de Sayrafa (les plafonds étaient fixés à 400 dollars maximum, variables selon les banques).

Quatrième épisode

Selon la source bancaire contactée, la BDL espère atteindre deux objectifs : diminuer les pertes liées à l’écart entre le taux du marché et celui de Sayrafa, qui avait récemment dépassé les 15 000 livres, et aspirer des livres en circulation sur le marché ou déposées en banque (74,8 mille milliards de livres circulaient hors de la BDL à la mi-décembre) en injectant plus de dollars via la circulaire n° 161. C’est d’ailleurs la 4e fois cette année que l’institution joue sa partition dans un scénario récurrent qui commence par une hausse soutenue du taux jusqu’à atteindre un pic, suivie d’une correction ramenant ce même taux à un niveau bien inférieur au pic avec à chaque fois une intervention de la BDL en guise de point de bascule.

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Mi-janvier 2022, le taux de change est ainsi passé de plus de 33 000 livres pour un dollar à moins de 24 000 ; fin mai, il a failli dépasser les 40 000 au terme d’une inflation s’étendant sur plusieurs jours avant de retomber en quelques heures aux environs de 30 000 ; et enfin mi-octobre, il a brièvement dépassé les 40 000 pour retomber 5 000 unités plus bas. Pour ce 4e épisode, la baisse n’a pas été aussi prompte mais a tout de même pris à défaut certains agents de change.

L’un d’entre eux à Beyrouth s’est par exemple plaint d’avoir perdu plusieurs centaines de dollars en se faisant surprendre par le taux. Un autre, toujours dans la capitale, a fixé à 44 500 livres le taux auquel il concédait de vendre des dollars, au moment où il les rachetait 1 500 livres plus bas, soit trois fois la différence qu’il pratiquait habituellement.

Toujours à Beyrouth, un troisième contacté affirmait même effectuer des transactions à « 39 500 livres » mardi matin, tandis qu’un autre dénonçait « le jeu de Riad Salamé » sur le marché. Une vidéo montrant une altercation entre deux agents de change présentés comme établis à Chtaura (Békaa) a également été relayée par certains sites d’information.

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Enfin, si la baisse du taux du marché doit nécessairement être répercutée sur les prix en livres, à supposer que les commerçants jouent le jeu, la hausse du taux de Sayrafa va avoir pour conséquence de faire augmenter de plus de 20 % les prix des télécommunications mobiles, qui sont calculés depuis le 1er juillet en dollars convertis au taux de la plateforme (en lieu et place de l’ancienne parité officielle de 1 507,5 livres pour un dollar). Autre conséquence à moyen terme : les factures d’électricité qui seront collectées à partir de février. Les nouveaux tarifs d’électricité, qui s’appliquent sur la consommation des abonnés à compter du 1er novembre dernier, sont eux aussi désormais calculés en dollars, puis convertis au taux de Sayrafa.

Seule consolation : les salariés qui craignaient de devoir calculer leurs revenus imposables en 2022 en utilisant ce taux, ce qui aurait fortement augmenté leurs impôts sur cet exercice, ont obtenu un sursis, vu que le ministère des Finances a finalement décidé de modifier sa décision initiale à ce niveau.

La livre libanaise a connu une nouvelle phase de fortes fluctuations lors du premier jour ouvré suivant le long week-end de Noël, chômé pour les employés de banque comme ceux de la Banque du Liban, mais pas par les agents de change qui ont été nombreux à ouvrir lundi.Alors qu’il enchaînait les records de hausse depuis une dizaine de jours, passant successivement les barres de...

commentaires (4)

En France, le taux d'usure a ete eleve a 3,57 %. L'ensemble des pays civilises sont dans une tendance similaire. Dans le meme temps, la canaille de la BDL et des Finances Publiques et les crapules bancaires imposent aux epargnants un haircut ILLEGAL de plus de 80 %. Et la justice vereuse, aux ordres, laisse faire. Ces delinquants financiers en costard-cravate devraient se mefier. Un jour, la vengeance prendra le dessus sur la resilience.

Michel Trad

21 h 16, le 28 décembre 2022

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Commentaires (4)

  • En France, le taux d'usure a ete eleve a 3,57 %. L'ensemble des pays civilises sont dans une tendance similaire. Dans le meme temps, la canaille de la BDL et des Finances Publiques et les crapules bancaires imposent aux epargnants un haircut ILLEGAL de plus de 80 %. Et la justice vereuse, aux ordres, laisse faire. Ces delinquants financiers en costard-cravate devraient se mefier. Un jour, la vengeance prendra le dessus sur la resilience.

    Michel Trad

    21 h 16, le 28 décembre 2022

  • Quand va-t-on finir de ces canailles? Nous sommes en train de mourir a feu doux, notre pays est condamne et méprisé, et le peuple continue comme si de rien n’était! Ne trouvez-vous pas cette situation absurde, ahurissante?

    CW

    12 h 26, le 28 décembre 2022

  • Cher canaille de la BDL, Les fripouilles de EDL vont calculer ma facture d'electricite au taux de Sayrafa, dites-vous ? J'ai une epargne en $ a la banque. Voyons si ils accepteront d'etre regles en $ bancaires....au taux de Sayrafa bien sur. Idem pour la facture d'Ogero ....

    Michel Trad

    09 h 42, le 28 décembre 2022

  • Trop forts la bande à Riri !!!! Factures d'électricité calculées en dollars, puis hop je reconvertis en LL au taux de sayrafa qui passe de 30.000 à 38.000 d'un coup de baguette Sala..mégique, 25 pour cent que je t' empoche au passage. Riri président, quitte à se faire entuber, que ce soit par un as de l'arnaque plutot que par ces fantoches de gendre et de l'analphabète du Nord

    Roborm

    09 h 15, le 28 décembre 2022

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