Aoun affirme œuvrer pour former un gouvernement ayant les pleins pouvoirs

Le chef de l'Etat libanais, Michel Aoun, a affirmé mardi qu'il œuvrait pour "former un gouvernement ayant les pleins pouvoirs" à même d'assumer les fonctions du président de la République après le 31 octobre, date de la fin de son mandat, si son successeur n'est pas élu dans les délais constitutionnels.

"J'œuvre pour la formation d'un gouvernement ayant les les pleins pouvoirs, capable d'exercer les prérogatives du président en cas de vacance présidentielle après le 31 octobre", a affirmé M. Aoun, lors d'une réunion avec une délégation d'ambassadeurs de l'Union européenne. Il a estimé, en outre, qu'il est "difficile de gérer un Etat à trois têtes (...) C'est pour cela que nous voyons ce chaos constitutionnel vu l'existence d'un cabinet chargé de gérer les affaires courantes et d'un Parlement récemment élu mais composé (de députés) d'appartenances diverses". "Le Liban a besoin de réforme politique, en plus de changements structurels dans le système qui doit être renforcé et réformé", a estimé le chef de l'Etat.

Les tractations gouvernementales stagnent, bien que le Premier ministre désigné, Nagib Mikati, ait promis, jeudi dernier de se réunir de nouveau avec le chef de l'Etat à son retour d'un déplacement à l'étranger prévu pour plusieurs jours. "Je ne quitterai pas le palais avant d'avoir formé un gouvernement", avait-il assuré, alors que son équipe ministérielle gère les affaires courantes depuis le 22 mai. Plusieurs observateurs craignent que M. Aoun ne veuille rester au palais de Baabda après la fin de son mandat, sous prétexte qu'un cabinet sortant ne peut exercer les prérogatives du président.

Inquiétudes européennes

Pour sa part, l'ambassadrice de France au Liban, Anne Grillo, a souligné la "nécessité de l'existence d'un cabinet ayant les pleins pouvoirs et du respect des échéances constitutionnelles, notamment l'échéance présidentielle". Elle a également mis en garde contre "l'accentuation des crises et des divisions dans le pays si les échéances ne sont pas respectées".

De son côté, le chef de la mission diplomatique de l'Union européenne au Liban, Ralph Tarraf, a exprimé sa grande inquiétude sur la situation au Liban, mettant l'accent sur l'importance que M. Aoun "fasse tout son possible pour mettre en œuvre les réformes demandées par le Fonds monétaire international" avec lequel le Liban a signé un accord préliminaire en avril dernier. 

"Entraves" à l'enquête

Le chef de l'Etat a par ailleurs pointé du doigt "les entraves à l'enquête sur les explosions au port de Beyrouth et à l'enquête sur l'implication de la Banque du Liban (BDL) dans la gestion de la crise monétaire".

Le ministre sortant de la Justice, Henri Khoury, a récemment souhaité la nomination d'un juge suppléant dans le dossier du port alors que l'enquête est suspendue en raison des maints recours présentés contre le magistrat Tarek Bitar, en charge de ce dossier, par des responsables et des élus poursuivis par la justice. M. Khoury a en effet proposé au Conseil supérieur de la magistrature (CSM) le nom de Samaranda Nassar, 1ère juge d’instruction du Liban-Nord réputée proche du camp Aoun, pour cette fonction de suppléance.

M. Aoun a enfin rappelé que l'audit de la BDL se poursuit dans l'espoir qu'un premier rapport soit publié "fin septembre", à l'heure où ses détracteurs l'accusent de vouloir faire assumer toute la responsabilité de la crise financière au gouverneur de la BDL, Riad Salamé, bête noire du camp politique aouniste.