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Sport - Mondial de football

La guerre de Doha n’aura pas lieu

En 92 ans, jamais un pays hôte n’avait perdu le match d’ouverture : c’est chose faite. Tristement dépassée par l’événement, l’équipe qatarie s’est trop facilement inclinée face à l’Équateur (0-2) au terme d’une rencontre ennuyeuse. De quoi lancer ce Mondial de la plus mauvaise des manières.

La guerre de Doha n’aura pas lieu

Cliché d’une réplique de la Coupe du monde pris lors du spectacle pyrotechnique concluant la cérémonie d’ouverture du Mondial 2022 en préambule du match d’ouverture de la compétition entre le Qatar et l’Équateur sur la pelouse du stade al-Bayt à al-Khor, au nord de Doha, dimanche 20 novembre 2022. Raul Arboleda/AFP

De mémoire de supporter, jamais la grand-messe du sport mondial n’aura fait si peu de fidèles. L’adage paraît paradoxal à bien des égards, surtout si près de La Mecque, mais il faut bien se rendre à l’évidence : il est désormais certain que cette Coupe du monde version qatarie ne sera qu’une pâle copie des précédentes.

Hier, le rideau est tombé au stade al-Bayt, l’un des sept écrins futuristes sortis de terre dans la périphérie de la capitale. Mais alors qu’il était déjà difficilement palpable, l’enthousiasme autour de ce Mondial, déjà qualifié de « plus controversé de l’histoire », ne risque pas de décoller d’un iota après un tel fiasco en guise de match d’ouverture.

Comme nous, les joueurs qataris devaient se demander ce qu’ils faisaient là. Visiblement dépassés par l’enjeu du rendez-vous, les « Annabi » (« les Bordeaux » en français) n’ont tout simplement pas été à la hauteur de l’adversaire équatorien. Nul besoin d’épiloguer sur un match qui, lui non plus, n’a pas vraiment eu lieu.

Cliché d’une réplique de la Coupe du monde pris lors du spectacle pyrotechnique concluant la cérémonie d’ouverture du Mondial 2022 en préambule du match d’ouverture de la compétition entre le Qatar et l’Équateur sur la pelouse du stade al-Bayt à al-Khor, au nord de Doha, dimanche 20 novembre 2022. Raul Arboleda/AFP

Trois minutes

À quoi bon parler d’une rencontre où l’on annule de façon automatique un but pour un hors-jeu invisible à l'œil nu ? Et ainsi jeter le doute (à tort) sur l'intégrité du corps arbitral dès la 3e minute de jeu, qui plus est dans un tel contexte. À quoi bon parler d’une rencontre où l’on siffle (plus d’une fois) des cartons jaunes pour des fautes qui valent en temps normal des cartons rouges ? À quoi bon parler d’une rencontre où l’équipe représentant le pays hôte a montré au monde entier qu’elle n’avait nullement les qualités sportives pour jouer à un tel niveau ?

L'édito d'Anthony SAMRANI

Qatarsis

Hormis deux tentatives infructueuses d’Almoez Ali, seul joueur qatari à s’être laborieusement illustré, rien à signaler. On se demande où la maestria tactique de Félix Sanchez, le sélectionneur catalan du Qatar, et les talents de l’Aspire Academy ont bien pu passer. La tentation d’éteindre la télévision dès la mi-temps a rarement été aussi forte. L’idée aurait d’ailleurs été bonne tant le second acte de ce simulacre fut soporifique.

Cette édition 2022 n’aura finalement mis que 3 minutes à prouver qu’elle ressemblait plus à une énorme farce qu’à la grande fête universelle dont elle s’est attribué les acabits. Et la flagrante erreur d’arbitrage en début de rencontre l’a tristement rappelé : il est toujours aussi difficile de parler de ballon rond, qui plus est dans un tournoi où nombre des meilleures nations s’affronteront sans leurs meilleurs joueurs.

Décalé en automne pour éviter les chaleurs caniculaires du désert, il aura en contrepartie encore plus resserré des calendriers au rythme déjà intenable. Karim Benzema, tout juste auréolé du Ballon d’or, sa cuisse gauche et ses 34 printemps en ont tristement fait les frais. Tout comme son dauphin au classement de la prestigieuse récompense individuelle, Sadio Mané, qui laisse orphelin un Sénégal dont on attendait beaucoup après son titre en Coupe d’Afrique l’hiver dernier. Pire encore, Lionel Messi, et son début de saison aux airs d’été indien, s’entraîne à part du groupe argentin et le bruit commence à courir qu’il pourrait manquer l’entrée en lice de l’Albiceleste.

Tout ça pour ça ?

Nul besoin de se focaliser sur les innombrables appels au boycott en provenance de l’Occident pour se rendre compte que le ver est déjà dans le fruit. Tout sonne faux dans cette partition qui semble finalement un poil improvisée, et ce malgré les plus de 200 milliards d’euros d’investissement consentis par Doha pour l’occasion et les renforts de supporters dont l’engouement semble aussi factice que leur « qatarité ».

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« C'est une source de fierté pour tous les Arabes »

Nul besoin non plus de revenir sur ce fameux déjeuner partagé sous les dorures du palais de l’Élysée entre le président français de l’époque, Nicolas Sarkozy, l’actuel émir Tamim al-Thani, alors encore héritier du trône, et le président retraité de l’UEFA, la confédération européenne de football, un certain Michel Platini. S’il est quasi impossible de prouver exactement ce qui s’est conclu lors de cette entrevue, le rachat du Paris Saint-Germain par le fonds souverain de l’émirat couplé au soutien inattendu de plusieurs membres de fédérations européennes au moment du vote du comité exécutif de la FIFA, quelques semaines plus tard, le 2 décembre 2010 à Zurich, scellant ainsi la victoire de la candidature qatarie, laissent au bas mot dubitatifs.

Il n’en a pas fallu plus pour que le monde, en grande partie occidental, voue le Qatar aux gémonies. Outre les soupçons de corruption, la découverte du peu d’attention accordée aux droits et à la santé des travailleurs immigrés dans les pays du Golfe, sans mentionner le non-sens écologique que constituent ces stades climatisés, n’ont rien arrangé. On connaît désormais la rengaine par cœur, et bien qu’elle soit avant tout une posture idéologique qui permet de s’endormir avec les mains propres plutôt que de les mettre dans le cambouis pour essayer de faire avancer les choses, on peut difficilement rétorquer, surtout après le visionnage de ce match inaugural, que le jeu en valait la chandelle.

« Au mauvais endroit, au mauvais moment ? »

Les familles des 6 500 ouvriers décédés des suites des conditions de travail sur les chantiers de ces stades pharaoniques ne diront pas le contraire. S’il est clair qu’il ne s’agit pas de la première fois que la Coupe du monde se déplace « au mauvais endroit au mauvais moment », on peine à lui trouver un prédécesseur aussi clivant (hormis peut-être son aîné argentin de 1978).

Censé « rendre sa fierté » à l’ensemble du monde arabe, ce Mondial avait enthousiasmé les populations du Moyen-Orient au lendemain de cette nomination inédite pour la région. Mais après avoir célébré ce pays presque voisin, ces derniers ont rapidement compris qu’ils seraient en définitive loin derrière les VIP sur la liste des invités.

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Loin des considérations morales que l’on entend ici et là, les fans levantins et nord-africains (en cruel besoin de parenthèses enchantées au milieu des galères du quotidien) devront même batailler pour visionner les matches, et ils ne verront jamais la couleur des fruits récoltés par ce coup de projecteur inédit sur la région.

Faute de budget pour s’acheter un abonnement BeIn Sports hors de prix ou pour payer les « tickets d’entrée » dans les établissement diffuseurs du tournoi récemment autorisés par le ministère libanais du Tourisme, regarder le Mondial est devenu un luxe.

Tout cela nous fait nous demander s’il ne serait pas temps de « ramener la coupe à la raison ». Mais vu le triste spectacle auquel on vient d’assister, et l’identité des candidats qui se bousculent au portillon de ses prochaines éditions, la Coupe du monde semble très loin d’en prendre le chemin.

De mémoire de supporter, jamais la grand-messe du sport mondial n’aura fait si peu de fidèles. L’adage paraît paradoxal à bien des égards, surtout si près de La Mecque, mais il faut bien se rendre à l’évidence : il est désormais certain que cette Coupe du monde version qatarie ne sera qu’une pâle copie des précédentes.Hier, le rideau est tombé au stade al-Bayt, l’un...

commentaires (7)

Il paraît que l'Arabie Saoudite a foutu une bonne raclée à l'Argentine aujourd'hui! Franchement, bravo! Le Qatar a perdu contre l'Ecuador, certes, mais son grand voisin l'a vengé de la belle façon: en humiliant l'un des grands mondiaux du foot...

Georges MELKI

20 h 19, le 22 novembre 2022

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Commentaires (7)

  • Il paraît que l'Arabie Saoudite a foutu une bonne raclée à l'Argentine aujourd'hui! Franchement, bravo! Le Qatar a perdu contre l'Ecuador, certes, mais son grand voisin l'a vengé de la belle façon: en humiliant l'un des grands mondiaux du foot...

    Georges MELKI

    20 h 19, le 22 novembre 2022

  • On aura rarement vu un tel condensé de mauvaise foi dans un seul article…. Quand vous dites qu’il y a un doute sur l'intégrité du corps arbitral en raison d’un but refusé, on peut vous rappeler que le corps arbitral n’a fait qu’appliquer la nouvelle règle du hors jeu semi automatique. Vous mentionnez la « maestria tactique de Félix Sanchez » c’est un entraîneur dont la réputation n’a pas franchi les frontières, avec un palmarès tenant dans un post it. Quant à la blessure de Benzema, elle n’est pas due au changement de date du mondial, tout comme Mané ou Messi. Et enfin, concernant le boycott que vous semblez préconiser, cette compétition a été attribuée depuis douze ans !! Il aurait fallu en parler avant, en outre cela reste du sport et non de la politique….

    C…

    16 h 59, le 21 novembre 2022

  • D'une façon totalement franche et sportive, le Quatar a perdu 2-0 contre une équipe Ecuador hautement qualifiée. D'abord, heureusement que le score n'était pas si humiliant, les Quataris ayant mis le paquet. Deuxièmement, et c'est là le point crucial, si le Quatar l'avait emporté, les soupçons vicieux de tricherie auraient envahi le monde entier. Comme ça, l'équipe Quatar a perdu dignement, et le Quatar a prouvé au monde entier que c'est le sport équitable qui va l'emporter, et non pas le nationalisme corrompu durant cette première dans le monde Arabe, déjà très mal vu dans maintes pays...

    Raed Habib

    15 h 07, le 21 novembre 2022

  • Bravo à Carine Bejjani. La mauvaise foi de l'article est évidente.

    Boustany Marie-Claude

    13 h 36, le 21 novembre 2022

  • C'est donc aussi mauvais que ça? Moi qui ne m'intéresse pas, mais alors là pas du tout au foot, je n'arrive pas à comprendre cette importance que donne l'auteur au fait que l'équipe du pays hôte ait perdu! Et les autres matchs qui vont s'étaler sur un mois, alors? Ils n'auraient donc aucun intérêt? J'en doute fort...

    Georges MELKI

    12 h 09, le 21 novembre 2022

  • Je ne trouve pas normal que de nos jours il faut payer un abonnement à bein sport (qui rappelont le est une chaine qatarie appartenant à nasser al khelaifi) pour pouvoir regarder les match de la coupe du monde.

    JPF

    11 h 20, le 21 novembre 2022

  • Trop de mauvaise foi dans cet article. Annuler le premier but était la bonne décision, il y avait bien hors-jeu.

    Carine Bejjani Ghattas

    08 h 11, le 21 novembre 2022

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