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Politique - Décryptage

Derrière la non-formation d’un gouvernement, l’ombre de la présidentielle

Jusqu’à samedi soir, plusieurs parties politiques étaient convaincues qu’un nouveau gouvernement serait formé à la dernière minute. Cette conviction était basée sur plusieurs points : d’abord, la certitude que la période qui suit la signature de l’accord avec Israël sur l’exploitation des ressources gazières exige une stabilité sécuritaire pour que celui-ci puisse être appliqué. Or la stabilité sécuritaire reste tributaire d’une certaine stabilité politique. Et face à l’impossibilité d’élire un nouveau président de la République avec un Parlement formé d’une addition de minorités et sans une entente internationale, cette stabilité passait par la formation d’un nouveau gouvernement en pleine possession de ses prérogatives. Ensuite, ces mêmes parties se basaient sur la personnalité du président du Conseil désigné Nagib Mikati considérée comme conciliante et peu encline aux défis. Enfin, la troisième raison reposait sur le fait que les points conflictuels n’étaient pas impossibles à régler : comme la question du choix des nouveaux ministres qui devaient être nommés ou même la question de savoir si le bloc du « Liban fort » allait ou non voter la confiance au nouveau Parlement. Jusque tard dans la nuit de samedi, les médiateurs ont donc poursuivi leurs efforts avant de se rendre à l’évidence : chacune des deux parties, à savoir le camp du président du Conseil désigné et celui du chef de l’État, campait sur ses positions et n’était pas prête à faire plus de concessions. Le camp présidentiel estimait ainsi avoir déjà cédé sur l’exigence de six nouveaux ministres politiques, puis sur la volonté de changer six ministres chrétiens au lieu de trois. Il s’est finalement heurté à un refus clair de la part de Mikati de laisser le camp présidentiel choisir seul les trois ministres chrétiens qui devaient être changés et d’accepter la possibilité qu’il n’accorde pas sa confiance au Parlement. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle dans un communiqué, la présidence a affirmé que Mikati ne veut pas former un nouveau gouvernement.

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Bassil ou le chaos

De son côté, le camp de Mikati a déclaré que le camp présidentiel n’a cessé de lui mettre des bâtons dans les roues, voulant un gouvernement selon ses conditions, sinon ce serait la vacance gouvernementale. Le camp présidentiel, lui, rejette ces accusations et précise que Mikati a cédé aux exigences du président de la Chambre, Nabih Berry, qui ne voudrait pas qu’un gouvernement où le camp présidentiel aurait un poids considérable prenne les rênes de l’exécutif après la fin du mandat de Michel Aoun, selon la logique qui veut qu’on ne fait pas un tel cadeau à un mandat finissant.

En réalité, derrière les conditions et les contre-conditions, c’est justement une bataille pour les poids politiques qui s’est jouée. Mikati et Berry ne voyaient donc pas pourquoi il fallait maintenir le poids du camp présidentiel au sein du gouvernement alors que le mandat était fini. Et le camp présidentiel avait le sentiment qu’on voulait l’éliminer de la scène politique après la fin du mandat de Michel Aoun. Tous les efforts du Hezbollah et du patron de la Sûreté générale Abbas Ibrahim n’ont donc pas réussi à dissiper ce climat de défiance réciproque et il a fallu se rendre à l’évidence : le Liban n’aura pas un nouveau gouvernement pour la période de vacance présidentielle.

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Les milieux proches de Mikati confient que celui-ci a dû à contrecœur renoncer à l’idée de former un nouveau gouvernement tout en précisant que cela devrait constituer un motif pour accélérer le processus d’élection d’un nouveau président de la République. Du point de vue de Mikati, et probablement de son allié Berry, il faudrait élire un nouveau président le plus rapidement possible pour couper la voie à de nouvelles candidatures et en particulier à celle du chef du Courant patriotique libre, Gebran Bassil. En effet, depuis quelques jours, des rumeurs circulent sur la possibilité pour Bassil de se porter candidat à la présidence de la République. Cette rumeur a été confortée par une déclaration du chef de l’État Michel Aoun à l’agence Reuters, dans laquelle il a notamment précisé que les sanctions américaines seraient neutralisées de facto si Bassil devenait président de la République. De plus, depuis la conclusion de l’accord sur l’exploitation des ressources gazières et pétrolières et le rôle présumé de Bassil dans ce dossier, les milieux politiques hostiles au CPL ont le sentiment que l’attitude du chef de ce courant à l’égard du dossier présidentiel a changé. Ce qui paraissait improbable il y a quelque temps encore semblerait désormais possible. D’ailleurs, dans une volonté de maintenir le suspense, les milieux proches du CPL ne se prononcent pas sur cette question, se contentant de déclarer que la formation pourrait avoir un candidat dont l’identité serait dévoilée en temps voulu.

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Il n’en fallait pas plus pour que les parties hostiles au CPL et à son chef se mobilisent pour chercher à couper court à l’éventualité de la candidature de ce dernier à la présidence de la République. Un des moyens de le faire, ce serait justement de ne pas former un gouvernement selon les conditions du camp présidentiel pour ne pas donner à Bassil des atouts dans la course à la présidence. Il s’agirait donc de ne pas le laisser souffler et l’empêcher de mener sa campagne auprès des forces locales ou internationales... Selon cette interprétation des faits, Bassil aurait en effet besoin d’un peu de temps pour améliorer ses relations avec les différentes parties internes et externes. Il faudrait donc l’en priver et élire un nouveau président le plus vite possible... Pour l’instant, nul ne confirme cette interprétation, mais elle circule de plus en plus dans les milieux politiques.

Jusqu’à samedi soir, plusieurs parties politiques étaient convaincues qu’un nouveau gouvernement serait formé à la dernière minute. Cette conviction était basée sur plusieurs points : d’abord, la certitude que la période qui suit la signature de l’accord avec Israël sur l’exploitation des ressources gazières exige une stabilité sécuritaire pour que celui-ci puisse être...

commentaires (11)

Grand Mikati !!!!

Eleni Caridopoulou

18 h 36, le 01 novembre 2022

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Commentaires (11)

  • Grand Mikati !!!!

    Eleni Caridopoulou

    18 h 36, le 01 novembre 2022

  • Aoun voulait imposer un ministère favorable à lui, en même temps que retarder l'élection présidentielle jusqu'à fatiguer les députés, pour finalement élire son dauphin,coûte que coûte, malgré qu'il est détesté par une majorité de libanais. En résumé, il voulait reprendre le scénario de 2014-2016. C'est clair. Les gens ne sont pas si naïfs pour le lui permettre. Mikati a fait échouer son plan.

    Esber

    16 h 57, le 01 novembre 2022

  • Heureusement qu’il y a encore quelques dizaines de personnes qui croient encore que Gebran Bassil peut être élu président de la république, ça permet aux millions d’autres libanais de se marrer. J’ai plus de chances d’être roi d’Angleterre que Bassil d’être président…

    Lecteur excédé par la censure

    15 h 45, le 01 novembre 2022

  • Le Bécile est le seul espoir qui reste à Aoun de voir quelqu’un de pire que lui accéder au poste suprême, pour ne pas entrer dans l’Histoire comme le pire président de tous les temps…

    Gros Gnon

    14 h 04, le 01 novembre 2022

  • Bien sûr à la tête de la magistrature suprême

    Hitti arlette

    12 h 36, le 01 novembre 2022

  • Bassil est le candidat potentiel. Je « pense « qu’il sera élu à la tête avec l’accord des États-Unis, et au grand dam de ses détracteurs . Bonne journée Scarlett

    Hitti arlette

    10 h 58, le 01 novembre 2022

  • TROP D,INTERPRETATIONS QUI NE CIRCULENT QUE DANS LA TETE DE MADAME.

    LA LIBRE EXPRESSION

    10 h 51, le 01 novembre 2022

  • Le délire le plus total. Gebran Bassil, l’homme le plus haï de la république par 80% de sa population, potentiel président de la république. De plus, ce personnage a prouvé sa totale incompétence dans tous les postes qu’il a occupés. Alors même pas en rêve ni en fantasme Mme Haddad, Gebran Bassil ne sera jamais président de la République.

    Lecteur excédé par la censure

    08 h 08, le 01 novembre 2022

  • Gebran Bassil semble sincèrement croire que son heure est venue. Que le Hezbollah fera pression sur ses alliés pour l’élire. Pourtant les efforts menés par le même Hezbollah et par Mr État Profond alias Abbas Ibrahim pour former un gouvernement lors des dernières heures du mandat suggèrent plutôt que le plan du Hezbollah et de ses maîtres était d’endormir les Libanais sur la vacance présidentielle avec un gouvernement caché-misère comme entre 2014 et 2016. Bassil et le CPL ont ainsi sabordé le plan de subversion anti-nationale de leur propre camp ! Celui-ci se trouve contraint de désigner un candidat au plus vite faute de quoi devant la majorité de l’opposition soudée devant la candidature de Michel Moawad il révélerait son caractère anti-libanais. Il pense s’en sortir par le truchement de la convocation d’une session de dialogue par Mr Berri. Le camp patriote doit refuser ce piège et en même temps insister pour que les 2 petits coqs de l’autre camp se présentent en même temps s’il le faut et que l’on compte les voix au final. Si le parlement est toujours incapable d’élire un président, la solution qui respecte le mieux l’esprit de la loi à défaut de la lettre est de le dissoudre et de procéder à de nouvelles législatives où chaque député candidat annonce le candidat à la présidence de la république qu’il a l’intention d’élire. Et les électeurs des haririens et des pseudo-thouwar voteraient pour Mr Moawad contrairement à leurs élus. Donc 65 + voix probables pour Moawad.

    Citoyen libanais

    08 h 04, le 01 novembre 2022

  • L'interprétation citée au dernier paragraphe n'a aucun sens. Les parties hostiles au CPL qui ont déjà nommé un candidat le font pour faire passer leur candidat et non pas pour empêcher Bassil de devenir président. N'importe quelle campagne auprès des forces locales ou internationales lui prendra des ans et ne mènera à rien.

    Zovighian Michel

    02 h 49, le 01 novembre 2022

  • Chere Madame Il y a encore quelques annees je trouvais vos analyses pertinantes et parfois petcutantes . J ai pour autant continuer a vous lire pour progressivement constater que votre objectivite journalistique devenait un plaidoyer permanent de l action Aouniste nonobstant la perte d honetete intellectuelle que cela obliger . Dommage , vous valiez mieux . Plus surprenent est que vos employeurs ne l ait pas note ou ai choisi pour garder un public qui est devouf a cette log’e politique et

    Philippe SEDNAOUI / LEBANON INVEST SAL.

    01 h 27, le 01 novembre 2022

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